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Partager un bon repas est un bienfait pour le corps et l’esprit. Qui n’en conviendrait pas? Manger, c’est aussi recevoir ce qu’il nous faut pour vivre. Cependant c’est le jeûne qui nous réapprend à apprécier ce don de la Création et à en jouir avec modération. Le jeûne, c’est un choix autodéterminé qui nous donne des impulsions pour développer un style de vie et une économie solidaire, empreints de contentement.

«Jeûner face à la crise politique». Voici le titre d’une semaine de jeûne qui a eu lieu fin mars et a réuni un groupe de personnes de divers horizons à l’Eglise mennonite de Berne (Suisse), en collaboration avec ChristNet. En tant qu’animatrice de temps de jeûne avec accréditation médicale, je constate que le jeûne, tout en procurant du repos à notre système digestif, rend notre esprit plus libre et réceptif. Il nous permet d’être à nouveau attentifs aux choses que nous ne voyions plus, aux mots et aux odeurs… Tous nos sens se réveillent et nous rendent sensibles à nous-mêmes, à notre environnement, à nos prochains. Le jeûne casse des comportements bien rodés et nous invite à essayer quelque chose de nouveau qui fait du bien à nous-mêmes et aux autres.

Ce qui se passe dans le monde

C’est exactement l’état qu’il faut pour regarder de plus près et sans œillères, ce qui se passe dans le monde. Ne sommes-nous pas tous inquiets face à ces hommes forts, avides de pouvoir, tout en étant embrouillés dans la violence et la corruption? Ces hommes qui exercent (à nouveau) une force d’attraction apparemment irrésistible? Et non seulement des hommes: des femmes aussi empruntent le chemin du populisme pour obtenir le pouvoir. Comment est-il possible que des personnes qui proposent un programme politique basé sur l’exclusion, le racisme et l’appropriation illégitime puissent gagner des élections? Que pouvons-nous faire?

Volonté de résister…

Démêler les racines de ce problème est très complexe et, lors de notre semaine de jeûne… non, nous n’avons pas trouvé de réponses et de solutions toutes faites. Mais nous avons trouvé la volonté de résister. C’est dans la résistance non-violente que la beauté et le potentiel créatif de l’humanité brillent le plus fort. Pour cela, il nous faut, d’une part, cheminer et prier ensemble afin de rester dans la cible. Il nous faut, d’autre part, nourrir notre conscience au quotidien afin de trouver des pistes concrètes, comme par exemple choisir un mode alimentaire qui ne nuise pas à nos prochains du Sud.

… dans le silence et la lenteur

Dieu manifeste sa puissance en tant que force de création, de vie, d’amour et de bienveillance. Il crée la vie dans le silence et la lenteur. De la même manière, nous voulons exprimer notre résistance face aux puissances et aux autorités par la foi, l’amour et l’espérance. Tel pourrait être le bilan de cette semaine de jeûne.


[1] Tribune parue sous la rubrique « Regards » dans Christ Seul (mensuel des Eglises évangéliques mennonites de France), n° 1075, mai 2017, www.editions-mennonites.fr.

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À la suite de plusieurs élections et votes, que ce soit en Suisse, en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis ou encore peut-être bientôt en France, une tendance vers le nationalisme se fait sentir. D’où provient-elle ? Il est bien possible que ce sont les inégalités grandissantes au sein des pays avancés qui poussent les gens à soutenir des programmes nationalistes.

En effet, ceux qui ont beaucoup de richesses les voient augmenter toujours plus, alors que les travailleurs voient leurs revenus stagner, voire régresser, accentuant les inégalités. Finalement, la classe moyenne des pays occidentaux a l’impression de payer les pots cassés de la mondialisation et sent poindre la précarité.

S’effrayer ou se réjouir ?

Cette impression se manifeste, certes, de manière bien réelle sur le porte-monnaie. Mais elle est aussi réductrice. En effet, la mondialisation a permis l’essor des classes moyennes dans de nombreux pays en développement. Celles-ci ont obtenu l’accès à la santé, à l’éducation et à des infrastructures pour voyager. Paradoxalement, l’émergence de nouveaux milieux aisés a contribué à mettre en lumière les inégalités criantes de ces pays.

Faut-il s’effrayer de la précarité croissante ou se réjouir d’un nombre plus grand de gens aisés au niveau mondial ? Il n’y a pas de réponse simple. Et il ne semble pas y avoir d’issue à la régression de nos classes moyennes. La croissance permanente de l’endettement privé et public en témoigne.

Deux solutions radicales sont proposées en Occident : plus de mondialisation ou plus de nationalisme. Cependant, on a l’impression de choisir entre la peste et le choléra. L’histoire se répète comme après la crise de la fin des années 1920 entre le rêve égoïste d’impérialisme du capital et les aspirations nauséabondes du fascisme de Mussolini et du national-socialisme d’Hitler. Donc, rien de nouveau sous le soleil.

Une troisième voie

Y-a-t-il une troisième voie ? Oui. Elle s’appelle le contentement. A ce sujet, Paul écrit : « J’ai appris à me contenter de l’état où je me trouve. Je sais vivre humblement comme je sais vivre dans l’abondance » (Philippiens 4.11b–12). Il est question d’un apprentissage où l’essentiel est dans le détachement des richesses terrestres. En effet, Dieu ne pourvoit pas à nos désirs, mais à nos besoins. Jésus a quitté sa gloire en venant à nous pour nous enrichir. Il nous appelle à suivre son exemple à nous contenter de peu, même si nous sommes dans le superflu, afin d’aller au-devant des autres, et d’être généreux envers les nécessiteux.

Les répercussions du contentement sont importantes. Nous ne perdons plus de temps à désirer des choses nouvelles et souvent futiles. Quant au niveau de la société, cela conduit à valoriser tout forme de partage et d’entraide au détriment d’une recherche égoïste du profit. Cela implique de payer des prix qui rémunèrent le travail effectué, d’avoir une justice forte capable de contrer l’exploitation. Cela signifie aussi de taxer raisonnablement les revenus du capital.

Notons que la « foi devient une grande source de richesse quand on se contente de ce que l’on a » (1 Timothée 6.6), donc votons le contentement au jour le jour !


Tribune parue sous la rubrique « Regards » dans Christ Seul (mensuel des Eglises évangéliques mennonites de France), n° 1074, avril 2017, www.editions.mennonites.fr.