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Il y a un an, on parlait déjà de la menace d’une « pénurie d’électricité », et maintenant de la menace d’une « situation de pénurie ». Pourtant, même les pires scénarios ne prévoient que quelques heures de pénurie d’électricité. Est-ce si grave pour notre vie ? Où en sommes-nous ?

Intérêts politiques et financiers

On ne sait pas non plus quelle est la part de calcul politique derrière tout cela. On prétend qu’il n’y a plus assez d’énergie à cause du tournant énergétique. Certains cercles ont organisé un tir de barrage contre le « bouc émissaire » Sommaruga, qui ne pouvait apparemment plus se sauver qu’en démissionnant. Ces groupes d’intérêts ont ainsi atteint leur objectif et espèrent sans doute maintenant pouvoir modifier le département de l’environnement et de l’énergie avec Albert Rösti selon leurs propres désirs et intérêts. Parallèlement, cette « situation de pénurie » a permis d’instiller dans la population la peur du contre-projet à l’initiative sur les glaciers, dont le vote est imminent en raison d’un référendum. Le tournant énergétique, qui devrait être mis en œuvre de toute urgence, risque ainsi d’être retardé.

Il est toutefois inutile de se mettre la tête dans le sable : Le climat continue de se réchauffer impitoyablement. Un nouveau retard nous ferait perdre un temps précieux et nous exposerait à des dommages encore plus importants. Il est révélateur de voir avec quelle force une partie de la population et des représentants de certains secteurs économiques s’accrochent aux affirmations des derniers négationnistes du climat ou à d’autres excuses pour éviter l’amère réalité. Comment se fait-il que l’avertissement de dizaines de milliers de scientifiques ne soit pas pris en compte de ce côté ?

Quand en aurons-nous assez ?

Avec notre « prospérité » croissante, nous avons besoin de toujours plus d’énergie. Des appareils supplémentaires, des voitures toujours plus nombreuses et plus grandes, des voyages en avion plus fréquents, des habitations plus grandes que nous devons chauffer en sont la cause. Les statistiques montrent certes une stagnation de la consommation d’énergie en Suisse depuis 20 ans et une baisse de la consommation depuis 2010 (avec une chute pendant la pandémie), mais cela est dû en grande partie à la désindustrialisation : Nous provoquons ainsi simplement une augmentation de la consommation d’énergie dans d’autres pays (Europe de l’Est, Chine, Inde) et importons toujours plus d’énergie grise.
Avons-nous vraiment besoin de tout cela ? Une tablette de plus ? Un presse-agrumes électrique, parce que nous ne pouvons plus presser et tourner nous-mêmes les moitiés d’orange ? Ou de la brosse à dents électrique ? Ou encore plus de jouets pour enfants à piles ? Ou avons-nous vraiment besoin d’une voiture ? Pourquoi préférons-nous baisser les impôts plutôt que de développer les transports publics comme une véritable alternative ?

Étions-nous vraiment si mal lotis auparavant ? Est-ce que c’était mal de ne pas prendre l’avion pour partir en vacances ? Ou est-ce que le shopping à Londres nous a vraiment manqué ?

Pourquoi avons-nous besoin de tout cela ? Et surtout : quand est-ce que ça suffit ? De combien d’énergie supplémentaire avons-nous réellement besoin ?

Notre chère liberté est-elle en danger ?

Il est difficile de renoncer à l’infinité de nos possibilités ou de ne pouvoir en réaliser qu’une partie. Face aux propositions de se restreindre pour ne pas compromettre l’avenir, nous voyons très vite notre liberté en danger. Ou alors, nous craignons pour les facilités techniques de notre quotidien en période de stress. Concernant ce dernier point, il faut également se demander pourquoi nous avons créé une économie et une société qui génèrent autant de stress. Peut-être devrions-nous nous attaquer aux causes de notre consommation. Car notre mode de vie, qui consomme toujours plus de ressources et émet toujours plus de CO2, a de graves conséquences. Les prédictions de la science se sont malheureusement toutes réalisées jusqu’à présent ou étaient même encore trop optimistes.

Les conséquences du réchauffement climatique ne sont pas encore vraiment perceptibles pour nous, ici en Suisse. C’est pourquoi nous avons du mal à nous mobiliser pour réagir, bien que dans les baromètres de l’anxiété de gfs.bern, établis chaque année jusqu’en 2015, le réchauffement climatique apparaissait régulièrement comme l’une des plus grandes craintes. Ce qui est encore irréel pour nous est pourtant inéluctable et a bêtement un temps d’avance de plusieurs décennies. Nos enfants devront faire les frais d’énormes problèmes si nous ne réagissons pas maintenant. Mais le renoncement est si difficile.

Nous préférons insister sur la liberté de pouvoir continuer à détruire la vie de nos proches et la création de Dieu. Mais cette liberté n’est pas acceptable, il n’y a pas de droit au vandalisme (de la nature) et à la mise à mort d’êtres humains (par des sécheresses et des inondations). Serions-nous d’accord pour que ces délits soient supprimés du code pénal et autorisés ? Ce n’est pas parce que notre responsabilité personnelle ne peut pas être attribuée aussi directement aux conséquences que nous n’en sommes pas responsables. Nous avons tous une part de responsabilité à plusieurs niveaux. Pointer du doigt ceux qui détruisent encore plus que nous n’est pas valable.

La modération est indispensable.

Nous ne manquons donc pas d’énergie, mais nous en consommons trop. Il n’y a pas d’autre solution que de réduire nos exigences et notre consommation, car avec des centrales nucléaires risquées et coûteuses, nous nous exposons tout simplement à de nouveaux problèmes. Les éoliennes et les barrages ont également leurs limites. Ce n’est pas pour rien que la société à 2000 watts a été prônée dès le début des années 1990 : Nous ne pouvons pas éviter de limiter la consommation d’énergie par personne dans le monde à 2000 watts. Est-ce si grave ? La vie n’a-t-elle pas tellement plus à offrir ? Sommes-nous encore tellement prisonniers du matérialisme ? Ce défi de mener une vie épanouie avec moins de biens et de consommation n’est-il pas justement une belle invitation pour nous, chrétiens ? Ne devrait-ce pas être une distinction pour les chrétiens que d’être moins soumis à la société de consommation ?

Photo by Federico Beccari on Unsplash

 

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A première vue, la boussole, la poudre à canon et le chemin de fer n’ont pas grand-chose en commun. Un deuxième regard le montre : Toutes ces inventions et découvertes ont eu un impact décisif sur notre histoire européenne. Elles ont marqué le début d’une nouvelle étape couronnée de succès. Du moins pour une partie de l’humanité. Mais en chemin, nous avons perdu quelque chose : l’étalon d’une mobilité saine.

La mobilité n’est pas une invention de l’époque moderne. Ainsi, l’Empire romain permettait une mobilité inédite à l’intérieur de ses frontières grâce à ses routes fortifiées. Les forces armées romaines pouvaient partir de Rome et atteindre Jérusalem en suivant la côte en 22 jours environ1 . Elles parcouraient ainsi plus de 3400 km. On peut aussi penser à ce que l’on a appelé plus tard la migration des peuples germaniques entre le 2e et le 6e siècle. Des fédérations entières de peuples se sont alors déplacées pendant plusieurs siècles : Ils ont été déplacés ou ont été contraints de prendre la fuite.

Il est frappant de constater que les exemples bibliques de mobilité ont généralement une connotation positive. Abraham a été invité à se mettre en route « vers le pays que je te montrerai ». Le peuple d’Israël s’est mis en route vers la terre promise. L’ordre de mission du Nouveau Testament est lié à l’invitation à y aller. Enfin, le ciel est souvent compris comme un lieu lointain dans l’au-delà où l’on se rend2 .

Bref, être mobile n’est pas une invention de notre époque. Toutefois, les possibilités de le faire sont aujourd’hui devenues presque illimitées. C’est pourquoi la question de savoir comment nous gérons ces possibilités illimitées de mobilité se pose avec plus d’acuité que jamais. La réponse dépend de l’échelle à laquelle nous nous plaçons. C’est pourquoi je ne souhaite pas remettre en question la mobilité en tant que telle, mais plutôt la ligne directrice avec laquelle nous l’évaluons. Pour cela, un regard sur l’histoire nous aide.

Boussole, poudre à canon et nouvelle vision du monde

La boussole utilisée par les marins a marqué le début d’une nouvelle ère technique : elle est le symbole du passage de la fin du Moyen Âge aux temps modernes. Les navires naviguant sur les mers pouvaient désormais atteindre leur destination lointaine malgré les tempêtes. C’est à cette époque qu’a eu lieu la grande découverte d’un monde que nous n’avions pas encore exploré : Christophe Colomb voulait aller aux Indes et a rencontré l’Amérique, Vasco de Gama a trouvé la voie maritime vers les Indes quelques années plus tard. Ces nouvelles possibilités de mobilité ont permis aux uns de faire de gros butins, tandis que les autochtones étaient exploités sans pouvoir revendiquer leur continent.

La poudre à canon, autre grande découverte de l’époque, a permis de créer des armes plus efficaces. Avec l’imprimerie et la lunette astronomique, elle fait partie des grandes découvertes du 15e siècle3.  La poudre à canon a changé la position de la chevalerie médiévale et a marqué le début d’une transformation sociale, tandis que l’imprimerie et surtout la lunette astronomique ont marqué un tournant dans la vision du monde de l’époque.

Mais l’impact du nouveau paradigme philosophique depuis le 14e siècle, qui a rendu les sciences naturelles possibles par la suite, a probablement été encore plus fort que ces découvertes techniques du 15e siècle. Il est fort probable que ce nouveau mode de pensée ait ouvert la voie aux grandes découvertes qui ont été associées plus tard aux noms de Nicolas Copernic (1473-1543), Johannes Kepler (1571-1630), Galileo Galilei (1594-1641), mais aussi à Isaac Newton (1643-1727) : Ils ont tous, à leur manière, scellé la percée de la vision scientifique du monde. A l’époque moderne, l’homme, ses possibilités techniques et les connaissances scientifiques étaient désormais au premier plan. Une vision du monde qui nous caractérise encore aujourd’hui4. .

Tout marche comme sur des roulettes !

Le principal moteur de l’industrialisation naissante était la machine à vapeur. On pouvait désormais gagner beaucoup d’argent dans l’industrie, d’abord en Angleterre à la fin du 18e siècle, puis dans d’autres pays européens au début du 19e siècle. Cela a changé toute la vie sociale. Des usines ont été construites et le travail manuel a été remplacé par des machines ; le chômage et la pauvreté ont évolué au même rythme que la croissance des villes. Dans le domaine de la mobilité, c’est surtout le chemin de fer qui a ouvert de nouvelles possibilités. Il était très important pour le transport du charbon et du fer, mais il nécessitait lui-même une grande quantité de fer pour sa fabrication. Grâce aux nouvelles possibilités de mobilité, les prix des marchandises ont pu être réduits, ce qui a stimulé la production.

Le chemin de fer a toutefois été développé en tenant compte de l’industrie et de ses possibilités de production. L’idée de loisirs, de vacances et de voyages à travers le monde était encore impensable à l’époque. Seuls quelques individus, comme Alexander von Humboldt, partaient à la découverte du monde et de ses nouvelles possibilités. L’homme du commun restait fidèle à sa terre. Ou bien il était désormais lié à l’usine du capitaliste au sommet, si toutefois il trouvait encore du travail et pouvait ainsi survivre sur place.

La mobilité s’est également développée sous le signe du nouveau paradigme scientifique : l’ancien monde devait être dépassé par le progrès. Parallèlement et malgré tout entremêlée, la liberté de l’individu est devenue de plus en plus centrale, du moins dans un premier temps au sein de l’élite des nouveaux riches. Aujourd’hui, nous le savons avec le recul : Le réchauffement climatique a fortement augmenté avec l’industrialisation. Parallèlement, les nouvelles possibilités techniques et l’autonomie de l’homme ont acquis une valeur quasi religieuse, y compris au sein de la population en général.

Trouver la bonne mesure

Est-ce condamnable ou non ? La réponse à cette question dépend de l’échelle avec laquelle nous mesurons. Quelle possibilité de mobilité est normale pour nous ? Le pôle opposé de l’état normal, qui est peut-être loin d’être bon, serait l’état anormal. Notre mobilité relève-t-elle donc davantage de la normalité ou de l’anormalité ?

Ce que nous pouvons dire : Comme toujours, le progrès est considéré comme un atout. Toutefois, ce ne sont plus aujourd’hui de nouveaux continents qu’il s’agit d’ouvrir, mais de nouvelles planètes5 . Pour que l’échelle habituelle de la mobilité puisse continuer à être maintenue sans conscience, la voiture à essence est peu à peu remplacée par la voiture électrique. Parallèlement, les ventes de voitures lourdes augmentent, comme si la création était une machine remplaçable6 . Bref, la mobilité est restée, elle est même devenue plus luxueuse, plus différenciée et a encore augmenté. Compte tenu de l’énorme destruction de la nature depuis l’industrialisation, la question se pose aujourd’hui de savoir s’il existe des solutions pour sortir de ce schéma. « Grâce » à l’industrie, des régions entières et des eaux sont devenues inutilisables, de nombreuses personnes ont perdu leur emploi7 .

Dans cette situation, les Églises proposent-elles des réponses alternatives ou donnent-elles simplement un vernis théologique à la problématique ? Reprennent-elles même la philosophie sous-jacente et bricolent-elles le paradigme de la croissance ecclésiale à partir du progrès humain ?

Les Eglises feraient bien de s’appuyer sur leur riche tradition biblique et ecclésiale et de se remettre en question, mais aussi de remettre en question la société. Il ne s’agit pas d’idéaliser le monde passé, mais de se demander comment – dans une perspective chrétienne – nous pouvons nous rapprocher de nous-mêmes, de notre prochain et, en fin de compte, de Dieu.

Pour ce faire, les Eglises ne doivent pas attendre les grands leviers de la politique. Elles doivent faire les pas qu’elles peuvent déjà faire, même s’ils semblent insignifiants. A titre d’exemple, l’Eco Church Network8 montre de nombreuses voies simples qu’une Eglise peut emprunter avec ses membres. Ainsi, la fiche D4 – Mobilité montre des étapes concrètes pour chercher de nouvelles voies dans le domaine de la mobilité – et ainsi peut-être retrouver la mesure perdue de la mobilité.


1. cf. Orbis, The Standford Geospatial Network Model of the Roman World, mai 2022 (en ligne)

2. Genèse 12,1 ; Exode 1-15, Matthieu 28,19

3. Störig, Die kleine Weltgeschichte der Philosophie (2000), p. 318-322

4. Ruffing, Introduction à l’histoire de la philosophie (2007), p. 119

5. cf. t3n, Mission sur Mars : Elon Musk met en garde contre un « Armageddon nucléaire », mai 2022 (en ligne)

6. cf. UPSA, Les SUV dominent l’offre, mai 2022 (en ligne)

7. Ruth Valerio cite différents aspects de la destruction de la création, qui touchent souvent l’homme.  Les mers partiellement vidées de leurs poissons, qui empêchent les pêcheurs locaux de gagner leur vie, en sont un exemple.

8. https://ecochurch.ch

Bibliographie

UPSA, Les SUV dominent l’offre : https://t3n.de/news/mars-mission-elon-musk-warnt-1429807, consulté le 20 mai 2022

Orbis, The Standford Geospatial Network Model of the Roman World, en ligne sur https://orbis.stanford.edu, consulté le 22 mai 2022

Ruffing, Reiner : Introduction à l’histoire de la philosophie, Paderborn, 2007

Störig, Hans Joachim : Kleine Weltgeschichte der Philosophie, Stuttgart, 2000

t3n, Mars-Mission : Elon Musk met en garde contre un « Armageddon nucléaire », en ligne sur https://t3n.de/news/mars-mission-elon-musk-warnt-1429807, consulté le 20 mai 2022

Valerio, Ruth : Saying Yes to Life, Londres, 2020

Cet article a été publié pour la première fois le 01 juin 2022 sur INSIST.

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Suite à la guerre en Ukraine, nous avons tous pris conscience que la sécurité de l’approvisionnement en énergie était soudain remise en question. Les coûts ont grimpé en flèche, la structure habituelle des prix s’est dissoute. Face à la menace d’une pénurie d’énergie, la politique fédérale s’engage à un rythme effréné pour la promotion des énergies renouvelables et prend en très peu de temps les décisions nécessaires à cet effet. Il s’agit toutefois d’un retard accumulé au cours des trois dernières décennies. Ou y a-t-il un calcul derrière tout cela ? Sous la pression, des décisions radicales peuvent soudainement être prises, sans tenir compte des conditions cadres désagréables et restrictives de la durabilité ou de la protection de la nature ?

 

Dans le débat public, l’importance omniprésente de l’énergie dans notre vie quotidienne est perçue comme jamais auparavant : Finalement, ce ne sont pas seulement l’électricité et la chaleur qui deviennent plus chères, mais aussi les aliments, les appareils et les machines. Il y a partout beaucoup d’énergie auxiliaire. Il est utile que nous en prenions conscience une fois de plus. Sans pression, il est évident que rien ne change. Cela vaut également pour notre attitude selon laquelle seul le moins cher est assez bon.

Des prix de l’énergie trompeurs

Il faut le dire clairement ici : Les prix avantageux de l’énergie auxquels nous étions attachés jusqu’à présent n’étaient pas adaptés à la réalité. Poussés par les prix bas, les fournisseurs d’énergie n’avaient jusqu’à présent que peu de marge de manœuvre pour investir ou même innover. La production d’énergie décentralisée doit par exemple être raccordée au réseau de distribution plus important. Ce défi n’est que partiellement relevé. Du côté des consommateurs, le gaspillage et l’inefficacité n’avaient jusqu’à présent pas d’impact économique – il n’y avait pas d’incitation à une utilisation économe de l’énergie.

Dans certains domaines, les coûts totaux de la production d’énergie sont loin d’être couverts. Ainsi, les coûts dits externes, c’est-à-dire les coûts consécutifs pour la santé et l’environnement qui résultent de l’utilisation actuelle de l’énergie et qui ne cessent d’augmenter, ne sont pris en compte que dans une très faible mesure. Ces conséquences devraient être compensées par le prix de l’énergie. Les débats à venir sur la durabilité, la protection du climat et de l’environnement montreront l’ampleur des besoins financiers nécessaires pour éviter et réparer les dommages.

L’approvisionnement de base ne supporte pas la spéculation

L’énergie – c’est désormais clair – constitue une part importante de notre approvisionnement de base quotidien. Les discussions montrent sans ambiguïté qu’en cas de pénurie, chaque nation regarde d’abord pour elle-même. Et qu’il ne faut pas compter sur les accords internationaux.

Les biens ou les services de base ne sont pas des biens commerciaux normaux que l’on peut avoir ou ne pas avoir. Les débats internationaux actuels montrent clairement que même avec un grand pouvoir d’achat, l’approvisionnement en énergie n’est pas garanti. Il faut donc en conclure que le système actuel des bourses internationales de l’électricité doit être considéré comme un échec. L’approvisionnement de base n’est pas compatible, à mon avis, avec un commerce motivé par la spéculation.

De nombreux acteurs de la bourse de l’électricité n’ont rien à voir, dans leur activité commerciale, avec la production ou la distribution réelle d’énergie. Ils font des opérations à terme. En d’autres termes, ils spéculent, comme ils le font avec n’importe quelle autre matière première. Le cas d’AXPO montre que les producteurs d’électricité se laissent eux aussi entraîner à accorder plus d’importance au négoce qu’à leur mission première, qui est d’approvisionner l’économie et la population en électricité. Ce comportement n’est plus dans l’intérêt public, mais sous le diktat de l’économie financière.

Cela n’a pas grand-chose à voir avec l’économie réelle. Il n’est tout de même pas possible qu’actuellement, un total de 1 500 milliards d’euros doivent être déposés rien qu’en tant que garanties commerciales pour de futurs contrats de fourniture d’énergie. Cela correspond à environ 8% de la performance économique européenne d’une année1. Et cela se fait sans que l’approvisionnement de base soit garanti dans le propre pays. Des corrections sont indispensables à cet égard.

Renforcer les relations entre producteurs et consommateurs

Faut-il revenir en arrière ? Non, mais il s’agit de couper court aux dérives identifiées ! Il est temps de revenir aux solides expériences de relations directes entre producteurs et consommateurs. Grâce à la technique et à la communication modernes, ces relations peuvent également répondre aux exigences actuelles. Certaines entreprises communales, comme Walenstadt SG, montrent comment cela fonctionne2.

L’exemple d’innombrables réseaux de chaleur au bois-énergie en Suisse montre que la relation directe entre le fournisseur d’énergie et l’économie forestière régionale en tant que fournisseur de combustible a très bien fonctionné et a permis d’obtenir des prix stables. Parallèlement, cette relation directe garantit que les ressources naturelles de la région sont utilisées de manière durable et ne sont pas exploitées3.

Il ne faut pas oublier que le potentiel de bois énergie est limité en Suisse. Il doit être soigneusement réparti. Le fait que tout le monde stocke soudain du bois de chauffage, comme il y a deux ans pour le papier hygiénique, ne mène à rien. Mais nous savons aussi, au moins depuis l’été dernier, que les possibilités d’exploitation de l’énergie hydraulique sont limitées.

Changer de mentalité : utiliser l’énergie en connaissance de cause

Le message sur les économies publié par le Conseil fédéral présente de nombreuses possibilités d’économies pour les particuliers, les entreprises et le public. Ces listes exhaustives sont utiles et peuvent être mises en œuvre immédiatement. Désormais, la règle n’est plus : je ne sais pas comment ni où. J’espère volontiers que le plus grand nombre possible de personnes se laisseront convaincre par ces messages.

Que ce soit pour nous, particuliers ou entreprises, la situation actuelle de pénurie et de coûts élevés nous oblige à adopter une nouvelle attitude dans notre rapport à l’énergie.

Des questions se posent, telles que :

Qu’est-ce qui est nécessaire pour couvrir les besoins de base, fournir les prestations requises et fabriquer les produits ?
En quoi souhaitons-nous un confort ciblé – plus que nécessaire – afin de rendre notre vie ou notre travail plus agréable et nos tâches plus simples ?
Dans quel but faut-il utiliser consciemment le luxe – l’énergie en abondance – et pourquoi ?
Le gaspillage est-il inconscient ou dû à une négligence qui peut être stoppée ?

Utiliser l’énergie avec parcimonie signifie préserver les ressources. Et c’est le premier commandement de la protection du climat et de l’environnement. En ce sens, le choc actuel en matière de prix et d’approvisionnement peut être salutaire et porteur d’avenir. Un tel changement de cap aura également un impact global, puisque plus de 80% de la population mondiale suit notre exemple.

1 fritz.fessler@gemeinwohl.coop

www.gemeinwohl.coop

2 www.walenstadt.ch

3 www.renercon.ch

(Image: Myriams-Fotos, Pixabay)

Cet article est initialement paru le 01 novembre 2022 sur https://www.insist-consulting.ch/forum-integriertes-christsein/22-11-4-energie-ein-heilsamer-schock-geht-um-die-welt.html

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Il est insupportable de devoir écouter les discours du président de la FIFA, Gianni Infantino. Le narratif officiel de la FIFA1 selon lequel seules 3 personnes, et non 65002 , ont perdu la vie sur les chantiers des stades au Qatar est toujours d’actualité. Avec des comparaisons tirées par les cheveux avec ses propres origines, le président de la FIFA minimise les souffrances des ouvriers qui ont dû travailler dans des conditions proches de l’esclavage et qui – pour la plupart d’entre eux – le font encore : Ses parents aussi auraient dû rendre leurs passeports et lui aussi aurait subi des moqueries à cause de la couleur de ses cheveux. Et finalement, on donnerait aux gens de la dignité et de la fierté lorsqu’on leur donne du travail. Au lieu d’assumer la responsabilité des conséquences de la Coupe du monde, ce qui est d’ailleurs prescrit par les statuts de la FIFA, les travailleurs reçoivent encore une humiliation de la part d’Infantino.

Diviser au lieu de résoudre les problèmes

Il avait déjà été prouvé que l’attribution de la Coupe du monde au Qatar était due à la corruption3 . La critique a ensuite été généralement bloquée par la FIFA. Lorsque, à partir de 2021, différentes associations de football ont prévu d’attirer l’attention sur des abus pendant la Coupe du monde, la FIFA est devenue nerveuse, car la critique nuit aux affaires : Infantino a estimé qu’il ne fallait « pas amener tous les problèmes dans le football ». Le quasi-esclavage et les 6500 morts n’ont toutefois encore jamais été le prix à payer pour une Coupe du monde et ne sont pas un problème quelconque.

Mais les critiques à l’encontre de la Coupe du monde et de la FIFA ne se sont pas laissées étouffer, pas même par des menaces contre certaines fédérations comme le Danemark et l’Allemagne. Sept fédérations se sont solidarisées avec elles dans une lettre et ont annoncé des actions de protestation. Pour franchir une nouvelle étape dans l’escalade, Infantino a ensuite tenté, dans un discours d’une heure4 , d’acculer et de minorer les critiques en construisant des ennemis déclarés. « Cette leçon de morale unilatérale est une pure hypocrisie. Pour ce que nous, Européens, avons fait au cours des 3000 dernières années, nous devrions nous excuser pour les 3000 prochaines années avant de commencer à donner des leçons de morale aux gens ». On tente ainsi de détourner l’attention des contenus et des problèmes et, au lieu de cela, de placer le sujet sur le plan d’une confrontation. Une telle stratégie est bien connue dans les discussions politiques : On suppose que le critique ne cherche qu’à se faire passer pour le bon et l’autre pour le méchant. Cela signifie donc que je dois me taire sur la situation dans le monde, car mes ancêtres ont agi de la même manière – et je dois d’abord accepter l’oppression de mon prochain pendant 3000 ans.

Infantino savait qu’il recevrait également beaucoup d’encouragements5 pour ses divisions de la part d’anciens Etats colonisés par des puissances européennes. Donc de la majorité des Etats du monde. Car là-bas, l’Europe est toujours une ennemie. La revendication des droits de l’homme y est souvent considérée par les élites et les dictateurs actuels comme une nouvelle ingérence et de l’impérialisme. Mais en les rassemblant autour de lui pour dévaloriser les défenseurs des droits de l’homme, Infantino se fait le porte-parole et le défenseur de ces dirigeants et de ceux qui rejettent la dignité humaine. Il ne voit pas non plus de problème à organiser une Coupe du monde en Corée du Nord ou en Iran et affirme que c’est justement grâce à de tels événements de grande envergure que des changements pourraient être amorcés. Il ferme ainsi les yeux sur le fait que ces festivals sportifs renforcent généralement le pouvoir de dirigeants autoritaires, comme par exemple les Jeux olympiques en Allemagne en 1936 ou la Coupe du monde de football en Russie il y a quatre ans.

Avec la Coupe du monde de football, la FIFA a donc une influence sur les événements mondiaux. Et en défendant les intérêts du Qatar et en minorisant les fédérations qui revendiquent les droits de l’homme, la FIFA se range du côté des dictateurs et des bouchers. Dans un contexte où la démocratie est en train de s’éroder dans le monde entier (voir l’indice de démocratie6 ) et où tant les droits de l’homme que la presse libre sont sous pression, un tel comportement est dangereux. En menaçant les associations critiques, en réprimant l’expression des opinions et en diabolisant les critiques, la FIFA joue le jeu des dictatures et incite ceux qui se taisent à continuer de le faire.

L’argent et le pouvoir sont plus importants que les droits de l’homme

Certains disent que Joseph Blatter, l’ancien secrétaire général de la FIFA, a créé un monstre. On pensait qu’avec Infantino, les choses iraient mieux. C’était une erreur de jugement. Le nouveau patron de la FIFA n’a pas tardé à abolir la commission d’éthique interne, à courtiser Poutine et à défendre désormais par tous les moyens le Qatar, qui injecte tant d’argent dans le football.

En fait, Blatter a transformé la FIFA en une machine à sous. Le profit, la richesse et donc le pouvoir semblent être au centre des préoccupations. La FIFA prétend tout faire « pour le football », mais en réalité, il s’agit davantage de maximiser les profits : les droits de retransmission télévisée sont vendus aveuglément aux télévisions payantes les plus offrantes. Le football n’est donc plus accessible à tous à la télévision, mais dans de nombreux pays, il est réservé à ceux qui paient. Les associations membres de la FIFA reçoivent ainsi des dividendes de plus en plus importants, ce qui les lie à la FIFA et leur permet de faire partie du système. Elles aussi (et leurs fonctionnaires) ont donc intérêt à ce que rien ne vienne perturber les affaires.

Mammon est ainsi plus important que les êtres humains. Tout est mis en œuvre pour réaliser encore plus de bénéfices, même si cela a comme conséquence de promouvoir des systèmes malsains. La Coupe du monde de football au Qatar devrait rapporter un bénéfice record d’un milliard de francs à la FIFA. Cet argent serait immédiatement réinvesti « dans le développement du football » dans les pays membres. Toutefois, la FIFA ne contrôle guère si l’argent est réellement utilisé pour le football. Ainsi, les joueuses de l’équipe nationale féminine de football du Congo Kinshasa ont dû passer de longues nuits dans la rue, bien qu’elles aient été officiellement et généreusement soutenues par la FIFA …

Et la Suisse dans tout ça ?

Avec les dossiers Mammon7 , ChristNet a montré il y a quelque temps déjà que la Suisse est coresponsable de la souffrance dans le monde et de l’affaiblissement des structures démocratiques en raison d’une avidité pour l’argent, du secret bancaire, du dumping fiscal et de son rôle de havre pour de nombreuses multinationales aux pratiques d’exploitation. De manière presque symptomatique, la FIFA a également son siège en Suisse, et ses dirigeants, Blatter et Infantino, sont également suisses. La question se pose donc de savoir combien de temps nous devrons encore tolérer ces pratiques en Suisse.

Comme argument en faveur du maintien de la FIFA en Suisse, on avance parfois que notre État de droit est un garant pour que les injustices soient également sanctionnées à la FIFA. Mais apparemment, c’est le contraire qui est vrai : aucun des cas portés devant les tribunaux en Suisse n’a abouti à une condamnation pour corruption. Certains cas ont même été retardés jusqu’à ce que les affaires soient prescrites en raison de l’incapacité (ou de la mauvaise volonté) des autorités de poursuite pénale. D’autres affaires ont été retardées en raison de la partialité des juges. Ne faudrait-il donc pas plutôt dire que l’amour suisse pour les dirigeants et les flux financiers est le garant de l’absence de poursuites ?

Les droits de l’homme sont le minimum de l’amour du prochain !

Si nous défendons les droits de l’homme, c’est parce qu’ils représentent un minimum de dignité humaine. Les droits de l’homme sont donc aussi le minimum d’amour du prochain et de justice que nous voulons accorder à notre prochain. Les droits de l’homme ne sont donc pas simplement un produit culturel de l’Occident qui doit être imposé à d’autres pays et cultures. En règle générale, les opposants aux droits de l’homme ne sont pas les personnes opprimées dans les pays pauvres, mais les élites dirigeantes locales qui se soucient de leur pouvoir et de leurs profits. Ici aussi, les gouvernants traitent les défenseurs des droits de l’homme de « moralisateurs » lorsque les dernisers privilégient la dignité humaine dans les pays pauvres aux bénéfices des groupes suisses de matières premières. C’est le cas du conseiller fédéral Maurer qui, à l’occasion de la votation sur la responsabilité des multinationales, a balayé l’appel à la responsabilité des groupes suisses dans les pays du Sud en le qualifiant d' »ingérence dans leur culture ». Comme si les victimes de Glencore et Holcim préféraient ne pas avoir de droits de l’homme …

Les droits de l’homme sont souvent une source d’irritation pour les puissants (et leurs admirateurs), car ils entravent l’exercice du pouvoir et de la force ainsi que de plus grands profits. Cela vaut pour le gouvernement suisse, les entreprises suisses, la FIFA et même pour les admirateurs du pouvoir et de la force comme la Weltwoche, qui a reproduit le discours d’Infantino dans son intégralité et l’a qualifié d’impressionnant, de très intéressant et d’intelligent. Cela montre une fois de plus quelles valeurs sont importantes pour ce journal.

Nous sommes donc une nouvelle fois placés devant le choix entre Dieu et Mammon. Mat. 6.24 : « Personne ne peut servir deux maîtres : ou bien il haïra l’un et aimera l’autre, ou bien il s’attachera à l’un et méprisera l’autre. Vous ne pouvez pas servir Dieu et Mammon ». Choisir Dieu, c’est aussi choisir d’aimer son prochain. En effet, dans Matthieu 22.34-40, le commandement le plus élevé est résumé comme suit : « Mais Jésus lui dit : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta pensée ». C’est le premier et le plus grand des commandements. Mais l’autre lui est semblable : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Toute la loi et les prophètes sont suspendus à ces deux commandements ».

Nos prochains sont à l’image de Dieu. Engageons-nous pour eux à tous les niveaux !

 

La plupart des sources sont en allemand

1. https://www.bernerzeitung.ch/man-gibt-ihnen-wuerde-und-stolz-infantino-fuer-aussagen-zu-arbeitern-in-katar-heftig-kritisiert-645639816801

2. https://www.theguardian.com/global-development/2021/feb/23/revealed-migrant-worker-deaths-qatar-fifa-world-cup-2022

3. https://de.wikipedia.org/wiki/Vergabe_der_Fu%C3%9Fball-Weltmeisterschaften_2018_und_2022

4. https://www.n-tv.de/sport/fussball-wm/Die-wirren-Aussagen-des-Gianni-Infantino-im-Wortlaut-article23729519.html

5. https://www.watson.ch/sport/analyse/869294204-wm-2022-in-katar-hinter-infantinos-rede-steckt-kalkuel

6. https://de.wikipedia.org/wiki/Demokratieindex

7. https://christnet.ch/fr/ressources/


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