Ces derniers temps, plusieurs initiatives populaires bénéficiaient de 60 à 70 % d’opinions favorables une année avant le scrutin pour ne récolter au final qu’entre 20 et 40 % de oui. Systématiquement, les adversaires ont monté de véritables propagandes à coup de millions afin d’insuffler aux électeurs la peur de manquer.
Jusqu’à aujourd’hui, la population réservait un accueil favorable à l’impôt successoral. Laisserons-nous des arguments fallacieux nous intimider, à mesure que le jour de la votation approche ? Deux livres ont d’ores et déjà été publiés pour dénigrer l’impôt successoral. Lorsqu’il s’agit de nos richesses, nous succombons trop souvent à la panique. Quant à nous, Chrétiens, serons-nous prêts à chercher d’abord « le royaume de Dieu et Sa justice » plutôt que de suivre la logique financière et nous abandonner à nos craintes ?
Voici les arguments les plus fréquemment invoqués contre l’impôt successoral, ainsi que nos réponses.
« Les impôts ne cessent d’augmenter. »
Voici les résultats d’une étude publiée par l’administration fiscale fédérale en 2004 : entre 1990 et 2001, les taxes et les impôts des 20 % des ménages les plus riches ont baissé de 4300 francs par an, tandis que pour les 20 pourcents les plus pauvres, ils ont augmentés de 650 francs… Cela s’explique par le fait que, globalement, les impôts ont baissé, tandis que les cotisations sociales (AVS/AI), les émoluments et autres taxes liés aux prestations ont stagné voire augmenté. Aujourd’hui, nous sommes, de fait, soumis au régime de la « flat tax », à savoir une imposition sans progression.
« L’impôt successoral nous plume tous. »
L’impôt successoral ne touche que 2 à 3 pourcents de toutes les successions en Suisse, en raison de la franchise qui exempte toutes les fortunes nettes (donc après déduction des dettes, hypothèques et emprunts) en deçà de 2 millions de francs. Grâce à cette franchise prévue par l’initiative, environ 97 % de tous les héritages sont exemptés de l’impôt.
« Arrêtons de plumer toujours plus les riches ! »
Le contraire est vrai. Ce sont les classes les moins bien loties qui passent toujours plus à la caisse, alors que, dans le même temps, les revenus élevés n’ont cessé d’augmenter. Après paiement des impôts – même progressifs –, il leur reste toujours plus d’argent. Malgré notre fiscalité progressive, la charge fiscale des riches n’augmente donc plus.
« L’impôt successoral est le fruit de la jalousie et contrevient donc au dixième commandement ! »
La concentration accrue des fortunes crée des problèmes toujours plus grands. C’est pour cela que l’Ancien Testament prévoit, dans le cadre du Jubilé, que tous les 50 ans, la propriété foncière retourne aux sans-terre. L’impôt successoral représente une réponse moderne à la même problématique.
« Ce sont les riches qui paient déjà le plus d’impôts ! »
Cette affirmation en dit plus long sur le clivage croissant entre hauts et bas revenus que sur une imposition prétendument injuste.
« Les riches quittent le pays si nous introduisons l’impôt successoral ! »
Même avec un impôt successoral, les riches ont assez d’avantages pour rester en Suisse. D’ailleurs, les impôts sur les successions sont souvent plus élevés à l’étranger.
« Il n’est pas juste d’imposer les successions, car la richesse est une bénédiction de Dieu ! »
Certes, l’Ancien Testament présente la richesse souvent (pas toujours) comme une bénédiction de Dieu. Cependant, il convient de considérer que Dieu bénit afin que nous puissions être une bénédiction (voir Abraham dans Exode 12.2). N’oublions pas que Dieu a justement introduit le Jubilé (cf. ci-dessus) et que la Bible parle à de nombreuses reprises de la nécessité de redistribuer les richesses.
« Dieu veut que l’argent reste dans la famille ! »
Jésus n’a pas fondé son ministère sur le clan. Au contraire, il a plutôt pris ses distances par rapport aux exigences de sa famille. L’accumulation des grandes fortunes familiales crée les problèmes susmentionnés et justifie, de loin, la redistribution telle que voulue par l’initiative pour l’impôt successoral et pour l’AVS.
« La famille est plus importante que tout ! »
S’il s’agit de soutenir les familles, il faut les rendre viables, ce qui implique un soutien actif aux moins favorisées d’entre elles. Or, pour cela, les cantons ont besoin de ressources. Aujourd’hui, ces derniers ont plutôt tendance à diminuer ce genre d’aides (subsides aux assurances-maladie, etc.) ! L’impôt successoral palliera ce manque d’une manière efficace.
« La succession assure l’avenir économique des enfants ! »
A partir de 2020, en raison du vieillissement démographique, seul un tiers de toutes les successions ira à des descendants âgés de moins de 50 ans. Par ailleurs, l’initiative prévoit de ponctionner uniquement des héritages très élevés. On ne saurait prétendre que les héritiers d’une personne léguant plus de 2 millions de francs ont à craindre pour leur survie…
« Les successions ont déjà été imposées en tant que revenus et fortunes ! »
L’argument de la double imposition n’est pas pertinent. L’argent en circulation est toujours imposé à plusieurs reprises : d’abord en tant que salaire, ensuite lors des achats (TVA), puis en tant que bénéfice du magasin, etc.
De plus, les grandes fortunes ne sont pas juste le fruit de revenus, mais aussi d’héritages antérieurs, de l’augmentation des prix immobiliers, des gains sur les capitaux et sur les spéculations (tous deux exemptés d’impôts).
Une succession est obtenue sans contre-prestation. Dès lors, il paraît entièrement justifié de l’imposer.
Par ailleurs, les impôts sur la fortune sont en général très bas !
« L’impôt successoral menace les PME et les exploitations agricoles, il détruit l’emploi ! »
Le texte de l’initiative est clair : « Lorsque des entreprises ou des exploitations agricoles font partie du legs ou de la donation et qu’elles sont reprises pour au moins dix ans par les héritiers ou les donataires, des réductions particulières s’appliquent pour l’imposition afin de ne pas mettre en danger leur existence et de préserver les emplois. »
En cas d’acceptation de l’initiative, le Parlement, à majorité de droite, prendra bien soin de décharger les entreprises familiales, en octroyant un rabais d’impôt (p.ex. 5 % au lieu de 20 %) et une franchise plus élevée (p.ex. CHF 50 mios). Par ailleurs, les sciences économiques nous apprennent que la redistribution des richesses est un facteur créateur d’emplois. En effet, lorsque les pauvres reçoivent plus d’argent, ils le dépensent tout de suite pour couvrir leurs besoins les plus urgents, tandis que les riches auraient tendance à le mettre de côté…
« L’État n’a pas besoin de toujours plus de recettes ! »
L’État, c’est qui ? C’est nous !
Par ailleurs, les finances publiques ont déjà subi un régime minceur sans concession, si bien que les économies se sont désormais au détriment de services essentiels, à commencer par la santé et l’éducation.
« Chacun est en mesure d’économiser pour ses vieux jours ! »
Malheureusement, ceci ne correspond pas à la réalité. Si quelqu’un gagne 3000 francs par mois, il n’a pas beaucoup de marge pour épargner.
« Les vieux sont plus riches aujourd’hui qu’avant ! »
Ceci est vrai si on regarde les moyennes. Mais celles-ci sont faussées par le nombre accru de seniors super-riches. En effet, certaines familles ont accumulé des fortunes gigantesques. L’impôt successoral permettrait un rééquilibrage bienvenu.
« C’est enlever l’autorité fiscale aux cantons ! »
La concurrence fiscale entre cantons a provoqué une course aux baisses d’impôts, et fait d’importants dégâts. L’impôt successoral représente une opportunité d’avancer ensemble, ce qui profite à tous !