~ 3 min

Réflexions sur la Journée du Chouf-nüt 2011 lors de la liturgie pour « la vie simple » à la Heiliggeistkirche de Berne.

« Car mon peuple commet un double péché : M’abandonnant, la fontaine vivante, ils se fabriquent des citernes, qui sont pourtant fissurées, et ne donnent pas d’eau ». Jérémie 2:13

Nous ne sommes pas autosuffisants

Se contenter de propager l’idée de « ne plus rien acheter » n’est pas la solution, après tout, nous ne sommes plus autosuffisants.

Aujourd’hui, nous ne protestons donc pas contre la consommation en soi, non, nous appelons à une consommation raisonnable. Une consommation dans laquelle les producteurs, les intermédiaires et les consommateurs tirent profit sans nuire à leurs semblables et à l’environnement.

Une consommation qui permet aux producteurs de produire dans des conditions humaines et pour un salaire équitable, aux intermédiaires de gagner une marge appropriée et aux consommateurs de recevoir un produit de qualité dont ils ont réellement besoin – même si ce produit n’est « que » pour le plaisir.

Nous n’avons plus vraiment besoin d’en parler, nous devons juste vivre avec. Et c’est là, bien sûr, que les défis commencent vraiment.

D’une part, il y a les problèmes très pratiques : Comment puis-je vivre de manière juste ? Où puis-je trouver des produits équitables ? Et qui peut me garantir que le producteur, les intermédiaires, l’environnement et moi-même, en tant que consommateur, en profiteront réellement à long terme ?

Les problèmes de notre cœur

D’un autre côté – et c’est encore plus grave – il y a les problèmes de notre cœur : nous avons toujours peur de ne pas être à la hauteur : « Je voudrais bien aider, mais je dois d’abord prendre soin de moi et de ma famille ». « J’ai déjà beaucoup d’argent, mais quand je prendrai ma retraite, l’AVS et les fonds de pension existeront-ils encore à ce moment-là ? « Une fois que les Chinois commenceront à recevoir un salaire équitable, je pense qu’ils voudront tous conduire des voitures aussi… »

Nous passons notre vie à couvrir nos paris afin que nous et nos proches soyons suffisamment en sécurité. Ensuite, s’il reste du temps et de l’énergie, nous pourrons peut-être encore nous occuper des « pauvres » et de la consommation juste et raisonnable.

Le réservoir de stockage

Ce mode de vie peut être bien illustré par une image : Nous vivons notre vie à partir d’un réservoir de stockage. Et dans ce réservoir, nous essayons de stocker ce dont nous pensons avoir besoin pour notre vie : L’argent, l’amour, le temps et d’autres choses.

Ce faisant, nos vies dégénèrent en gestion de stocks : ai-je besoin d’un réservoir encore plus grand – après tout, mon voisin en a acheté un nouveau aussi ? Comment faire pour que mon réservoir reste plein ? Ai-je besoin d’une révision du réservoir ? Ne devrais-je pas assurer le contenu de mon réservoir ? Ne devrais-je pas ajouter un agent de conservation dans mon réservoir pour que le contenu reste frais plus longtemps ?

Et c’est dans cette gestion des stocks que Jésus-Christ s’offre comme une alternative très contrastée : Il se compare sans cesse à une source bouillonnante, une fontaine sans fin d' »eau vive ».

C’est un point de vue absolument révolutionnaire. Une source bouillonnante n’a besoin ni de réservoir, ni de conservation, ni de gestion des stocks.

Le printemps vivant

Une histoire vaguement racontée de Jean 4:7-14 : Une femme vient à son réservoir pour y puiser de l’eau. Jésus lui demande : « Donne-moi quelque chose à boire ! » Mais la femme est confuse. Jésus lui répond : « Si tu savais ce que Dieu veut te donner et qui est ici pour te demander de l’eau, tu me demanderais l’eau dont tu as vraiment besoin pour vivre. Et je vous le donnerais ». Mais la femme est toujours sceptique. Jésus répond : « Celui qui boit cette eau aura bientôt soif à nouveau. Mais celui qui boira de l’eau que je lui donnerai n’aura plus jamais soif. Cette eau devient en lui une source qui ne tarira pas, même pour l’éternité ».

Ainsi, si nous voulons vivre dans la justice et consommer avec sagesse, nous devons avant tout trouver la source et nous tourner vers elle – ou plutôt, vers Lui. Si nous vivons à la source, alors nous n’avons pas besoin de faire des stocks et nous n’avons pas à craindre d’être à court. Nous pouvons vivre dans l’abondance et donner généreusement.

~ 13 min

Sous ce titre provocateur, j’aimerais mettre en évidence la séduction qu’exercent les idées de la droite conservatrice et nationale sur une partie des chrétiens en particulier évangéliques. J’aimerais montrer comment ces idées qui semblent bibliquement acceptables contredisent en fait la bible. Je tenterai d’expliquer comment ces idées essayent de coloniser l’enseignement biblique et les Églises. Ce thème est tout à fait d’actualité car Jean-Marie Le Pen s’est souvent montré à l’Église et Christophe Blocher invoque le nom de Dieu dans certaines de ses déclarations1

 

Comment définir et identifier les idées de la droite conservatrice et nationale ?

Il est évidemment difficile de répondre de façon exhaustive à la question dans ce texte car la droite conservatrice et nationale est une frange très large et complexe du champ politique et comporte en son sein diverses tendances et mouvements parfois même en conflit entre eux. Je me baserai pour cette réflexion sur la droite conservatrice et nationale actuelle en particulier sur les discours et idées qu’on trouve dans une frange de l’UDC ou du Front National en France. Je tenterai de définir quelques idées que je confronterai directement aux textes bibliques en montrant comment ils semblent faussement dans la ligne de la Bible.

Xénophobie, chauvinisme et décadence nationale

La première idée que l’on retrouve dans la droite conservatrice et nationale est l’importance de la nation2 qui mène souvent au racisme, à la xénophobie et à l’antisémitisme. Cette idée séduit certains chrétiens, car ils peuvent penser que les étrangers venant en Suisse ont d’autres religions ou valeurs, ce qui déchristianiserait automatiquement la Suisse (ou la France). Cela abonderait dans le sens de beaucoup de textes l’ancien testament demandant aux Israélites de se séparer3 des peuples païens vaincus afin de ne pas se laisser « contaminer » par leurs pratiques religieuses différentes. De même, nous pourrions prendre des versets de 2. Corinthiens4 « ne formez pas avec les incroyants un attelage disparate… » etc. A tout cela est lié aussi le thème de la décadence nationale soi-disant due à la pénétration de personnes ethniquement différentes qui aurait pour conséquence de changer l’identité de la nation ce provoquerait sa disparition5.

 

A tout cela, il faut tout d’abord dénoncer une très grande hypocrisie car selon cette thèse, tout le mal proviendrait uniquement de l’extérieur comme si le simple croyant ou l’Église n’en était nullement responsable. Pourtant, Jésus, dans un de ses enseignements qui a heurté les pharisiens, a affirmé que ce qui souille l’Homme provient de l’intérieur, en particulier du cœur6. On ne peut donc pas dire que ce sont simplement des choses provenant de l’extérieur qui peuvent détruire la foi ou déchristianiser une nation. En effet, le chrétien doit reconnaître ses propres erreurs et péchés et pas seulement accuser le monde extérieur d’en être coupable. Cette thèse d’extrême droite cache aussi l’arrogance de penser que sa nation est meilleure que les autres et que tous les maux proviennent uniquement de l’extérieur. Cela empêche de se remettre fondamentalement en question et donne une image naïve et féerique d’une Suisse originellement pure et sans péché, ce qui est anti-biblique, « car tous ont péché et privés de la gloire de Dieu »7. C’est vrai qu’il y a déchristianisation de la société occidentale, mais peut-on en accuser exclusivement les influences provenant de l’extérieur ? Comment de plus affirmer une supériorité morale d’une ethnie ou d’une nation à la lumière de ces textes de la Bible ? Il est vrai que notre pays a reçu la grâce de Dieu à travers le libre accès à la Bible ou l’œuvre de Réformateurs (avec des pages sombres, je l’admets), mais nous ne l’avons nullement mérité par nos propres œuvres.

Pour ce qui est de la thèse d’une soi-disant décadence, il faudrait distinguer entre une décadence de type spirituel comme le fait de s’éloigner de Dieu ou d’aller contre les valeurs judéo-chrétiennes et l’idée de décadence dont parle la droite conservatrice et nationale. Le premier phénomène existe. On peut l’illustrer par le fait que dans l’ancien testament, les israélites s’éloignent de la loi et vivent de façon dissolue, avec encore une montée de la violence, de la corruption, de l’oppression sociale, 8etc. En revanche, la droite conservatrice et nationale parle de la décadence de la nation due selon elle aux étrangers, francs-maçons, etc. Elle idolâtre la nation, alors que les prophètes de l’ancien testament ne sont pas xénophobes, mais dénoncent les violations de la Loi par les israélites. La décadence nationale dont parle la droite conservatrice et nationale n’a donc rien avoir avec l’éloignement de Dieu de son peuple. Comme précédemment, il y a ici une hypocrisie à dénoncer, car il est simpliste de dire que tous les maux de la société viennent de l’extérieur et en particulier des étrangers et de la mondialisation. Le fait de choisir de suivre Dieu ou non, dépend finalement de nous-mêmes et non pas exclusivement d’une influence extérieure. Finalement, je ne trouve rien dans la Bible qui demande absolument de sauvegarder l’unité nationale et de lutter contre de prétendues influences étrangères néfastes. Il ne faut donc pas confondre le patriotisme avec la fidélité à Dieu. D’ailleurs ce n’est pas l’unité nationale qui sauve ou qui permette de maintenir la l’unité du pays, mais plutôt les enseignements de la Bible concernant l’amour du prochain, la solidarité, etc. qui contribuent à maintenir le lien social.

L’autoritarisme

Une valeur revenant souvent dans les discours de la droite conservatrice et nationale est l’autoritarisme. L’idée est qu’il faut un régime fort pour protéger la collectivité contre les agressions extérieures ou pour plus de sécurité au niveau intérieur. Il y a ici une sorte de fascination ou d’idolâtrie du chef9 sensé assurer l’unité de la nation et lui donner une direction claire. Cela a souvent pour conséquence le rejet du système politique actuel et le désir de changer les institutions au niveau fondamental. Dans l’extrême droite, on considère que la démocratie est une forme d’anarchie qui dissout la nation dans l’individualisme. Dans le cas des mouvements de la droite nationale actuels, on pourrait citer comme exemple l’insistance constante de l’UDC de se référer au peuple comme ultime instance de décision en stigmatisant systématiquement la classe politique. Ce qui a l’air en apparence innocent s’oppose de fait à la séparation fondamentale des trois pouvoirs (exécutif, judiciaire et législatif) ainsi de la constitution et des droits fondamentaux qui devraient garantir les droits individuels face au collectif. C’est une sorte d’idolâtrie des droits populaires10. La base de la démocratie suisse implique le pluralisme, la séparation des pouvoirs et non un système où les votations populaires seraient érigée en dogme absolu et accumulerait tous les pouvoirs.

 

Il est vrai que le système démocratique doit être critiqué, notamment pour qu’il puisse s’améliorer. Une majorité de citoyens pourrait dicter aux autres leurs conditions, ce que redoutait déjà Tocqueville11. Néanmoins, je n’ai jamais vu dans la Bible des passages demandant aux Israélites d’avoir un régime autoritaire ou conseillant aux Chrétiens de déléguer tout leur pouvoir à un leader charismatique ou un conseil restreint ressemblant à un politburo « à la soviétique ». Dans l’ancien testament, Dieu condamne d’ailleurs l’attitude des Israélites voulant un roi comme les autres nations12 et les sauve par des leaders charismatiques choisis pour un temps seulement13. Dans le nouveau testament, Jésus se présente à ces disciples comme celui qui les sert et non comme quelqu’un d’autoritaire qui les écrase14. Cet autoritarisme mène aussi à un idolâtre du chef, ce que par là- même Dieu condamne, quand il dit que les Israélites le rejettent en voulant un roi. Nous voyons donc que l’autoritarisme prôné par l’extrême droite contredit la bible et ouvre la porte à l’idolâtrie du chef. Remarquons encore l’aspect purement matérialiste de l’autoritarisme. L’extrême droite fait confiance à un homme, alors que la Bible nous demande de faire confiance à Dieu et d’avoir une relation personnelle avec lui.

Glorification et nostalgie du passé

Un autre grand mythe de la droite nationale et conservatrice consiste à dire que le passé était globalement meilleur et que nous vivons à l’heure actuelle une sorte de décadence nationale due par exemple aux juifs, aux musulmans, à l’afflux d’immigrés ou à la jeunesse consommant de plus en plus de drogues et s’habillant de façon de plus en plus frivole. Cette glorification du passé pourrait tout à fait faussement trouver des fondements bibliques. En lisant de façon simpliste l’apocalypse, le chrétien pourrait être porté à croire que la fin du monde est proche et que celui-ci est entièrement aux mains du Diable, ce qui donne une image extrêmement pessimiste et sombre pour l’avenir. Cela amène une vision très simpliste où le passé semblerait meilleur à cause de ces prévisions apocalyptiques.

 

La glorification du passé est pourtant erronée pour plusieurs raisons. La première est que les œuvres de l’Église ayant permis une amélioration de l’avenir sont complètement négligées. Peut-on mettre dans les poubelles de l’histoire la fondation de la Croix- Rouge, l’Armée du Salut ainsi que toutes les œuvres de Calvin, Luther, Saint- Augustin, Thomas d’Aquin, etc. Ces personnes et événements ont pourtant permis des progrès sociaux et spirituels notables dont nous récoltons les fruits encore aujourd’hui. Voudrait-on glorifier le passé comme le Moyen- Age où l’illettrisme empêchait de lire la bible ? Pourquoi glorifier les années 60’ ou 50’ en pensant qu’elles étaient soi-disant meilleures car il n’avait pas de punks ou de fumeurs de joints ? Je ne pense pas que les textes de la bible nous invitent à la nostalgie d’un passé perdu imaginaire, mais plutôt à construire le royaume de Dieu et la préparer la seconde venue du Christ15. Remarquons d’ailleurs que retourner au jardin d’Eden n’est pas la finalité de l’Apocalypse. En revanche, on y parle d’une ville avec des habitants et Dieu en leur milieu16. La glorification et la nostalgie du passé ne peuvent donc pas être considérées comme une valeur biblique. Nous ne devrions donc pas être attirés par elle. Le chrétien nostalgique du passé est dominé par le pessimisme, et vit dans la peur de l’avenir, alors qu’il devrait reconnaître la toute puissance et la souveraineté de Dieu, malgré les difficultés actuelles17.

Croyance en un complot central mondial visant à contrôler le monde

Cet élément est souvent présent dans les discours de la droite conservatrice et nationale. Certains pensent qu’il s’agit des juifs qui contrôleraient les rouages du pouvoir ou de l’économie. D’autres pensent qu’il s’agit des francs-maçons. Cela se traduit souvent par un discours anti-establishment en disant que les politiciens sont tous pourris et tous les mêmes avec l’idée qu’ils se connaissent tous entre eux et prennent leurs décisions sur le dos du peuple. Cette idée de centralité et d’universalité d’un complot peut tout à fait correspondre à l’image que nous pouvons avoir du diable. Cela ouvre la question présente dans le nouveau testament de savoir qui est l’antéchrist.

Malgré d’apparentes similitudes, il n’est pourtant pas possible de mettre sur le même plan l’action de Satan décrite dans la bible et l’idée d’un complot universel et anti-national qu’affirme la droite conservatrice et nationale. En effet, en regardant la bible et l’histoire, notamment la question de la signification du chiffre de la bête (666), nous constatons que l’antéchrist a été l’empereur romain Néron, l’Église catholique, voire même ironiquement la Migros qui « ruinait » les épiciers des années 30 et 40 en Suisse comme ce que disaient certains à cette époque. Deuxièmement, Satan attaque aussi l’individu et les Églises, et son action ne se réduit pas seulement au plan politique ou institutionnel.

La deuxième objection est qu’il est réducteur d’avoir une vision aussi simpliste de la politique et des politiciens. S’il y avait un complot de cette taille, il n’y aurait plus alors de conflits politiques ou de divisions dans l’élite politique.

 

La troisième objection à cette vision est qu’elle oublie le rôle de Dieu en particulier sa souveraineté face à Satan. Ce dernier est toujours soumis à Jésus. Cette vision est donc à nouveau simpliste et toute humaine, car c’est nous avons à faire à une lutte entre humains et réduite à un niveau politique. D’ailleurs, il faut se demander où est la dimension spirituelle, de repentance, etc. En effet, le combat spirituel contre le mal ne doit pas seulement être tourné vers des ennemis physiques extérieurs, mais demande aussi une réflexion et un travail sur soi, par la sanctification et la remise en question de ses propres comportements et valeurs face à Dieu. Finalement, être tout le temps concentré sur un complot « satanico-politique » empêche de se rendre compte de la souveraineté de Dieu et du progrès de l’évangile dans nos vies et dans le monde qui nous entoure. Je ne pense pas qu’il soit biblique de se lever chaque matin avec l’obsession d’un complot universel à combattre. Il serait beaucoup plus sain de chercher Dieu, s’ouvrir à Lui et voir ses œuvres et reconnaître sa souveraineté pour en recevoir un encouragement.

Conclusion

Nous voyons donc à travers les constats ci-dessous que les affirmations principales et les fondements de la droite conservatrice et nationale entrent en contradiction flagrante avec les enseignements des textes de la Bible. Cette discussion montre tout d’abord la différence de fondement entre les idéologies de cette droite et la bible. La bible a pour fondement Dieu et demande que l’on se rapproche de lui, alors que la droite conservatrice et nationale se fonde sur la nation et le groupe ethnique. C’est de là que tout commence à diverger. La droite conservatrice et nationale fait l’apologie de l’autorité et de l’obéissance, alors que Dieu se présente comme un Dieu juste et qui fait grâce. Il y a certes des aspects « terribles » comme la punition des israélites dans l’Ancien Testament, mais il est difficile de réduire cela à de l’autoritarisme pur. Pour ce qui est du passé, la mécanique est inverse, car Dieu agit pour l’avenir. Rappelons ici que les prophètes prédisent l’avenir du peuple d’Israël et la venue du Christ, alors que la droite nationale et conservatrice tire son fondement des mythes du passé. L’approche est donc complètement différente. Finalement, l’obsession du complot contredit la théologie du Dieu souverain malgré les circonstances difficiles de son peuple. Ce dernier point met en évidence la nature réelle de la droite nationale et conservatrice : elle reste matérielle en ne considérant que l’humain, ce qui exclut le Dieu de la bible.

Bibliographie

CHEVALLIER, J-J. (1970), Les grandes œuvres politiques de Machiavel à nos jours, Paris, Armand Colin, pp. 217-234.

ROBERTSON, D. (1985) Dictionnary of politics, Hammondsworth, Middlesex, England, Penguin books ltd.

 

Thomas Tichy, 17 janvier 2005

 


1. Le lien entre le Front National et l’UDC n’est pas forcément évident. Pourtant, leurs thèmes de compagne sont similaires : immigration, insécurité, contestation du système et de « l’establishment » politique, valeurs traditionnelles, etc. A la fin des années 80, le mouvement Vigilance à Genève a essayé (en vain) d’inviter J-M Le Pen à Genève et certains de ces membres sont allés aux fêtes annuelles du FN. Ces mêmes personnes dirigent aujourd’hui la section UDC de Genève (source : Les dossiers du Canard, pp. 96-97, mars 1990). Le FN, dans un communiqué de presse officiel (22 oct. 2003), se félicite de la percée de l’UDC aux dernières élections fédérales (http://www.frontnational.com/quotidien_detail.php?id_qp=101&art=1). Le site du FN contient une liste de liens dont l’UDC fait partie.

 

2. Historiquement, on considère que le nationalisme émerge avec la révolution française. La gauche de l’époque rejette la noblesse et l’inégalité des classes pour dire, en gros, que tous les français sont égaux et frères (fraternité). Avec l’évolution sociale, la bourgeoisie ayant pris le pouvoir lors de la révolution, une nouvelle opposition demande que tous les Hommes soient frères. C’est ainsi que la gauche de l’époque glisse dans l’internationalisme en demandant une fraternité dépassant les frontières de la France. Le nationalisme passe donc de la gauche à la droite ce qui est encore à peu près le cas aujourd’hui. Une illustration de ceci peut être l’affaire Dreyfus où le nationalisme est passé de gauche à droite.

3. Esdr. 10: 2-11; Né. 13: 23-31. Lv. 20: 23-26.

4. 2. Co. 6: 14.

5. Les 2 textes de base du programme de l’UDC sont intéressants à évoquer pour illustrer mes propos : http://www.svp.ch/file/Plattform_franz.pdf. p. 40, l’introduction suggère que la proportion élevée (plus que chez nos voisins) est globalement négative (abus du droit d’asile, criminalité, etc.). Autre exemple :

Prendre soin du droit de citoyenneté (Juillet 2001)http://www.svp.ch/file/f2001.01Integrationspapier.doc

6. Marc 7:18. Il (Jésus) leur dit: Vous aussi, êtes-vous donc sans intelligence? Ne comprenez-vous pas que rien de ce qui du dehors entre dans l’homme ne peut le souiller?

7. Rm. 3: 23.

8. Am. 2: 6-16; Mi. 6: 9- 7: 6. Os. 4: 1-14.

9. On parle aussi du „Führerprinzip“ comme modèle d’organisation des partis d’extrême droite. L’idée de « Führerprinzip » ou sous sa forme atténuée de leader charismatique pourrait se retrouver dans n’importe quel parti ou mouvement dans lequel le président où le comité central ne sont jamais critiqués publiquement, où les désaccords sont considérés comme une trahison et où finalement tout est uniforme. Notons que ce type de phénomène se retrouve aussi à gauche avec le concept du « centralisme démocratique ».

10. L’UDC demande par exemple que les naturalisations se fassent par vote populaire, un peu comme si le peuple était infaillible, en affichant un mépris pour les procédures administratives. Celles-ci, quoique imparfaites, garantissent par exemple l’égalité de traitement et sont beaucoup plus prévisibles.

http://www.udc.ch/index.html?&page_id=1176&node=67&level=1&l=3

Rappelons encore ici que cette approche était l’apanage des penseurs de l’extrême -droite française comme Charles Maurras (1868-1952) ou du constitutionaliste allemand Karl Schmitt (1888-1985) impliqués par la suite dans la collaboration ou le nazisme. http://en.wikipedia.org/wiki/Carl_Schmitt

11. ROBERTSON, D. (1985) Dictionnary of politics, Hammondsworth, Middlesex, England, Penguin books ltd pp. 78-79.

12. 1. S. 8: 7.

13.  V. livre des Juges ex: Jg. 4.

14. Luc 22: 24-27: 24 Il s’éleva aussi parmi les apôtres une contestation: lequel d’entre eux devait être estimé le plus grand?25 Jésus leur dit: Les rois des nations les maîtrisent, et ceux qui les dominent sont appelés bienfaiteurs.26 Qu’il n’en soit pas de même pour vous. Mais que le plus grand parmi vous soit comme le plus petit, et celui qui gouverne comme celui qui sert.27 Car quel est le plus grand, celui qui est à table, ou celui qui sert? N’est-ce pas celui qui est à table? Et moi, cependant, je suis au milieu de vous comme celui qui sert.

15. Mt. 6: 33-34. 2 Pi. 3: 12.

16. Ap. 21: 1-2.

17. 1. Pi. 1: 6-7. Et 1. Pi. 5: 9-11.

Photo by Sam Carter on Unsplash

~ 22 min

Exposé donné par Claude Baecher (Dr théol., CEFOR Bienenberg) lors de la ConférenceChristNet 2010 « Gouverner par la peur ou par l’espérance ? ».

 

0. Une apocalypse sans Dieu ?

Rendus anxieux par les événements du 11 septembre 2001 et le krach boursier de ces dernières années, nous baignons dans une atmosphère de peur. Cette croyance en une sorte d’apocalypse sans Dieu, qui oriente fortement les occidentaux vers un repli sur eux-mêmes, les pousse à la recherche presque panique de leur propre sécurité. Cette illusion peut temporairement donner l’impression que nous avons empêché le mal de s’introduire, mais à moyen terme, elle est contre productive par rapport au projet de Dieu. C’est ce que nous tâcherons d’illustrer dans les lignes qui suivent.

Les peurs ont en nous et dans nos sociétés des racines profondes, complexes et anciennes. Ces peurs sont liées à la recherche légitime de la sécurité. La réflexion relative aux influences de la peur et de l’espérance sur les comportements est un sujet très important. Ce thème est souvent abordé dans la Bible, et néanmoins très peu analysé sur le plan du comportement social dans les cercles chrétiens. Je tâcherai d’en livrer ici les éléments bibliques capitaux.

Les pathologies liées aux peurs et aux espérances sont traitées de manière complémentaire par les thérapeutes et les psychiatres, que je salue au passage, mais également par les personnes qui gèrent les rapports économiques et sociaux dans le monde moderne, sans oublier les nombreux travailleurs sociaux, que je salue également.

Je choisis dans la grande perspective biblique de retenir trois moments théologiques capitaux de la révélation biblique pour montrer à la fois la cohérence de la pensée biblique et pour montrer les axes forts qui s’en dégagent :

1. Eden : la toute vieille histoire de l’émergence de la peur

Avant la révolte humaine contre le plan divin, nous pouvions jouir de tous les biens de la création, en toute sécurité, et avoir de bons rapports entre humains, à l’image de ce qui se passe en Dieu lui-même. Nous sommes fondamentalement faits pour la communion sous le regard du Dieu bienveillant1.

Pour la première fois, des êtres humains rencontrent la peur, peur qui consiste à se cacher et à devenir des étrangers les uns par rapport aux autres et par rapport au créateur. L’origine de ces peurs réside dans le fait que des créatures voulurent être « comme dieu » (Gen. 3:5). Même si la différence entre être « à l’image de Dieu », ce qui traduit notre identité initiale, et « comme Dieu », ne nous semble à priori pas grande, ce qui les différencie, c’est, dans le deuxième cas, l’opposition à Dieu, la prétention à être « comme Dieu », autonomes. Depuis lors, nous inclinons toujours à devenir « comme dieu », pensant ne pas devoir rendre compte ni à Dieu ni à autrui, et imaginant que nous sommes auto-générés. L’anxiété est née de la mise en doute de la providence divine.

La révolte par rapport au plan originel a ouvert la porte à la culture de la peur et de l’insécurité relationnelle : « L’homme et la femme se cachèrent devant le Seigneur Dieu… J’ai pris peur car j’étais nu, et je me suis caché » (Genèse 3:10 et 11).

C’est lors de cet énorme changement que des humains connurent pour la première fois, selon le récit biblique, ce sentiment qu’est la peur, l’insécurité, le trouble relationnel et qu’ils usèrent de dissimulation2. Nous vivons depuis lors avec la vérité pas facile à gérer du tout que nous ne pouvons pas accomplir nos aspirations à la divinité, mais au contraire que nous sommes des êtres finis, voués à la mort.

Vouloir s’en sortir tout seul est un réflexe acquis dont on ne se débarrasse pas facilement. L’homme moderne vivant dans l’ère post-chrétienne, lui aussi, poursuit cette fuite en avant. Ainsi, nous vivons dans un climat de peur et d’anxiété, car l’homme est devenu un loup pour l’homme, un prédateur. Ce sentiment est d’autant plus fort qu’il a été attisé par des événements traumatisants qui ont rendu cet homme moderne victime du regard de convoitise des autres sur son corps et sur ses biens.

La culture de la peur, en fait, nous mène par le bout du nez plus fortement que nous ne le pensons. C’est la peur de manquer qui fait courir les gens, la « maladie de la réserve » comme l’appelait Isabelle Rivière. Le monde court sans qu’il se pose fondamentalement la question de savoir après quoi il court et qui le rendrait collectivement heureux.

C’est à partir de ce changement de statut que les humains ont tendance à placer leur sécurité dans la dissimulation, l’autonomie, les murs, les protections et les armes pour défendre les biens particuliers. La crise économique récente souligne que les pauvres qui ne sont pas responsables de cette crise, en sont les principales victimes. Des millions de personnes sont tombées dans la pauvreté à cause d’elle, sans compter les réductions de budgets sociaux à venir.

S’interroger sur le thème de la sécurité dans la Bible, c’est au fond s’intéresser à ce qui fonde la vraie sécurité et à ce qui nous anime, nous motive et souvent, nous détermine. « La culture de la peur, souligne Scott Bader-Saye, promeut l’idée que l’accumulation des richesses est la réponse raisonnable dans des temps troublés – ou de bouleversements »3.

L’aspiration à devenir invulnérable semble constante, mais elle a plus ou moins d’impact selon les législations en vigueur… Construire des murs est à la mode de nos jours, des murs pour pallier le sentiment d’insécurité, un peu partout dans le monde, et pour nous mettre à l’abri du prochain et de ses possibles sombres desseins. On est aux antipodes du projet d’Eglise qui, en cassant les murs de séparation, cherchait la réconciliation entre les races, les langues, les sexes, les statuts sociaux. Et plus les murs sont élevés, moins le regard sur l’autre est objectif. Moins on le connaît, plus on le diabolise et plus on a l’illusion d’être en sécurité. La Bible déjà révèle que l’escalade de l’insécurité et des mesures sécuritaires (coffres, paradis fiscaux, murs, miradors, niches, réserves démesurées) mène à l’isolement, et non à la réconciliation ou a une vie plus fraternelle. Nous le verrons avec le message des prophètes.

De diverses façons, Dieu intervient, dans sa providence, pour limiter le mal et empêcher l’autodestruction. C’est ce que nous appelons la providence divine. Dieu pourvoit de la sorte en permettant que des autorités humaines promulguent des lois allant dans le sens de pratiques plus solidaires. Dans nos pays, inspirés par la Bible plus que nous le croyons généralement, elles ont pour rôle de limiter le pouvoir de prédation d’une personne sur une autre, de protéger la dignité de tous, de tendre vers l’équité et spécialement de protéger les faibles contre l’exploitation abusive.

Dans un monde où le mal est entré, il est important qu’il y ait des autorités qui réglementent cette équité, contre les exactions des puissants, les privilèges des seconds et la corruption des troisièmes, en somme contre les prédateurs. Devant Dieu, chaque être humain doit être traité avec équité devant le travail fourni, indépendamment de sa naissance. Nous en sommes loin. Nous constatons depuis longtemps que le marché ne produit pas automatiquement la justice. Il survalorise celui qui a beaucoup. A nous, l’Eglise de partout, de faire entendre le « cri du pauvre » et d’interpeller l’Etat dans le sens de plus de justice. Et ici aussi, il est bon de rappeler qu’il peut arriver que dans un pays, le juste puisse momentanément souffrir dans des temps « où le méchant prospère ».

2. Richesses et sécurités

Exode : dans le désert

Dieu est intervenu de façon spectaculaire pour libérer un peuple soumis à l’esclavage d’un tyran en Egypte. Il l’a fait miraculeusement, comme en proclamant une nouvelle création, en les éloignant extérieurement de l’esclavage des tyrans. Il faudra pourtant bien plus de temps pour les libérer des réflexes tyranniques cachés en eux-mêmes. C’est tout un apprentissage laborieux. Dieu a voulu et veut toujours avoir un peuple, sorte de « maison témoin » où il fait bon vivre, à la fois à cause d’une nouvelle mentalité et d’une nouvelle praxis, parmi les nations du monde.

Une fois bénéficiaires d’une terre nouvelle qu’ils n’ont pas achetée (Canaan), et qui fondamentalement appartient à Dieu, les Israélites voient resurgir la tentation originelle: s’éloigner d’une économie de communion pour retrouver une économie d’exploitation des faibles.

En guise d’illustration, je commenterai des passages choisis qui ont un rapport direct avec la peur et la confiance, au fond, avec la sécurité : l’un tiré du traité d’alliance (la loi), et l’autre des prophètes qui tentent de ramener à l’alliance le peuple égaré par de fausses sécurités. Les deux sont des avertissements en rapport avec les démarches « politiques » :

Moïse : la sécurité dépend de la justice

Deutéronome 8:2 et 10:11-20 [(L’éducation d’Israël au désert)4.

Après une mention concernant la manne donnée, les vêtements qui ne s’usaient pas et les pieds qui n’enflaient pas pendant ces quarante ans, Moïse parle de la nécessité d’obéir aux commandements économiques et sociaux notamment. Après l’entrée promise dans un pays très généreux, où le peuple ne manquera vraiment de rien, avant de poursuivre : v. 10 « Ainsi, tu jouiras de ces biens, tu mangeras à satiété, et tu béniras l’Éternel ton Dieu pour le bon pays qu’il t’aura donné ».

Moïse avertit ensuite du piège récurrent de l’autosuffisance, qui n’est qu’une arrogance aux racines très païennes et, au fond, génératrice d’insécurité.

V. 11 : « Garde-toi d’oublier l’Éternel, ton Dieu … 12 Si tu manges à satiété, si tu te construis de belles maisons et que tu y habites, 13 si ton gros et ton petit bétail se multiplient, si ton argent et ton or s’accumulent, si tous tes biens s’accroissent, 14 prends garde de ne pas céder à l’orgueil et d’oublier l’Éternel ton Dieu, qui t’a fait sortir d’Égypte, du pays où tu étais esclave…  17 Prends donc garde de ne pas te dire : « C’est par mes propres forces et ma puissance que j’ai acquis toutes ces richesses. » 18 Souviens-toi au contraire que c’est l’Éternel ton Dieu qui te donne la force de parvenir à la prospérité.

19 Mais si vous en venez à oublier l’Éternel votre Dieu… je vous avertis aujourd’hui que vous périrez totalement. 20 Vous périrez comme les nations que l’Éternel votre Dieu va faire périr devant vous, parce que vous ne lui aurez pas obéi ».

L’oubli fait qu’il n’y a plus personne à remercier que soi-même et ses propres calculs qui ont entraîné la prospérité. A court terme, l’être humain n’est alors plus redevable qu’à lui-même et à ses calculs de rentabilité maximale. Il se sert alors du prochain (plutôt que de le servir) et très vite il se trouve à la place du mini pharaon totalitaire dont il avait réchappé.

L’appel solennel de Moïse illustre très clairement par quels mécanismes l’abondance peut mener à la ruine, c’est-à-dire, à moyen terme déjà, aux antipodes de ce qui est recherché, à savoir la sécurité. « Si vous oubliez l’Eternel… vous périrez totalement » (v. 19). Cela ne signifie pas que Dieu, de manière surnaturelle, va faire tomber le feu du ciel en cas d’oubli du culte et du droit qui lui est attaché, comme ce fut le cas pour Sodome, mais plutôt quele processus de pourrissement économique sera à l’œuvre et aboutira à la ruine de toute la nation et du plan initial de Dieu par le moyen de cette génération-là.

La sécurité dépend de la justice pratiquée.

Tous les régimes économiques portent potentiellement cette propension à réduire le prochain à l’esclavage ; c’est également le cas du libéralisme économique actuel, si nous n’y veillons pas. Ce libéralisme a besoin d’une conscience. Le drame est que la sécurité a été mal interprétée par ceux qui avaient reçu les beaux dons de Dieu, simplement à cause de leurs schémas mentaux liés à la peur de perdre et de s’assurer leur sécurité.

Le peuple de Dieu ne devrait pas en arriver à dire : «  C’est par mes propres forces et ma puissance que j’ai acquis toute cette richesse » (v. 17). Cette affirmation rejoint tout à fait la prétention à être « comme dieu », autosuffisant. Elle est bien une prétention moderne. Pour ces « petits dieux » à qui tout est dû, la loi est faite pour être contournée…

Le remède préconisé est la gratitude envers Dieu, source de ma prospérité, et l’application d’une politique périodiquement redistributive (comprenant, de manière cumulée, les règles du Jubilé, les lois sabbatiques, les dîmes, les offrandes volontaires, l’accueil de l’immigrant, etc.).

Jérémie : des citernes fendues

Les prophètes vont dire et redire la même chose (Jérémie 2:1-13).

C’est une politique économique qui est en jeu dans l’attitude du territoire de Juda. Celui-ci, après avoir reçu le don du pays, est allé adorer le dieu Baal (dieu de la fécondité des puissants).

Ecoutez la complainte de Jérémie :

11 « Existe-t-il un peuple | qui ait changé de dieux ?
Et pourtant ces dieux-là | ne sont pas de vrais dieux !
Pourtant, mon peuple | a échangé celui qui fait sa gloire
contre ce qui ne sert à rien !
(…)
13 Car mon peuple a commis un double mal :
il m’a abandonné, | moi, la source d’eaux vives,
et il s’est creusé des citernes, | des citernes fendues
et qui ne retiennent pas l’eau ».

Des réserves qui ne retiennent rien du tout, c’est fondamentalement un calcul de la peur.

Le bénéfice, les biens n’ont pas été auto-générés, c’est essentiellement à cause de la providence divine et en vue d’une gestion plus fraternelle, qu’ils sont accordés. Même la réserve qu’a faite Joseph avant la sécheresse était faite pour une utilisation collective.

Esaïe : le shalom durable

La Bible dénonce les fausses sécurités arrogantes (Esaïe 32:1-20) et ceux qui s’y emploient seront jugés tôt ou tard. D’après Esaïe, la vraie sécurité, la vraie paix (shalom), l’authentique tranquillité sont également les effets de la justice et du droit, le bon traitement des ouvriers et des champs. Sans cela, les tours protectrices serviront de refuge aux animaux sauvages. Le lien entre infertilité du sol et irresponsabilité dans le domaine social est souligné.

Mais Esaïe fait un ajout que le Nouveau Testament aussi soulignera : le nouvel ordre des choses se fera par l’action de… l’Esprit. Lui introduira durablement la fertilité, sur la base de la justice et du droit ! Il y a alors assez pour tous (v. 16). La justice donne naissance à une sécurité durable (v. 17).

15 … « jusqu’à ce que, d’en haut, l’Esprit soit répandu sur nous.
Alors le désert deviendra un verger,
tandis que le verger aura la valeur d’une forêt.
16 Le droit habitera dans le désert
et dans le verger s’établira la justice.
17 Le fruit de la justice sera la paix :
la justice produira le calme et la sécurité pour toujours ».

Là où se trouve cet Esprit à l’œuvre, il n’y a pas besoin de lieux sécurisés comme les villes fortifiées et les forêts. Cela ne change rien à la situation de sécurité en général. Nul n’est coupé de l’accès à l’eau, les animaux nécessaires à la production agricole (le boeuf et l’âne) ne risquent pas d’être volés (v. 20). Les gens seront heureux.

18 « Mon peuple s’établira dans un domaine paisible,
dans des demeures sûres, tranquilles lieux de repos
19 – mais la forêt s’écroulera sous la grêle
et la ville tombera très bas ».

Jérémie : fausses sécurités religieuses

Mais Jérémie, pour en revenir à lui, ajoute une autre fausse espérance, c’est la confiance quasi magique dans la protection de Dieu. L’illusion que, tant qu’on a le temple (de Jérusalem), Dieu nous devait sa protection et garantirait notre invulnérabilité.

Jérémie 7 ajoute la fausse sécurité magique simplement parce qu’on serait plus proche du vrai culte :

Le prophète Jérémie, au chapitre 7, dénonce une autre fausse sécurité, et notamment la confiance dans « le temple ». Il s’agissait d’une conviction quasi magique qui donne le sentiment d’invulnérabilité. La critique du prophète Jérémie est déclenchée par l’injustice sociale et l’idolâtrie : « les immigrés, les veuves et les orphelins sont opprimés ; on met à mort des innocents dans le temple, on se prosterne devant des divinités étrangères » (v. 5s). Lorsque le Temple se transforme en « caverne de voleurs » (v. 11, cf. Mt 21:3), Dieu n’est plus magiquement protecteur. Et Jérémie précise : ce ne sont pas les formules liturgiques de confiances « c’est ici le temple de l’Eternel, le temple de l’Eternel, le temple de l’Eternel »(v. 4) qui changeront la donne, ou alors l’affirmation « nous sommes sauvés » (v. 10) qui y changeront quoi que ce soit. Tout cela est illusion, car il n’y a pas de conduite sociale qui respecte le prochain.

Nous sommes avertis par rapport à la fausse sécurité, à la fausse espérance fondée sur l’illusion d’être proches de Dieu tout en méprisant ses exigences dans le domaine social. Et de conclure : « … Tous, petits et grands, sont âpres au gain ; tous prophètes et prêtres ont une conduite fausse. Il ont bien vite fait de remédier au désastre de mon peuple en disant ‘Tout va bien, tout va bien’ (shalom, shalom !) et en réalité rien ne va, il n’y pas de shalom » (Jérémie 6:12 ss. et 8:10 ss.).

Même chose dans le Nouveau

Le Nouveau Testament continue dans la même ligne, dénonçant les illusions et mettant l’accent sur la justice qui restaure et sur l’économie fraternelle.

Jésus utilise l’image du fou qui bâtit sa maison. Il construit sa sécurité, mais « sur le sable » d’une foi en Jésus qui n’est pas mise en pratique (Mt 7). La sécurité telle que voulue dans le projet divin repose sur la mise en pratique de l’enseignement de Jésus, et non sur nos calculs motivés par la peur..

–         Le jeune homme riche, c’est quoi son problème ? (Matthieu 19). Chez lui, la balance entre aimer Dieu et sa sécurité calculée penchait en définitive vers ses sécurités trompeuses liées à ses nombreux biens. Il faisait pourtant profession d’aimer Dieu et le prochain. Sans doute n’a-t-il pas tiré les conséquences de ses paroles lorsqu’il disait « et le prochain comme soi-même »… Jésus lui tend la perche :

« Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu as, donne le aux pauvres et suis-moi ». « Il le quitta tout triste car il était riche » (Mt 19:22). Son problème était son attachement à sa richesse comme sécurité, préféré à la vie fraternelle avec Jésus. Et Dieu sait ce qui lui est arrivé, avec ses grands biens, quarante ans plus tard, lorsque vinrent les terribles années 67 à 70 et la destruction de Jérusalem par les zélotes ou les troupes romaines.

–       Le mauvais riche. Et que penser du « mauvais riche », qui mettait sa sécurité dans la spéculation sur ses greniers ? (Lc 12:16-20). On dit de lui qu’il est le « riche insensé », mais pas si insensé que cela quant à ses intérêts personnels présents. Il raisonne logiquement. Il s’agrandit, il investit. Mais à l’échelle du temps, se trouve aussi la mort et la succession des générations. Et retentit la question : « Et ce que tu as amassé, qui l’aura ? » …L’Evangile souligne que l’alternative pour lui aurait été : « au lieu de s’enrichir en vue de Dieu », (cf. v. 20 et 21). S’enrichir en vue de Dieu…

La conclusion de Jésus par rapport à la peur et à l’espérance est celle-ci : « Vendez vos biens, et donnez-les en aumône. Faites-vous des bourses qui ne s’usent pas, un trésor inépuisable dans les cieux, où ni voleur n’approche ni mite ne détruit » (Lc 12:33).

La question qui nous est posée est la suivante : Est-ce que les « politiques » peuvent entendre un tel discours ? Je le pense. La leçon à tirer est qu’il faut considérer l’économie et la sécurité sur le long terme.

Mais pour investir dans le bon sens, il faut une certaine mentalité, une certaine foi, c’est-à-dire une certaine confiance dans l’œuvre de Dieu et de son Esprit, sinon c’est chacun pour soi, le « sauf qui peut » des murs pour dissimuler, des armes pour se protéger (parfois se protéger les tyrans) et des niches fiscales (afin de mettre à l’abri pour soi et contre les autres).

Dieu pourtant ne s’impose pas et n’impose pas ses solutions, il propose. Mais il peut arriver qu’à force de ne pas être entendu ou pas retenu, ce soit « trop tard », alors, comme le dit l’Evangile, « les pierres le long du chemin (des ruines) crient » (Lc 19:40, voir 44).

Le salaire des ouvriers peut, de nos jours également, être « retenu » de multiple façon (Jc 5:3). On pense par exemple à des actions qui tournent complètement le dos aux pauvres, à commencer par l’exploitation d’ouvriers de tel ou tel peuple. De nos jours, ces démarches peuvent se faire en quelques transactions informatisées, en quelques clics, sans même voir combien ces clics peuvent être criminels, parce que faits pour chercher purement son propre intérêt.  Oui, il faut moraliser l’économie et il faut une âme pour l’économie. L’affairisme insensible aux réalités sociales de la production, de la consommation, de la souffrance des exclus est dénoncé, également dans le Nouveau Testament.

Il est évident, aujourd’hui comme en tous temps, que les plus pauvres ont besoin d’une économie qui aménage une suspension provisoire d’intérêts, si l’on veut que le cycle infernal du toujours plus riche et du toujours plus pauvre ne se poursuive et ne s’amplifie pas.

Il est nécessaire de repenser lucidement, pour en saisir les implications sur les humains d’ici et d’ailleurs, différentes actions liées à des peurs de perdre et à des espérances illusoires ; par exemple repenser dans cette perspective les spéculations actuelles5, les conséquences du machinisme au détriment de la main d’œuvre humaine6, les masses financières considérables qui migrent vers les nouveaux paradis fiscaux liés au secret bancaire, ici ou ailleurs7.

3. Une nouvelle mentalité, une nouvelle action

Ces thérapies sont en fait de deux ordres : l’ordre intérieur, touchant la mentalité, et l’autre touchant plutôt ses actions. Pour en revenir à ce que nous avons dit au début : L’acceptation de son propre statut de créature, avec le rapport au créateur qu’il implique ainsi que la considération envers les semblables et la reconnaissance de l’univers créé, est la solution pour jouir d’une vraie sécurité.

Le premier remède est alors la gratitude, qui exprime le mieux ce rapport de créature. Le second, qui au fond, exprime l’autre face du rapport de gratitude, c’est la pratique d’une économie fraternelle (aussi dans sa dimension citoyenne, par les impôts par exemple). Beaucoup se passe dans l’attitude de créature (la prière juste) : c’est de cette façon que nos inquiétudes et nos soucis légitimes trouvent leur juste place et que les peurs illégitimes s’estompent (Mathieu 6:24-34,  Phil 4:4-7 et 1 Pi. 5:6-7).

Et comme nous l’avons vu avec le texte d’Esaïe (32:15), pour chasser les peurs pathologiques, il faut une nouvelle mentalité, un nouvel « Esprit », œuvre de Dieu. Il n’est pas étonnant que la Pentecôte fonde l’émergence de la communion fraternelle. Les choses ne se font alors pas « parce que c’est la loi », mais parce qu’on aime ce qui est juste (la justice qui restaure le prochain).

Enfin, après avoir parlé de la reconnaissance, de la pratique de l’économie fraternelle, de la dépendance à l’Esprit, il nous faut dire quelque chose sur l’espérance promise. C’est cela, la politique de la confiance dont nous avons besoin. Elle est sûre de l’aboutissement, c’est pourquoi elle est animée d’une espérance promise. Il s’agit dès lors de renforcer cette confiance : la foi née de la révélation biblique est alors « la ferme assurance des choses qu’on espère » (Héb. 11:1), tellement forte qu’en attendant, elle détermine notre vie et sa mentalité.

Cette foi agissante en nous, nous pousse, en plus de la prière pour les autorités dans le sens exposé (il faut savoir pour QUOI on prie), à l’action dans trois autres domaines :

1.      la non-coopération : ne pas collaborer ou coopérer à des actions qui sont animées manifestement par d’autres mentalités ou logiques, lorsque nous les découvrons. Il y a avant tout une mentalité dont il faut « sortir », celle de « Babylone », de l’Egypte ou de Rome, ou de tout autre libertarisme économique qui ne dit pas son nom8.

2.      la vie fraternelle : vivre une vie fraternelle plus libre des peurs injustifiées et des espérances trompeuses. C’est le travail d’une saine spiritualité, d’un saint enseignement, que de situer correctement nos peurs et nos espérances. Comme le changement des grandes choses n’est pour l’instant pas à notre portée, commençons/continuons à travailler aux petites choses. Que l’Eglise soit l’Eglise!9

3.      la dimension prophétique : appeler au changement (dimension prophétique), sans céder aux illusions du tout ou rien. Pour changer les choses, nous n’avons pas besoin de pouvoir. Ce fut la conviction des premiers chrétiens et cela reste d’actualité. Ces toutes petites choses, nous pouvons déjà les pratiquer « chez nous », en vivant le travail, l’amitié et le don dans l’Eglise. On sous-estime très souvent le poids des minorités actives, qui font la démonstration d’attitudes pertinentes et innovantes. Que votre lumière brille aux yeux des hommes ! Il s’agit de promouvoir la justice économique et sociale sur le plan mondial, car c’est sur ce plan que, d’une part, Dieu nous a créé à son image et que, d’autre part, tout s’interpénètre dans la mondialisation.

Dans ces engagements, nous découvrirons alors, avec émerveillement, que nous ne sommes pas les seuls à penser et à agir comme cela. L’amitié produit de la communion. C’est le produit d’une logique de solidarité au lieu d’une logique de la rentabilité à court terme.

4. Comment continuer ?

L’Eglise, par son enseignement, sa mentalité et sa pratique, ne doit pas être le reflet de sociétés malades. Dans la Bible et pour nous, fondamentalement, la justice est un don de Dieu et il n’y pas de sécurité sans justice relationnelle. Dieu s’est engagé à pourvoir. A chaque jour suffit son travail.

L’espérance biblique est basée sur l’œuvre libératrice du Christ, et la venue promise d’un monde habité par la justice. L’Evangéliste Luc rappellera de la part de Jésus : « Qui veut, en effet, sauver sa vie, la perdra, mais qui perdra sa vie, à cause de moi, celui-là la sauvera. Que sert-il donc à l’homme de gagner le monde entier, s’il se perd ou se ruine lui-même ? » (Lc 9:24-25).

Les sociétés d’hier comme celles d’aujourd’hui sont tentées d’oublier la justice pour se vautrer dans l’abondance. L’Ecriture Sainte nous rappelle sans cesse l’exigence d’équité à l’échelle planétaire et est comme un aiguillon pour les politiques partisanes. S’il est légitime de tirer les bénéfices de ses efforts, il est tout aussi juste que les bénéfices servent à la communion sans encourager le vice. Si nous sommes faits pour la jouissance des choses, nous sommes également faits pour la communion.

Nous qui sommes citoyens d’un pays que nous aimons, nous continuerons, comme nos pères et mères, à exercer notre influence en intégrant le mieux possible les questions relatives à la justice redistributive. De cette manière seulement serons-nous « sel de la terre », c’est-à-dire agent d’anti-pourrissement. Et il semble qu’il y ait urgence pour le bien de tous, également de notre peuple.

L’économie actuelle a besoin d’une conscience et d’un remède anxiolytique. Si elles dérapent, l’économie et nos législations peuvent devenir foncièrement païennes. Notre critique ne doit pourtant pas être synonyme d’un rejet en bloc. De belles choses se font ici ou là, et c’est point par point qu’il s’agit d’examiner les choses.

Le Dieu de la Bible, notre Père, nous appelle à localiser les peurs fondamentalement païennes (les nôtres aussi) et à les transformer en confiance. A la base de la sécurité se trouve cette attitude. Notre mission consiste aussi à dévoiler les mécanismes de la peur, pour dévoiler « les faux dieux » qui régissent parfois les mentalités.

Pour que, dans la société, les murs tombent, il faut que les murs intérieurs de nos peurs tombent d’abord. C’est pour beaucoup d’entre nous l’heure des petits pas dans la bonne direction.

Une bibliographie biographique

Ce qui m’a interpellé sur le sujet dans mon parcours personnel:

Dans ma jeunesse, des gens qui étaient à la fois généreux, laborieux et contents de l’état dans lequel ils se trouvaient.

–         L’Evangile du royaume de Jésus-Christ.

–         Le livre de John Yoder, Jésus et le politique (PBU, Lausanne, 1984), son chapitre 3 sur « Les implications du Jubilé ».

–         En 1987 le vieux livre (épuisé, de 1933) d’Isabelle Rivière, Sur le devoir d’imprévoyance, et généralement le livre de Tolstoï, « Ma religion ».

–         Plus récemment le livre de Frédéric de Coninck, La justice et l’abondance (La Clairière, Québec, Canada, 1997).

–         Un travail qui a abouti à la rédaction d’un livret : Claude Baecher, Grâce et économie, plaidoyer pour une attitude généreuse (Editions Mennonites, Montbéliard, Dossier de CHRIST SEUL N°1/2006).

–         Plus récemment encore, lors d’une rencontre en Irlande du Nord, une conférence du théologien Alejandro Zorzin, « Vulnérabilité et sécurité », dans les Cahiers de la Réconciliation, Mouvement International pour la Réconciliation, septembre 2007, N°3-2007, Paris, pp. 28 à 41, l’étude se trouve en anglais (pages de droite) et en français (pages de gauche).

–         Et le livre remarquable suivant, tout récent : Scott Bader-Saye, Following Jesus in a Culture of fear, The Christian Practice of everyday Life Series, BrazosPress, Grand Rapids, Michigan, 2007 (ISBN 10: 1-587 43-192-0 pbk).

 


1. Le sociologue Max Weber avait déjà noté que l’apparition du monothéisme et de la foi en un Dieu unique créateur provoque, par rapport au polythéisme et à la magie, « un recul caractéristique du rationalisme originel, pratique et calculateur» cité par Frédéric de Coninck, La justice et l’abondance Dire et vivre sa foi dans la société d’aujourd’hui, La Clairière, Québec, 1997, dans le chapitre « Une économie marquée par l’espérance », p. 73. Car croire en Dieu, c’est rendre compte à quelqu’un de la gestion de son être et de ses capacités.

2. Voir Scott Bader-Saye, p. 159.

3. Scott Bader-Saye, Following Jesus in a Culture of fear, p. 135;

4. « N’oublie jamais tout le chemin que l’Eternel ton Dieu t’a fait parcourir pendant ces quarante ans dans le désert afin de te faire connaître la pauvreté pour t’éprouver. Il a agi ainsi pour découvrir tes véritables dispositions intérieures et savoir si tu allais, ou non, obéir à ses commandements…

Garde-toi d’oublier l’Eternel, ton Dieu, et de négliger d’obéir à ses commandements, à ses ordonnances et à ses lois que je te donne aujourd’hui. Si tu manges à satiété, si tu te construis de belles maisons et que tu y habites, si ton gros et ton petit bétail se multiplient, si ton argent et ton or s’accumulent, si tous tes biens s’accroissent, prends garde de ne pas céder à l’orgueil et d’oublier l’Eternel ton Dieu, qui t’a fait sortir d’Egypte, du pays où tu étais esclave, qui t’a conduit à travers ce vaste et terrible désert peuplé de serpents venimeux et de scorpions, dans des lieux arides et sans eau où il a fait jaillir pour toi de l’eau du rocher le plus dur. Dans ce désert, il t’a encore nourri en te donnant une manne que tes ancêtres ne connaissaient pas. Il a fait tout cela afin de te faire connaître la pauvreté et de te mettre à l’épreuve, pour ensuite te faire du bien. Prends donc garde de ne pas te dire : ‘C’est par mes propres forces et ma puissance que j’ai acquis toutes ces richesses.’ Souviens-toi au contraire que c’est l’Eternel ton Dieu qui te donne la force de parvenir à la prospérité et qu’il le fait aujourd’hui pour tenir envers toi les engagements qu’il a pris par serment en concluant alliance avec tes ancêtres. Mais si vous en venez à oublier l’Eternel votre Dieu, et à rendre un culte à d’autres dieux, à les servir et à vous prosterner devant eux, je vous avertis aujourd’hui que vous périrez totalement. Vous périrez comme les nations que l’Eternel votre Dieu va faire périr devant vous, parce que vous ne lui aurez pas obéi. » (Semeur 2000)

5. Spéculations sur les matières premières, sur le cours des monnaies, les fusions des sociétés, le marché immobilier… Affairisme international qui coupe tout lien avec les peuples, qui rappelle ce qui est récurrent dans les empires (Apocalypse 18:11-15) et annonçant la chute du commerce international de l’époque. Dénonciation virulente de leurs excès au profit des nantis et au détriment des pauvres. L’apôtre Jacques a eu la même virulence (Jacques 4:13-16).

6. Le machinisme fait que la main d’œuvre disparaît au détriment du travail des personnes les moins qualifiées. Il est important de réfléchir au partage du revenu, du travail et de la reconnaissance sociale, si nous ne voulons pas aggraver l’exclusion. Il est également nécessaire de travailler à la requalification.

7. Pour les « nouvelles alternatives » (octobre 2010), je nomme par exemple pour l’UBS et bien d’autres banques, par exemple,  Singapour et Hong Kong (cf. Le Figaro du 8 octobre 2010 qui cite le New York Times).

8. Ici il serait bon de réfléchir à nos fonds de placements et aux manières qu’ils ont de « faire des petits », c’est-à-dire sur la base de quels calculs d’investissements (des économies plus ou moins fraternelles, cela existe). Cela aussi doit intéresser les chrétiens du pays.

9. On nous demande de poser des signes forts, pas de changer le monde, ce qui cacherait parfois des velléités de puissance plutôt que de l’amour. Il faut « instiller dans le monde une logique différente » (Fred de Coninck, La justice et l’abondance, p. 76).

Photo by Daniele Colucci on Unsplash

~ 4 min

Genève, 15.11.2010 – Le samedi 13 novembre, la ConférenceChristNet a eu lieu à Berne. Sous le titre « Gouverner par la peur ou par l’espérance ? » les participants ont réfléchi aux mécanismes de la peur dans nos société et politique et se sont posés la question de savoir comment les dépasser par l’espérance chrétienne.

Claude Baecher, dr. théol. (Bienenberg) a abordé les fondements bibliques de la peur et de l’espérance, tandis que Markus Meury, sociologue (co-fondateur de ChristNet) a traité de la réalité de la peur en société et politique. Des ateliers et une table ronde ont été l’occasion pour approfondir des domaines concrets tels que l’argent et l’économie, l’islam, ainsi que l’État, la criminalité et les étrangers.

Les participants ont été enchantés par des exposés d’une grande qualité et un choix de sujets « d’habitude moins présents dans les milieux chrétiens ».

A midi, ChristNet a célébré son 10e anniversaire par un buffet dînatoire.

Le point de vue du théologien…

La peur : un diagnostic biblique

Claude Baecher (directeur d’études francophone au CEFOR Bienenberg) a indiqué dans son exposé « Peur ou confiance en Dieu selon la Bible » que, depuis la chute, l’Homme, créé pour la communion, se retire, se replie sur soi et se suffit à soi-même. En conséquence, il souffrirait de solitude, de méfiance et d’égocentrisme, il se fermerait à la solidarité et le vivre ensemble. Bref : une culture de la peur s’installe. Dans ce contexte, l’être humain chercherait à devenir invulnérable en construisant des murs, à ne compter que sur lui-même pour subvenir à ses besoins en entassant des richesses. S’en suivrait une spirale de la peur où le prochain est perçu comme une menace pour son propre bien-être et, partant, une logique d’exploitation aux dépens des plus faibles.

Les remèdes

Une façon de vivre empreinte de reconnaissance et d’une économie de communion est, selon M. Baecher, le remède bibliques contre la peur. Concrètement, les chrétiens pourraient renoncer aux sécurités basées sur l’oppression du prochain et, en lieu et place de cela, chercher la communion dans tous les domaines. En outre, ils pourraient ne plus amasser des biens et chercher un rapport de communion à l’argent. M. Baecher perçoit l’Église internationale comme un signe prophétique contre les murs de division. Quant à se débarrasser de la peur, il prône la justice sociale, car « la sécurité d’une société dépend de la justice pratiquée ».

… et du sociologue

Markus Meury, sociologue (ChristNet) a constaté, dans son exposé « Causes et conséquences de la peur dans la société et en politique en Suisse » que la Suisse connaît, depuis les années 1980 une véritable escalade de la peur. Ainsi, la valeur moyenne du « baromètre des peurs » (prélevé par sondage) serait montée constamment au cours des deux dernières décennies.

Selon M. Meury, les causes en seraient une désorientation grandissante dans un monde en cours de mondialisation et de transformation. Ainsi, il existerait une tendance vers une plus grande « suissitude » et vers plus de nationalisme. De même, la rupture des liens familiaux contribuerait à une perte d’identité et, partant, de sécurité.

Toujours selon M. Meury, ces développements feraient le lit du discours sur les abus qui soumet à la suspicion d’emblée tous les bénéficiaires d’aide de l’État (AI, aide sociale, asile…). Dès lors, il serait souvent plus important d’empêcher les abus que d’accorder de l’aide. Quant à l’économie, elle serait marquée par une logique de la pénurie («économie de la faim») qui part de l’idée d’accumuler toujours plus pour assurer notre survie.

Selon M. Meury, les chrétiens, grâce à leur espérance vivante en Jésus-Christ, auraient le potentiel de dépasser la peur. Puisqu’ils font confiance à un Dieu qui pourvoit, la peur de manquer ne devrait pas avoir d’emprise sur eux. « Qui, sinon nous, peut dépasser la peur ?»

Ateliers : Islam, argent et criminalité…

Trois ateliers approfondirent le sujet de la peur et de l’espérance pour les domaines de l’islam, de l’argent et l’économie, ainsi que de l’État, la criminalité et des étrangers.

Par rapport à l’islam, il a été constaté que si une menace terroriste intégriste contre la Suisse n’est pas d’actualité, les divergences culturelles et l’affirmation musulmane peuvent faire peur. Pour y remédier, il a été proposé qu’on cherche le contact avec des musulmans, que des Eglises offrent des aides en faveur des immigrés…

Quant à l’argent et l’économie, de nombreuses personnes seraient aujourd’hui exclues des circuits économiques. Tant que la solidarité est diminuée, de grandes peurs surgiraient et celles-ci seraient combattues par l’espoir d’une croissance illimitée. Ce faux espoir et l’accumulation de toujours plus de biens seraient pourtant contraires au message biblique et à l’origine de nombreux nouveaux problèmes.

Enfin, concernant l’État, la criminalité et les étrangers, il a été indiqué que le taux de criminalité en Suisse serait, dans l’ensemble, plutôt modeste. Même si la criminalité des étrangers paraît élevé en nombres absolus, elle n’en est pas bien plus importante que celle des Suisses si on tient compte du fait que la population étrangère comporte une part importante de jeunes hommes issus de couches sociales défavorisées. Le contact avec la population étrangère devrait être recherché pour diminuer la crainte. Genève, qui connaît un taux d’étrangers de 40% serait, en effet, étonnamment xénophile. Par ailleurs, l’État, les PME et les Églises devraient être encouragés dans leur rôle intégratif.

Table ronde

Ont participé à la table ronde avec discussion publique : Hanspeter Schmutz (modérateur, Institut Insist), Claude Baecher, Markus Meury, Christian Bibollet (spécialiste de l’islam, Réseau Evangélique Suisse), Urs Winkler (anc. vice-directeur de l’Office fédéral des étrangers). La discussion traitait de la gestion de la peur, la transformation possible de la culture de la peur en une culture de l’espérance, la perspective d’avenir des chrétiens en Suisse ainsi que des postulats d’une politique de l’espérance.

 

ChristNet est un forum chrétien traitant du social, de l’économie, de l’environnement, de la culture et du développement. Cette conférence a marqué son 10e anniversaire.

 

Contact

www.ChristNet.ch

Samuel Ninck, 022 731 71 83. samuel.ninck@christnet.ch.

Markus Meury, 022 734 08 17. markusmeury@gmx.ch

 

Partenaires

·        Ausbildungszentrum Bienenberg. www.bienenberg.ch

·        Institut Insist. www.insist.ch

·        Institut für Gemeindebau und Weltmission. www.igw.edu

~ 3 min

Le texte suivant, extrait de «Le lion de lumière – une parole pour la Suisse», touche un point sensible de la situation spirituelle et politique en Suisse. Ces dernières années ont mis en exergue l’actualité brûlante de la vision que l’auteur développe. Nous, ChristNet, croyons que la Suisse doit maintenant prendre une décision; en tant que pays et chacun-e individuellement. Choisirons-nous de rester accrochés à la fausse sécurité procurée par Mammon ou bien de nous abandonner en toute confiance aux mains de Dieu qui pourvoit?

Appelés à aimer la miséricorde

L’Eglise de Suisse sera connue dans le monde entier comme une Eglise de miséricorde.

Faire preuve de miséricorde, c’est exprimer l’amour de Dieu dans toute sa profondeur. Notre Dieu veut non seulement que nous marchions dans la miséricorde, mais II nous ordonne aussi d’aimer la miséricorde: «On t’a fait connaître, ô homme, ce qui est bien; et ce que l’Eternel demande de toi, c’est que tu pratiques la justice, que tu aimes la miséricorde, et que tu marches humblement avec ton Dieu.» (Michée 6.8)

Mammon: l’amour des biens

Il faut que le dieu Mammon soit affronté. Et pour que cela se produise, l’Eglise de Suisse doit cesser de vénérer l’argent et d’être à son service; elle doit commencer à marcher dans l’esprit opposé. Car «l’amour de l’argent» est intimement lié à l’égoïsme et à la cupidité endémiques que l’on retrouve dans la théologie déformée du matérialisme. Le matérialisme est un esprit qui fait des ravages et qui accorde plus de valeur aux choses qu’aux personnes. Ceux qui se trouvent sous son pouvoir négligent et oppriment les faibles pour obtenir leur drogue temporelle.

Jésus: l’amour des personnes

Le matérialisme, ou l’amour de l’argent, est la principale force qui motive presque toute notre société et, tragiquement, une grande partie de l’Eglise aussi. Un jour, l’esprit de l’antéchrist gagnera l’affection du monde entier en contrôlant ce que les hommes aiment le plus: l’argent. L’Evangile de Jésus-Christ est à l’opposé de cet esprit qui souille et pollue… car son message ne se rapporte en rien aux biens et aux possessions; il est totalement orienté vers les personnes. Tout dans le message et l’exemple que Jésus nous a laissés parle de relever ceux qui sont brisés et de donner à ceux qui ne peuvent rendre en retour… en particulier les pauvres, les exclus et les faibles. Ainsi, Jésus toucha personnellement les lépreux, si méprisés à son époque, et II nous ordonne d’aller et de faire de même. «Celui qui déclare demeurer en lui doit marcher aussi comme lui [le Seigneur] a marché.» (1 Jean 2.6) Si notre bouche le confesse, notre marche doit aussi le refléter!

Miséricorde ou argent:
à nous de choisir

Le véritable Evangile se soucie des âmes, pas du commerce! L’esprit de miséricorde est l’antithèse de l’esprit de cupidité. Aujourd’hui, de nombreuses personnes, même au sein de l’Eglise, sont à un point critique… elles doivent décider: vont-elles servir le Dieu de Miséricorde ou le dieu de l’argent? C’est à nous de choisir!

Jésus nous l’explique clairement: Nul ne peut servir deux maîtres; car ou il haïra l’un et aimera l’autre, ou il s’attachera à l’un et méprisera l’autre. Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon. (Matthieu 6:24)

Scott MacLeod est musicien et responsable du ministère de rue ProVision International (USA). Extrait autorisé du livret «Le lion de lumière» (Editions Schleife, Winterthour, pp. 33-34. www.schleife.ch)

~ 6 min

Exposé de Hanspeter Nüesch lors de la ConférenceChristNet 2007 « La Suisse – connue pour sa générosité ? ».

 

J’habite dans un village de 100 habitants. Parmi eux, plus de 70 sont pauvres. A peu près 30 d’entre nous ont une situation variable mais que l’on peut qualifier de bonne. Les sept personnes les plus riches dépensent à elles seules deux tiers de l’argent à disposition. Elles consomment la moitié des ressources énergétiques dont dispose la commune. Elles sollicitent les services du médecin de village plus de 330 jours par an, si bien qu’il ne lui reste que 30 jours pour s’occuper des 93 autres habitants. Et à l’avenir, les sept personnes aisées s’enrichiront encore et les 93 pauvres s’appauvriront.

« Mon village », c’est le monde en miniature. Parmi les personnes ici présentes, la plupart, si ce n’est toutes, font partie des 7 % de riches. Et le fossé entre nous autres, Suisses privilégiés, et la majeure partie de la population mondiale se creuse chaque année un peu plus. En moyenne, un pasteur gagne au moins 4500 francs par mois en Suisse, en Russie ce chiffre passe à 450, soit un dixième, en Chine il tombe à 150 francs, soit un trentième, et à Cuba à 45 francs par mois, soit un centième de ce que touche un pasteur suisse. Le travail que nous menons depuis des années avec plusieurs centaines de pasteurs exerçant dans ces pays nous permet d’affirmer que ces chiffres correspondent à la réalité. .

Si le village que nous venons de décrire était le vôtre, vous feriez certainement quelque chose pour lutter contre ces inégalités au niveau des richesse ? Comme ces problèmes touchent les habitants de pays lointains tels que le Rwanda ou Cuba, nous nous sentons souvent moins concernés. Il faut que ça change.

S’il est un thème maintes fois évoqué dans l’Ancien Testament au point d’y occuper une place prédominante (à côté de l’idolâtrie), c’est bien celui de l’urgence face à la pauvreté et le point de vue de Dieu par rapport à l’injustice. Dans l’Evangile de Luc, un verset sur sept est consacré à la gestion correcte et responsable des biens qui nous sont confiés. Le sermon sur la montagne révèle une inversion des valeurs dominantes (Matthieu 5.3-12) : les riches en tous genres, les personnes infatuées ou satisfaites d’elles-mêmes, les personnes influentes et celles qui se croient cool ne sont soudain plus aussi cool aux yeux de Dieu. Au contraire, Jésus fait l’éloge des catégories de personnes qui peinent à trouver un emploi sur le marché suisse du travail : ceux qui se sentent pauvres, faibles et dépendants de Dieu, ceux qui se tiennent en retrait, ceux qui sont modestes, les doux qui donnent toujours la priorité aux autres et préfèrent tendre l’autre joue plutôt que de renvoyer les coups. Jésus ajoute qu’au travers des pauvres et des déshérités, c’est lui-même que nous rencontrons. « Ce que vous avez fait au moindre de mes frères, c’est à moi-même que vous l’avez fait », ou pas fait justement (Matthieu 25.40-43).

Jésus a fait du double commandement d’aimer  – aimer Dieu de tout son cœur et son prochain comme soi-même (Matthieu 22.37-40) – le commandement le plus important pour ses disciples. On ne peut pas aimer Dieu sans aimer son prochain. Et on ne peut pas aimer son prochain sans démontrer l’amour par des gestes pratiques. Paul souligne le fait que l’amour de Dieu se répand dans nos cœurs à travers l’Esprit Saint qui nous a été donné (voir Romains 5.5). Les Chrétiens remplis de l’Esprit Saint témoignent de leur amour en aidant pleinement leurs semblables. Ce qui implique également de les conduire à Jésus. C’est là la plus grande preuve d’amour. Mais ce n’est pas la seule. L’amour de Dieu doit aussi se manifester de manière concrète. Donner des preuves d’amour concrètes à ceux qui sont dans le besoin, c’est leur apprendre à connaître Dieu et son amour. Nos actes ont plus d’effet que nos paroles, mais ils doivent malgré tout être accompagnés d’explications afin de permettre aux hommes de comprendre la source de l’amour et de se tourner directement vers cette source divine.

Le premier fruit de la présence de l’Esprit Saint, c’est l’amour (Galates 5.22). Qu’ont fait les premiers Chrétiens après avoir été remplis de l’Esprit Saint et transformés le jour de Pâques ? Ils ont tout partagé entre eux. Les plus riches ont vendu leurs biens afin de partager le produit avec les plus pauvres (Actes 2.44). Jim Wallis explique dans God’s Politics que notre pauvreté spirituelle est directement liée à notre faible propension au partage et que la clef pour en sortir se trouve dans un engagement en faveur des pauvres et de la justice sociale. Jim Wallis déclare: « La question n’est pas que quelques personnes agissent en faveur d’autrui, mais que nous parvenions tous à la guérison ».

Une guérison complète, c’est ainsi que Jésus a décrit sa mission dans Luc 4.18 : « L’Esprit du Seigneur repose sur moi parce qu’il m’a désigné par l’onction pour annoncer une bonne nouvelle aux pauvres. Il m’a envoyé pour proclamer aux captifs la libération, aux aveugles le recouvrement de la vue, pour apporter la délivrance aux opprimés et proclamer l’année de grâce accordée par le Seigneur ». Et Jésus nous a donné à nous, ses enfants, la même mission : « Comme mon Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie » (Jean 20.21). A la différence fondamentale qu’il est bien évidemment le seul à avoir pu racheter nos pêchés par sa mort. Seul Jésus a pu offrir une vie nouvelle à Lazare. Cependant, il nous confie une tâche : celle de libérer Lazare de son linceul.

Demandons-nous: où se trouvent ceux qui, prisonniers de plusieurs linceuls,, se trouvent privés de la liberté que le Christ a promise à tous les hommes ? Peut-être s’agit-il de pauvreté matérielle, peut-être de structures injustes, peut-être de formes d’oppression, peut-être d’abus commis par ceux qui détiennent le pouvoir, peut-être de catastrophes. Qui sait, peut-être nous retrouverons nous un jour à la place de ces pauvres, de ces prisonniers et opprimés qui dépendent de l’aide de leurs frères et sœurs ?

Et la Suisse

La Suisse est riche, très riche, du moins sur le plan matériel. Elle a pour mission de partager sa richesse avec le reste du monde. Elle a au moins autant besoin de donner que les pauvres ont besoin de recevoir. Celui qui donne se bénit lui-même. Notre pauvreté spirituelle est également due au fait que nous ne mettons pas nos dons au service des autres. Quelle bénédiction ce serait pour la planète si nous utilisions généreusement les talents dont nous avons été dotés pour apaiser la misère dans le monde (voir Matthieu 25) ! Un franc suisse a tellement plus de valeur à l’étranger. Je rejoins Scott MacLeod (Le Lion de lumière) lorsqu’il affirme que Dieu nous a donné, à nous autres Suisses, le don de la charité. Seulement, nous n’exploitons ce don que de façon très insuffisante. Au sein de Campus pour Christ, nous nous sommes plus d’une fois rendu compte que lorsque nous étions dans des impasses sur le plan matériel mais que nous poursuivions malgré tout nos efforts pour les nécessiteux de Cuba, de la Corée du Nord, de Russie ou encore du Rwanda, Dieu lui-même nous aidait à ressortir de la misère. Nous avons souvent eu l’impression de recevoir davantage que ce que nous avions donné, non pas sous forme de biens matériels, mais de biens spirituels. Donner aux pauvres, c’est donner à Dieu. Or, « nous ne donnerons jamais trop à Dieu ». D’une manière ou d’une autre, il nous rend toujours plus que ce que nous donnons aux pauvres et donc à lui. Nous serions vraiment sots de ne pas commencer à donner généreusement, au cas où nous ne l’aurions pas fait jusqu’à présent.

« Donnez, et il vous sera donné : on versera dans votre sein une bonne mesure, serrée, secouée et qui déborde ; car on vous mesurera avec la mesure dont vous vous serez servis ». Luc 6, 38

Il y a 25 ans, des personnes partageant les mêmes convictions ont constaté que des courants spirituels partaient de la Suisse vers les quatre coins du monde. Cette vision des choses m’a fortement marqué dans mes activités de coordinateur de projet. Plus que jamais, je suis persuadé que notre pays a les moyens de contribuer grandement à accomplir au cours des prochaines années et dans le monde entier la mission de Jésus-Christ. Cependant, nous autres Suisses devons partager notre richesse avec les miséreux dans le monde de manière bien plus généreuse que par le passé. Je pense qu’un renouveau spirituel sera alors plus proche que jamais dans notre pays.


Photo by Elaine Casap on Unsplash

~ < 1 min

L’écologie est devenu un thème omniprésent. Il est de plus en plus clair que notre mode de vie a un impact durable sur les plus pauvres et les générations futures. Comment se positionner alors en tant que chrétiens ? Comment relever ces défis dramatiques sans nous laisser animer par le catastrophisme et la peur ?

Voilà les questions dont traite le ChristNetInput « Après nous le déluge » : interventions du Forum du même nom (automne 08), une interview et des liens pour aller plus loin.

 

 ChristNet_deluge

~ 3 min

La crise financière, surtout en Suisse, est aussi une crise de la foi : qui vient en premier, Dieu ou Mammon ?

Même peu de temps avant la grande crise, le Conseil fédéral et les milieux proches des banques pensaient que la crise passerait à côté de la Suisse. Et selon le baromètre des préoccupations du Credit Suisse de septembre 2008, les banques (après la police et le Tribunal fédéral) ont le troisième niveau de confiance de la population parmi toutes les institutions. Dans probablement aucun autre pays du monde, les banques n’ont autant de pouvoir qu’en Suisse. Cela explique aussi pourquoi l’UBS a été renflouée à hauteur de plus de 60 milliards de francs en une nuit sans discussion parlementaire et sans aucune condition, comme c’est rarement le cas dans le reste du monde occidental. Notre gouvernement n’a même pas pris de participation dans le capital de la banque pour pouvoir influencer la façon dont elle fait des affaires, mais a simplement « éliminé les déchets ».

C’est un signal dévastateur pour les banques : continuez à spéculer, nous vous aiderons si ça ne marche pas. La façon précédente de faire des affaires est ainsi confirmée. Cependant, sur le plan économique et moral, cette situation est destructrice. En outre, le siège de la société créée pour le renflouement a été déplacé vers le paradis fiscal des îles Caïmans. C’est aussi un signal moral.

Dans le même temps, l’UBS était l’une des banques les plus touchées au monde, avec 60 milliards de francs de pertes, et l’un des plus grands spéculateurs sur le marché des subprimes à haut risque. On savait depuis 2005 que la bulle immobilière aux États-Unis allait éclater. Mais dans la course à des rendements encore plus élevés, tous les investisseurs et les banques ont fermé les yeux et espéré s’en tirer à bon compte ou pouvoir s’en sortir à temps. C’était comme à la roulette, où tout est mis en jeu à chaque nouveau tour. La croyance en Mammon était plus grande que la vérité. En achetant des obligations de pacotille, le Conseil fédéral a poursuivi cette conviction : La croyance que le prix de ces actions désormais sans valeur finirait par remonter et que nous ne perdrions rien.

L’UBS elle-même se défend aujourd’hui contre une loi visant à renforcer sa base d’équité, même si c’était son problème. Elle n’a rien appris et veut continuer à suivre un cours à haut risque. Pas plus tard qu’en décembre, l’actuel nouveau PDG de l’UBS, Oswald Grübel, a déclaré que la crise n’avait rien à voir avec un risque excessif ou de mauvaises incitations sous forme de primes.

La crise financière est donc aussi une crise de foi : voulons-nous continuer à croire à l’augmentation de la richesse ou voulons-nous poursuivre d’autres objectifs ? Après tout, une grande partie de la valeur créée n’était que virtuelle. Soudain, des billions de francs avaient disparu dans le monde entier. Cela me rappelle fortement Matthieu 6.19 : « Ne vous amassez pas des trésors sur la terre, où les mites et la rouille corrompent, et où les voleurs percent et volent ». Nous ne devrions pas non plus être comme le riche céréalier qui a construit des granges de plus en plus grandes et qui a vu son âme revendiquée du jour au lendemain (Luc 12.16-21).

Markus Meury, chronique dans le magazine Insist, n° 3, avril 2009. www.insist.ch.


Photo by Ben White on Unsplash

~ 4 min

Shane Claiborne écrit dans l’introduction de son livre (titre original : The Irresistible Revolution. Living as an Ordinary Radical) qu’il l’écrit pour des radicaux ordinaires, des gens qui sont radicaux au sens propre du terme, qui veulent aller au fond des choses et ne sont pas satisfaits de l’état actuel de notre monde. Des gens qui soupçonneraient en douce qu’il pourrait y avoir plus que le capitalisme et le « christianisme pop », comme Shane aime l’appeler. Il a dédié le livre à tous les « hypocrites, lâches et fous », comme il en était un, avec l’espoir « que dans ce monde de raccourcis, de tromperies et de morts, nous puissions trouver le chemin, la vérité et la vie ».

« On m’avait enseigné ce que les chrétiens croient, mais personne ne m’avait dit comment vivent les chrétiens. » Cette déclaration encadre son récit. Shane décrit sa recherche de l’orthopraxie, la bonne chose à faire selon l’évangile. Il constate avec consternation qu’il a consommé « toute la gamme des offrandes du complexe industriel chrétien » mais qu’il risque de mourir de faim spirituelle dans le processus. La recherche de ce que signifie être chrétien l’amène dans divers endroits, qu’il s’agisse de cathédrales squattées en Amérique, de maisons vides dans les banlieues, des bidonvilles de Calcutta ou de la zone de guerre de Bagdad. Tout comme ces lieux ne sont pas des lieux glamour, les personnes que Shane rencontre dans sa quête sont également des étrangers à notre société : des perdants, des malades, des impuissants, des sans-abri, des marginaux.

Sa critique à notre égard est simple : il y a beaucoup de chrétiens qui connaissent l’Évangile, mais presque jamais ceux qui essaient de le vivre. Avec Søren Kierkegaard, il nous reproche de « dire que la Bible est en fait très facile à comprendre, mais nous faisons semblant de ne pas comprendre, car si nous comprenions, nous devrions agir en conséquence ».
« Dans la mesure où vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. » Avec force, Shane nous renvoie à ce qui est écrit dans Matthieu 25:31-46. D’après cela, Jésus nous rencontre sous la forme de l’affamé, de l’assoiffé, de l’étranger, du nu, du malade et du prisonnier. Et quel que soit le bien que nous leur faisons, nous l’avons fait à Jésus. Shane ne cesse de demander rhétoriquement : « Et si Jésus était sérieux dans ce qu’il a dit ?

En cours de route, Shane participe à une expérience ; il s’installe dans le ghetto de Pennsylvanie avec des amis avec la vision « Aimez Dieu, aimez les gens, suivez Jésus ». Leur modèle est celui des premiers chrétiens de l’église primitive. Bien que Shane écrive qu’ils « n’auraient jamais appris le secret de la manière de parvenir à ne pas se faire de mal », il est touchant de lire les expériences émouvantes qu’ils ont faites avec cette expérience, « The Simple Way ». Selon Shane, l’isolement des riches et des pauvres est l’une des principales raisons de l’existence de la pauvreté. L’une des choses qu’ils veulent faire avec « The Simple Way » est de briser cette séparation entre riches et pauvres. Un christianisme qui ne cherche pas avec insistance le bien-être des personnes défavorisées n’en est pas un. Poussés par l’amour du prochain, Shane et ses amis vivent un petit coin de paradis sur terre et n’ont pas à se remettre en question pour l’éternité.
« La plupart des choses ont été dites beaucoup trop souvent et doivent enfin être vécues. » Avec cette phrase, Shane met son livre en perspective de manière honnête dès le départ. Quiconque lit la Bible les yeux ouverts et le cœur large tombera inévitablement sur les mêmes vérités que Shane. Et pourtant, son livre est important. Comme un encouragement pour nous, « hypocrites, lâches et fous », à qui il est, après tout, dédié. Pour nous encourager à « changer nous-mêmes et nos vies et à nous tourner vers Dieu » ! (Actes 2:38).
A sa manière humble, Shane nous met en garde contre la tentation d’une révolution forte et puissante. Lancer des programmes de croissance toujours plus élaborés dans nos églises avec la grande truelle. Il ne cesse de souligner que la révolution de Jésus a été une révolution douce et, à première vue, peu impressionnante. Avec Mère Teresa, il pense que « ce n’est pas ce que nous faisons, mais l’amour avec lequel nous le faisons qui compte ».

Shane ne veut délibérément pas nous donner de réponses sur la façon de changer nos vies. Il préfère poser des questions. Shane est un talentueux conteur d’histoires. Il raconte toujours ses histoires captivantes avec un clin d’œil, ce qui lui évite d’être pris trop au sérieux. Pourtant, son livre traite sans aucun doute de sujets graves et mortels. En particulier, Shane ne prêche pas un évangile de prospérité ; il fait remarquer que suivre le Christ nous coûtera tout.

C’est pourquoi je suis un peu sceptique quant au fait que Shane soit actuellement très excité dans les cercles chrétiens, ce qui le met personnellement mal à l’aise. Il est facile de se laisser entraîner dans ses histoires. Mais pour que nous restions infectés par cette charité même après la fermeture des couvertures de I Must Be Crazy to Live This Way, il nous faut avant tout une chose : un changement de l’amour que seul Dieu peut donner de cette manière. Et telle doit être notre prière accompagnant ce livre : « Seigneur, laisse-moi par mes actions être témoin de Ton amour dans ce monde sans amour !
Ce faisant, je peux très bien imaginer que Dieu nous appelle aussi à d’autres endroits, comme il l’a fait avec Shane. Mère Teresa disait que c’est chez les riches que l’on trouve la plus terrible des pauvretés : la solitude. Ces « pauvres » ont aussi besoin de vrais chrétiens qui non seulement croient ce que Jésus dit, mais aussi font ce que Jésus fait !

 

~ 5 min

Wolfgang Simson est né en Allemagne et a exercé son ministère dans plusieurs pays. Il a étudié la théologie à Bâle, mais a aussi été chauffeur de taxi. Il a une vision particulière sur la confiance en Dieu qu?il cherche à partager.

Introduction

Tout d?abord une précision : je n?ai pas une vision, mais je suis caractérisé par une vision. Ce n?est pas la même chose. Dieu nous dit de faire certaines choses, mais ce n?est pas à nous de dire à Dieu ce qu?Il doit faire !

Dieu donne trois choses aux hommes : l?amour, la grâce et la bénédiction. Les deux premiers, Il les donne sans conditions. La troisième, la bénédiction est liée à la condition d?obéir Dieu. C?est donc parce que nous suivons la vision de Dieu que nous recevons la bénédiction. Les hommes ne doivent pas inviter Dieu à soutenir leur propre vision.

Trois choses me tiennent particulièrement à c?ur : un retour aux sources historiques de l?Eglise ; l?unité du corps de Christ ; une gestion biblique des finances.

La confiance en Dieu : une expérience à vivre

Commençons par une expérience que j?ai faite en Egypte, au Caire. En début de journée, j?ai parlé dans un bidonville devant 3000 personnes et je devais être à 18 heures à l?autre bout de la ville pour parler dans une Eglise catholique. J?ai donc pris un taxi, le conducteur était plutôt âgé et quand je lui ai donné le billet sur lequel était notée l?adresse, celui-ci est tombé à terre et le chauffeur a démarré. Comme il partait du principe que tous les touristes voulaient aller soit aux pyramides soit au Hilton, et vu qu?il faisait déjà nuit, il m?a conduit au Hilton.

Me voilà donc au Hilton sans savoir où aller. Il ne me restait plus que 15 minutes jusqu?à mon rendez-vous et je ne parlais que deux mots d?arabe. C?est là que j?ai entendu une voix qui me disait que ce n?était pas tout à fait juste. En effet, je savais dire « en avant ! », « chéri », « à droite », « à gauche » et « tout droit ». J?ai reconnu que c?était Dieu qui me parlait et j?ai décidé de lui faire confiance. J?ai donc dit : « En avant, chéri ! » et il est parti. J?ai prié Dieu de me conduire où je devais aller. « Dis-moi à chaque carrefour la direction que je dois prendre et dirai au chauffeur : ?A droite? ou ?A gauche? ! » C?est ce que j?ai fait et après quelques raccourcis, on est arrivés par des petits chemins que seul des personnes du lieu connaissent? Par cette expérience, Dieu m?a appris ce que signifie lui faire confiance.

 

Le royaume de Dieu : la peur n?est plus

Actuellement, nous vivons une époque caractérisé par la peur. Mais Dieu nous dit : « N?aie pas peur petit troupeau. » Le royaume de Dieu est le lieu de la pleine royauté de Dieu. Il faut abandonner notre idée de « démocratie » pour passer à la « théocratie ». Jésus nous y invite. Dans une théocratie, la peur n?a pas de raison d?être, car Dieu nous apporte ce dont nous avons besoin.

Aujourd?hui, je ne suis plus Allemand : mon royaume est celui de Dieu. Je ne suis plus patriote, car le royaume de Dieu est ma patrie. Pour cela, il faut accepter la royauté de Dieu. Ce message est plus difficile à faire passer en Occident que dans d?autres endroits du monde, comme en Asie. Pour les gens là-bas, qui viventsous une dictature, cela a du sens. En Occident, en tant qu?héritiers de mai 68, nous avons tendance à voir le royaume de Dieu d?une manière démocratique et antiautoritaire. « Chercher d?abord le royaume de Dieu et sa constitution », implique avant tout deux choses : accepter la seigneurie de Jésus sur moi et ensuite s?occuper de la constitution de ce royaume. Souvent le mot grec « dikaïosuné » est traduit par « justice », mais c?est vraiment la constitution au sens juridique du terme.

Les gens croient à un Jésus théorique qui les aide mais qui n?est pas le roi de leur vie. Pourtant, le plus important n?est pas ce que l?on dit, mais comment on vit ! Montre-moi comment tu vis et je te dirai ce que tu crois. La première chose à faire est de renoncer à sa peur et de placer sa confiance dans le royaume de Dieu.

 

Voir ou croire ?

Chaque année, une compagnie d?assurance allemande commande une étude sur les sept principaux motifs de peur des Allemands : les Allemands ont en premier lieu peur de l?avenir, du manque d?argent et de l?augmentation des prix. La peur est le maître du monde. L?Allemagne est un pays qui est dirigé par la peur, mais à mon avis, deux pays sont encore pires : le Japon et la Suisse. Nous sommes des fanatiques des assurances et cherchons toujours à assurer notre insécurité.

La foi, elle, va dans la direction opposée. En effet, il existe deux manières de vivre : une vie par la foi et une vie par la vue. Dans le premier type de vie, on reçoit de Dieu ce qu?il faut ; dans le deuxième, on entre dans une logique arithmétique: si je travaille 40 heures, si je fais ci et ça, je recevrai ceci et pourrai payer cela. Même nous, les chrétiens, essayons d?avoir la mainmise sur nos finances. Dieu nous dit pourtant d?arrêter de faire confiance à nos finances. C?est une condition pour entrer dans la vie promise par Dieu.[1] Avec Jésus et son Royaume, nous avons une solution pour notre vie et nos finances.

Conclusion : une économie du partage

La plupart des gens sont esclaves de leur travail et de leurs finances. Dans l?Eglise primitive, les gens ne vendaient pas ce qu?ils possédaient aux autres, ils le partageaient. Nous faisons de même avec notre littérature : elle n?est pas à acheter, mais à lire simplement. Si l?ouvrage ne vous plaît pas, donnez-le plus loin. Mais s?il vous a parlé, donnez-le à dix autres personnes et contribuez ainsi à une économie du partage (« gift economy »). Nous avons créé une fondation pour soutenir ce système afin que la vision de partager sans payer puisse se propager : http://starfishportal.net/ (en allemand).

 

Questions

Pourrais-tu préciser ce que tu entends par « économie du partage » ?

Dans le courant du Nouvel Âge, il y a des festivals qui fonctionnent comme cela, on ne peut rien acheter. Chacun apporte quelque chose et le met en commun, mais cela fonctionne pendant deux semaines. Dieu nous demande de partager ce que l?on a. Aujourd?hui, on a un système bancaire qui n?existait pas au début. Il fallait alors compter sur les autres. Aujourd?hui, nous vivons dans une société de consommation, qui est notamment soutenue par les chrétiens. Toute la chrétienté est basée sur cette consommation commerciale.

Afin de contrer ce mouvement, nous avons décidé de tout donner gratuitement : livres, lettres de nouvelles, musiciens. Nous mettons tout cela dans le domaine public.

As-tu rencontré des oppositions ?

Non, au contraire. En Inde, j?ai prêché devant 10 000 personnes sans opposition. Les gens comprennent, mais ils ont de la peine à sortir de ce système, car ils en dépendent.

N?avez-vous pas peur de vous sentir exploités ?

Est-ce que les gens n?exploitaient pas Jésus ? Ils font du commerce avec lui donc ils peuvent aussi faire la même chose avec moi. Ou Dieu m?aide, ou je coule. Ce n?est pas facile, cela implique des nuits blanches à pleurer, mais cela fait partie de la vie chrétienne. Le domaine financier est la partie la plus visible de notre spiritualité.

Wolfgang Simson

Transcription : Anne-Sylvie Giolo, Samuel Ninck

Révision : Sarah Martinez

 


[1] cf. Luc 14

Photo by Liane Metzler on Unsplash