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Le thème de la solidarité avec les faibles compte de nombreuses facettes. Par souci de concision, je m’en tiendrai géographiquement à la Suisse et n’aborderai le sujet que dans certains de ses aspects. Je traiterai la question principalement du point de vue de mon expérience personnelle.

Je ne viens pas d?une famille engagée sur le plan social. Et pourtant, dans mes jeunes années déjà, j?ai été confronté à ce sujet, car en lisant la Bible je tombais fréquemment sur des passages où il était question de solidarité avec les faibles. Ce que je lisais me fascinait, surtout lorsque je comparais les postulats de la Bible au monde qui m?entourait. La question du « pourquoi » qui me taraudait m?a ensuite conduit à étudier la sociologie, puis en complément l?histoire, la géographie et, au cours d’un échange d?une année à Genève, les sciences politiques. Après mes études, j?ai travaillé pendant trois ans pour les GBU à Genève, tout en occupant un poste d?assistant en sociologie urbaine.

Expériences personnelles

Les années 1990 ont été une époque où les personnes à faible revenu et les groupes marginaux, en particulier, se sont trouvées en situation difficile. Dans le monde du travail, principalement, la baisse des salaires dans les catégories les plus basses a eu des conséquences désastreuses, tandis que la libéralisation des horaires de travail influait sur la vie des familles. J?avais également le sentiment qu?avec la concurrence internationale si souvent décrite, cette spirale descendante allait poursuivre son cours, à moins que les employés ne parviennent à défendre leurs intérêts par eux-mêmes. C?est la raison pour laquelle j?ai cherché à travailler au sein d?un syndicat et j’ai envoyé ma candidature, il y a tout juste quatre ans, à différentes institutions syndicales. J?ai finalement atterri au syndicat VHTL de Bâle, où je travaille aujourd?hui en tant que secrétaire régional. Les initiales VHTL signifient en allemand Vente, Commerce, Transport et Alimentation. J?étais vraiment heureux d?obtenir un emploi ici, puisque ce syndicat représente précisément les groupes qui me tiennent à c?ur. Il s?agit des personnes occupant des emplois dans le tertiaire qui perçoivent les plus bas salaires, telles que les caissières de la Migros, les femmes de ménage, les gardiens de nuit et le personnel de la fabrique de saucisses Bell.

Les quatre années écoulées m?ont permis de jeter un regard profond dans l’univers de ces gens avec lesquels vous et moi avons par ailleurs peu de chances d’entrer en contact. Voici quelques mots clés pour décrire la situation:

  1. Le salaire : effectivement, les années 90 ont vu apparaître un nombre croissant de « working poor » (travailleurs pauvres), avant tout dans les secteurs que je représente. Lorsque je suis entré en fonction, de nombreux vendeurs et vendeuses ou femmes de ménage touchaient un salaire inférieur à 2500 francs net. Une somme qui suffit à peine à vivre lorsqu’on est seul, mais dès qu’il faut également élever des enfants, cet argent ne suffit plus. Par ailleurs, il faut bien comprendre que cette situation ne concerne pas que des femmes, mais également des pères de famille. Il est dès lors évident que les deux parents doivent travailler afin de permettre à la famille de boucler les fins de mois. Le niveau du salaire du conjoint revêt lui aussi une grande importance dans ce cas de figure. Grâce la campagne sur les salaires minimaux menée par les syndicats, les salaires dans les tranches les plus basses ont été revus nettement à la hausse au cours des dernières années.
  2. Le temps de travail : depuis la fin des années 80, le travail sur appel a gagné toujours plus de terrain. J?ai moi-même pu constater à quel point ma mère avait des difficultés à organiser sa vie privée dès lors qu’elle devait constamment s’attendre à un éventuel appel de la part de son employeur. Le nouveau code du travail en vigueur depuis la fin des années 90 a apporté une nouvelle impulsion à la déréglementation du temps de travail. Le travail du soir a fréquemment été introduit, et la législation facilite l’introduction du travail de nuit ou du dimanche. L’on a ensuite observé une forte déréglementation des horaires d’ouverture des commerces. Ce sont précisément les employés aux revenus les plus bas qui sont particulièrement concernés. Dans ces secteurs, rares sont les employés qui ont fait un apprentissage ou disposent de compétences professionnelles qui leur permettraient de changer d’emploi lorsque les horaires de travail rendent impossible toute vie de famille. J?ai moi-même vu, dans le cadre de mon travail, de nombreux cas de familles qui se sont séparées, entre autres, parce que les partenaires ne se voyaient presque plus en raison de leurs horaires de travail par trop flexibles.
  3. La concurrence : la déréglementation et les baisses de salaire trouvent toujours une justification dans la concurrence internationale et la menace qui s’ensuit de perdre nos emplois. D?après ce que j?ai pu constater, je dois dire que c?est précisément les plus faibles qui sont condamnés par cette façon de conduire l’économie.
  1. Le stress croissant : autrefois, il y avait de temps à autre des temps morts, où l?on avait peu de travail. Aujourd?hui, au contraire, l’on a tant renforcé la charge de travail que les dommages liés au stress croissent de manière exponentielle. J?ai assisté aux dépressions dramatiques de certains employés. L?on dit certes aujourd?hui que les bonnes prestations méritent récompense, mais l’augmentation massive des prestations dans les classes de salaires les plus basses n’est guère gratifiée…
  2. Le chômage : les syndicats disposent, comme chacun sait, de leur propre caisse de chômage. C?est également le cas chez nous. J?ai donc l?occasion de voir comment cela fonctionne. Bien des employés qui perçoivent leurs indemnités de chômage chez nous ont énormément de mal à retrouver du travail. Le monde du travail requiert de plus en plus de compétences et que la personne soit apte au travail à 100%. Mais il existe tout un ensemble de personnes qui soit ne disposent pas nécessairement des capacités intellectuelles ou ne sont pas en possession de toutes leurs aptitudes physiques, pour une raison ou une autre. Aucun employeur ne veut de ces personnes, même en période de croissance, car dans le monde du travail actuel, seules sont demandées les personnes pleinement productives. D?où le rehaussement de ce qu?on appelle le taux de chômage incompressible. En fin de compte, bon nombre de ces chômeurs finissent à l?AI.

J?ai beaucoup de mal à accepter des postulats tout faits comme « la responsabilisation de la personne » et les étiquettes tels que « les faux invalides ». Bien sûr, il y a, dans ces groupes, quelques personnes qui ne souhaitent effectivement pas travailler. Et il y en a aussi qui profitent de l?Etat social. En pareil cas, il faudrait prendre des mesures. Mais supprimer les prestations du chômage, de l’AI ou des services sociaux pour tous reviendrait à jeter le bébé avec l’eau du bain. En fin de compte, la question se pose de savoir ce qui a le plus d?importance : que nul ne souffre ou que nul ne profite de façon illégitime?

Réflexions tirées de la Bible

Le thème de la solidarité occupe une place étonnant grande dans la Bible. La notion de « pauvres » revêt à cet égard une importance centrale. Le terme désigne à la fois le dénuement matériel et l?oppression (synonyme dans ce cas de misérables, faibles, etc.), mais aussi les pauvres en esprit, à savoir les humbles. Je m?en tiendrai dans ces lignes aux deux premiers usages.

Comment les pauvres sont-ils traités dans la Bible ? Quelle responsabilité leur incombe-t-elle dans leur situation ? Rares sont les passages où la pauvreté est mise en relation avec la propre culpabilité. On ne les trouve que dans le livre des Proverbes et dans la déclaration du Nouveau Testament : « Si quelqu?un ne VEUT pas travailler, qu?il ne mange pas non plus ». Pour le reste, la pauvreté est décrite comme un mal de la société, souvent mis en relation avec le préjudice social ou l?oppression. Bien entendu, l?on ne peut pas en conclure que les pauvres d?aujourd?hui ne sont généralement en rien responsables dans leur situation. Toutefois, je vois certains parallèles.

L?Ancien comme le Nouveau Testament regorgent d?appels à protéger (physiquement et légalement) les pauvres et à partager avec eux.

–         Nous devons ouvrir généreusement les mains à l?égard des pauvres (Dt 15, 7-11)

–         « Celui qui ferme son oreille au cri du faible criera lui-même et n?aura pas de réponse » (Pr 21, 13)

–         Dans Matthieu 25, nous lisons en quoi consiste le jugement : j?avais faim et vous m?avez donné à manger, etc.

Les aumônes sont en général bien perçues dans la Bible. Mais l?Ancien Testament prévoyait également une répartition régie par la loi :

–         La dîme servait entre autres à réduire la pauvreté.

–         Tous les 3 ans, 10% de la récolte revenait aux pauvres.

–         Les aliments à glaner après la moisson étaient réservés aux pauvres (Lv 19, 10).

–         Tous les 7 ans, un champ était abandonné à lui-même. Les fruits étaient destinés aux pauvres (Ex 23, 11).

–         Tous les 7 ans, les dettes étaient remises. Ce faisant, « il n?y aura pas de pauvre parmi vous », lit-on dans Deutéronome 15, 4.

–         Aucun intérêt ne sera exigé des personnes appartenant au propre peuple.

–         Tous les 50 ans, la terre vendue par une personne dans le besoin revient à son propriétaire d’origine, ce qui devait empêcher qu’une personne accumule une fortune tandis qu’une autre se retrouve sans terre.

La répartition prévue par la loi n?est donc pas du vol, comme le prétendent certains partisans de l?évangile de prospérité.

Les différents auteurs de l?Ancien Testament ont également appelé à protéger les pauvres et les faibles et à faire observer leurs droits. Car trop souvent, les forts essayaient d?ignorer les droits des pauvres ou des juges iniques négligeaient la cause des pauvres. A l?époque (et aujourd?hui encore), la pauvreté était souvent perçue comme une impuissance. Jadis, les prophètes jugeaient sévèrement les Israélites, en particulier, lorsque ceux-ci, bien que prospères, laissaient les pauvres à leur sort ou leur refusaient leurs droits.

La Bible nous exhorte également à traiter les pauvres et les faibles sur un pied d?égalité et à nous engager en faveur de leurs droits et de la justice sociale. Ainsi, au Psaume 82, 3-4 : « Faites droit au faible et à l?orphelin, rendez justice au malheureux et à l’indigent, libérez le faible et le pauvre, arrachez-les à la main des méchants ».

Qui plus est, le plus grand commandement, selon Jésus, est d?aimer Dieu et son prochain : la solidarité est évidente dans ce cas en raison de ce qui a été dit plus haut.

Nous avons vu que le partage revêt une importance particulière, car la pauvreté a manifestement aussi des origines structurelles.

Mais comment partager ?

–         Les premiers chrétiens partageaient presque tout. Ils peuvent servir de modèle, mais ce n?est pas une obligation.

–         Partageons dans la mesure de ce que nous pouvons faire, et non pas seulement de ce qui nous est superflu. Ce principe nous est révélé dans l?histoire de la pauvre veuve venue au temple dans Marc 12. Cela tend également à nous conduire à un style de vie plus modeste.

–         Cela signifie également que nous devons travailler afin de pouvoir donner aux pauvres. Nous ne devons donc pas conserver notre revenu élevé pour nous-mêmes afin de nous enrichir. Mais il n’est pas non plus nécessaire que nous devenions pauvre. Notre attitude doit être empreinte de générosité et doit montrer que nous nous satisfaisons de ce que nous avons.

– Je crois qu’une authentique solidarité et un amour véritable pour le prochain ne peut être vécu que lorsque nous-mêmes sommes libérés de nos propres peurs de manquer du pain quotidien et lorsque nous sommes portés, dans tous nos besoins, par notre Père céleste. La solidarité devient alors un plaisir et ne procède pas simplement d?un sentiment de devoir.

–         Comme nous avons pu le voir dans la Bible, il est parfois nécessaire d’assurer une répartition définie légalement et structurée, car les pauvres sont manifestement trop importants aux yeux de Dieu pour qu?on abandonne leur sort à la seule générosité des donateurs.

Tendances actuelles

Les sociétés de tous les pays occidentaux semblent aujourd?hui avoir un problème croissant à envisager le partage et ce, en dépit d’une pauvreté qui va en augmentant. L?on constate une tendance générale à la désolidarisation. Après qu?un aspect de la solidarité a été délégué à des institutions, ce sont aujourd’hui ces institutions elles-mêmes qui sont remises en question (sans pour autant que l’on revienne à la forme antérieure de solidarité. Cette désolidarisation procède manifestement aussi d?un changement de valeurs : des sondages montrent que le terme « liberté » gagne en importance, aux yeux des sondés, face au terme « justice sociale ».

A mon avis, ce changement de valeur repose entre autres sur les trois éléments suivants, qui sont liés les uns aux autres :

  1. Un individualisme croissant : la dépendance réciproque des gens s?amoindrit à mesure qu?augmente la prospérité et les possibilités qui s’ensuivent de mener une vie indépendante. L’interdépendance (et partant, la nécessité de s?organiser en commun) n?est plus perçue comme une nécessité.
  2. La prospérité croissante a exacerbé la peur de perdre ce niveau de vie.
  3. En raison de cette peur, la croissance économique devient de plus en plus une priorité, ce qui provoque une mainmise de la pensée économique dans tous les domaines de la société.

Cette désolidarisation s?accompagne d?idéologies tendant à la justifier et de mythes très appréciés que nous ne demandons qu?à croire :

  1. « Chacun peut tout par lui-même ». Les différences au niveau des compétences, de l?origine, etc. démontrent bien que cette affirmation ne correspond pas à la réalité.
  2. « De plus en plus de personnes abusent de l’Etat social ». Une supposition qui peine à être démontrée et que l’on entend de plus en plus et qui reflète surtout nos peurs croissantes. La peur que certains profitent du système n’a jamais été aussi forte dans la Bible.
  3. « L?Etat social fait des pauvres et des chômeurs des assistés, il est donc meilleur pour les personnes dans le besoin qu?on ne leur donne plus rien ». Comme nous avons pu le voir plus haut, ces personnes ont souvent tellement peut de capacités que si nous ne leur donnons plus rien, elles ne peuvent souvent rien faire pour changer leur situation.
  4. « Lorsque l?économie va bien, tout le monde va bien ». En fait souvent, les plus pauvres souffrent de fois plus lorsqu’il y a libéralisation : ils sont alors moins protégés et en raison de la réduction de la répartition, ils ne tirent aucun avantage de la croissance économique (ce qui est démontré par une étude menée par la Banque mondiale).
  5. « La pauvreté ne peut être combattue que par un renforcement de la croissance ». Les pays occidentaux sont si riches qu?en théorie chacun pourrait avoir de quoi y vivre. En fait, tout est question de partage.

Dans les Etats occidentaux, l?on ressent une peur croissante de perdre les biens qui ont été accumulés. D’où la peur croissante que des profiteurs puissent vivre à nos dépens (et donc nous appauvrir). Ce sentiment est attisé par le nombre, effectivement en hausse, des bénéficiaires de l?aide sociale, des prestations du chômage ou de l?AI, Lesquelles ont le plus souvent été exclus du monde du travail en raison de leurs aptitudes insuffisantes. Cette peur fait que bon nombre de personnes estiment aujourd?hui plus important d’éviter que quiconque profite que de garantir que personne ne vive dans la misère. Les ?uvres sociales sont démantelées et, partant la vaste majorité des bénéficiaires qui n?ont rien à se reprocher sont en même temps punis…

Ce principe est appliqué également là où il est pourtant évident que les bénéficiaires n?y peuvent rien : l?on revendique ainsi la propre responsabilité des personnes gravement malades ou des rentiers AVS dans le besoin, et la solidarité leur est retirée. Nous sommes même sur le point de ne plus vouloir financer l?égalité des chances, même si nous disons que « chacun peut tout par lui-même » Ainsi, les bourses d’études destinées aux enfants de famille à faible revenu sont supprimées dans un nombre croissant de cantons.

ChristNet

Au vu de ce changement de valeurs qui ne s?arrête pas aux portes de l’église, quelques amis et moi-même avons décidé, en octobre 2000, de créer un réseau qui ait sa place dans ce champ de tension entre l’enseignement biblique et les tendances perceptibles dans la société. C?est ainsi que ChristNet a vu le jour. Voici un exemple parmi beaucoup de la façon dont on peut s?engager pour la cause des faibles.

Les objectifs de ChristNet :

–         Susciter un débat

–         Sensibiliser aux sujets d?ordre social et écologique

–         Faire office de réservoir de chrétiens engagés dans ces domaines

–         Encourager les chrétiens à s?engager

–         Plus largement, interpeller les non-chrétiens qui voient ainsi ce que font des chrétiens.

Pour ces raisons, nous ne pouvons pas être un parti politique (il existe d?ailleurs déjà des partis chrétiens), ce qui restreindrait trop notre marge de man?uvre. Nous entendons être un catalyseur et appeler chacune et chacun à aimer son prochain. Nous comptons à l?heure actuelle environ 25 membres actifs et 200 sympathisants en Suisse.

Nos activités

–         Nous organisons 3 forums et 1 grande conférence par année sur différents thèmes (nous avons jusqu’à présent abordé, entre autres, les sujets suivants : avortement, mondialisation, argent, Etat, écologie, politique de santé, amour du prochain, étrangers, identité nationale).

–         Groupes de travail (économie, écologie, théologie)

–         Groupes de prière à Bâle, Berne et Genève

–         Site web www.christnet.ch doté de nombreux textes, campagnes, etc. ; un site web consacré aux comportements respectueux de l’environnement est en cours d’élaboration.

–         Nous avons une publication appelée ChristNetInput, qui paraît trois fois par année. Elle est adressée à environ 2000 églises.

–         Pétitions (p.ex. contre la privatisation de l?eau dans les pays en développement, contre les publicités sexistes à Genève)

–         Petit projet de coopération au développement au profit d’un hôpital au Bénin (Afrique de l?Ouest)

–         Actions portant sur divers thèmes, p.ex. participation aux manifestations de Davos et surtout aux manifestations durant le sommet du G8 à Evian.

Dans ce dernier cas, nous avons, d?une part, rejoint les rangs des protestataires qui dénoncent les règles unilatérales de la mondialisation économique et, d?autre part, mis sur pied un service d?ordre d?environ trente personnes, lequel a tenté d’inciter au maintien de la paix et d’éviter les accès de violence. L?intervention a débuté avant la manifestation, par la participation aux événements organisés par les manifestants, où nous avons essayé d’influencer les comportements, et s’est poursuivi lors de la manifestation par de la musique délassante, du théâtre de rue, ainsi qu?en parlant directement aux auteurs potentiels d’actes violents, en mobilisant les autres manifestants pacifiques aux moments critiques et en s’interposant physiquement. Nos efforts ont été couronnés de succès lors de la manifestation elle-même. Par contre, nous n’avons rien pu faire lors de l’émeute qui a suivi. Cet engagement nous a valu quelque attention de la part des médias suisses et étrangers. Et nous avons la ferme intention de continuer

Par ailleurs, nous sommes entre-temps liés à des organisations aux buts similaires en France, en Allemagne, en Angleterre, aux Etats-Unis, au Bénin et au Congo. Nous bénéficions du soutien de divers conseillers nationaux, églises et ?uvres d?entraide.

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Predigt zum 1. August 2004 von Felix Ruther (VBG-Studienleiter), gehalten in der Casa Moscia (Kurs- und Ferienzentrum der VBG)

Einleitung

Weil unser eidgenössischer Dank-, Buss- und Bettag immer weniger der eidgenössischen Besinnung dient, möchte ich meine Predigt zum 1. August anhand der drei Begriffe Dank, Busse und Gebet ausgestalten.

Dank

Ich lasse Sie liebe Zuhörerinnen und Zuhörer an einem kleinen Dialog teilhaben:

Wurde die Schweiz im 2.Weltkrieg verschont, weil viele Schweizerinnen und Schweizer gebetet haben? Vielleicht. Aber haben denn die Deutschen oder Franzosen nicht gebetet? Vermutlich haben auch in diesen Ländern viele um Bewahrung gebetet. Waren es denn weniger, so dass die Katastrophe über ihre Länder hereinbrechen konnte? Ich weiss es nicht ? aber ich glaube nicht, dass die Gebetsquantität entscheidend ist. Worauf kam es denn an? Es war Gnade!

In 5. Mo 7,7 sagt Gott zum Volk Israel: « Nicht weil ihr alle Völker an Zahl überträfet, neigte sich Jahwe euch zu und erwählte euch : denn ihr seid das kleinste von allen Völkern. »

Ich denke, dass das auch auf uns Schweizer zutrifft. Nicht unsere Grösse, sei sie nun geistlich oder menschlich definiert, war entscheidend. Entscheidend war und ist die freie Zuwendung Gottes.

Dennoch glaube ich, dass wir Schweizer uns oft zuviel auf unsere eigene Leistung einbilden. Manchmal sogar auf unsere fromme Leistung.

Sicher ist es ein Ausdruck psychischer Gesundheit, wenn wir uns über eine vollbrachte Tat oder Leistung freuen. Das soll so sein. Aber über all dem Guten, das der Schweiz und ihrem Volke widerfahren ist, kann es leicht geschehen, dass wir vergessen, dass Gott letztlich der Geber alles Guten ist. Paulus wusste das noch ganz klar: « Nicht, als ob wir von uns aus fähig wären, etwas zu ersinnen wie aus eigener Kraft, sondern unsere Befähigung stammt aus Gott » (2. Kor 3,5). In 1.Korinther 2,12 geht Paulus sogar so weit, den Unterschied zwischen jenen, die den Geist Gottes in sich tragen und denen, die vom Weltgeist geprägt sind, darin zu sehen, dass jene die den Geist Gottes erhalten haben, wissen, was ihnen durch Gottes Gnade geschenkt wurde.

Wer durchschnittlich gesund ist und weiss, dass seine Güter letztlich als Geschenk von Gott stammen, der zeigt das in seiner Dankbarkeit. In Epheser 5,20 bringt Paulus daher den Empfang des Heiligen Geistes mit der Dankbarkeit in Zusammenhang: « Werdet des Geistes voll … indem ihr dem Gott und Vater allezeit für alles dankt, im Namen unseres Herrn Jesus Christus. »

Diese Dankbarkeit, als Grundhaltung eines Menschen, der weiss, dass letztlich alles Geschenk ist, vermisse ich aber zunehmend in unserer Schweiz – auch unter jenen, die sich vom Geiste Gottes geleitet wissen. In Moscia konnte ich Leiterstellvertreter diesbezüglich einiges beobachten: Fordern, auf seinem Recht bestehen, jammern usw. scheint eine sich ausbreitende Grundhaltung der Schweizer zu werden. Sie können sich vorstellen, wie es mich gefreut hat, als die jungen Leiterinnen und Leiter des Kinderprogramms einer Familienwoche sich nach getaner Arbeit sogar noch bei mir bedankten.

Unsere Dankbarkeit zeigt sich dann aber nicht nur in schönen Dankgebeten, sondern auch darin, dass wir uns grosszügig denen gegenüber erweisen, die weniger haben als wir. Dieser Grosszügigkeit können Sie am Schluss des Gottesdienstes Ausdruck verleihen. Wir legen Geld zusammen für ein Kinderprojekt in Bangladesch.

Ich hoffe und bete, dass wir Schweizer wieder zu dieser Dankbarkeit zurückfinden, die sich dann auch in der Solidarität mit den Hungernden und Leidenden ausdrückt. Ich hoffe und bete auch, dass diese Dankbarkeit wieder ein zentrales Erziehungsziel in unserer Gesellschaft wird ? angefangen bei uns und unseren Kindern.

Möge diese verschenkende Dankbarkeit in unserem Volke und unseren Familien wieder zu einer Grundhaltung werden, denn wenn nicht, könnte uns Gott durch seine erzieherischen Massnahmen daran erinnern, dass wir das Gute ihm verdanken und nicht nur unserer eigenen Leistung. Paulus schreibt davon im 2. Korinther 1,9: « Wir vernahmen nur deshalb in unserem Innern das Todesurteil, damit wir nicht unser Vertrauen auf uns selber setzten, sondern auf Gott. »

Busse heisst Umkehr

Umkehr im Umgang mit der Schöpfung

Das Wort Busse muss präzisiert werden, denn wenn heute jemand eine Busse erhält, dann denkt er im Normalfall, dass mit der Bezahlung alles wieder in Ordnung sei. Busse meint aber eigentlich einen Gesinnungswandel. Sünde ist gemäss der Bibel eine Zielverfehlung. So meint Busse die Umkehr vom falschen Ziel, meint die Kehrtwendung auf den Weg zum guten Ziel hin.

Nun, wo müssten wir als Einzelne und als ganzes Volk umkehren  » eben Busse tun  » und uns zurück auf den Weg zu Gottes Zielen hin begeben? Ich möchte nur einige wenige Dinge nennen, die mir gerade zuforderst sind: In meinem Studium des 5. Buchs Mose ist mir ein Satz aufgefallen, in dem Gott zu Israel sagt: « Siehe, dies Land stelle ich euch zur Verfügung… » (1,8) Und in einem Psalm lesen wir, dass die ganze Welt Gott gehört. Wenn ich aber unser Verhalten betrachte, dann komme ich zum Schluss, dass wir meinen, das Land gehöre uns. Wem bewusst wäre, dass das Land Gott gehört, der würde anders mit ihm umgehen. Der würde es mit Vorsicht geniessen und nicht derart ausbeuten, mit Abfall belasten und verschandeln. Hier müssten wir  » auch wir Christen  » umkehren.

Abkehr vom Materialismus

Einen anderen Punkt, der mir durch die Lektüre des 5. Mosebuchs in den Sinn gekommen ist, möchte ich noch erwähnen: Gott ermahnt sein Volk immer wieder, es soll keinen fremden Götzen nachzulaufen. Hierzu könnte man auch vieles bemerken. Lassen Sie mich nur darauf hinweisen, dass wir in der Schweiz zunehmend einem einzigen Gott huldigen, den man Materialismus nennen könnte. Wir fragen bei unseren Unternehmungen nicht mehr, ob etwas menschen- und auch gottgerecht ist. Allenfalls fragen wir noch, ob etwas sachgerecht ist. Die Frage nach der Wirtschaftlichkeit dominiert fast all unsere politischen Aktionen und Entscheide. Hier müssen wir als Einzelne und auch als ganzes Volk umkehren und die Wege Gottes neu aufsuchen.

Umkehr zur Zivilcourage

Und eine letzte Beobachtung. Immer häufiger wird in der Presse berichtet, wie Einzelne oder kleine Gruppen mit einer Unverfrorenheit auftreten können und Regeln und Gesetze verletzen, ohne dass jemand etwas dazu sagt. Das schuldhafte Schweigen nimmt in unserer Gesellschaft epidemisch zu. Francis Schaeffer schrieb schon vor längerer Zeit, in seinem Buch « Wie können wir denn noch leben », dass in unseren westlichen Gesellschaften nur noch zwei kümmerliche Werte hochgehalten würden, der persönliche Wohlstand und der persönliche Frieden. Mit persönlichem Frieden meinte er eben dies, dass wir fast alles opfern, um uns nur ja nicht aus unserer Ruhe aufscheuchen zu lassen. Auch hier denke ich, dass wir umkehren müssen.

Gebet

Vor zwei Jahren wurde ich an eine Tagung der Zeitschrift « Aufatmen » eingeladen. Leitende aus verschiedenen Kirchen und Gemeinden trafen sich in Deutschland. Gegen Ende der Tagung wurde ich gebeten, drei politische Anliegen aus der Schweiz zu nennen. Als dann die anderen Nationen für die Schweiz beteten, wurde keines meiner Anliegen aufgenommen. Man betete dafür, dass Menschen zum Glauben kommen und dass die Gemeinden wachsen. Das sind auch Anliegen, für die ich regelmässig bete. Dennoch war ich über die mangelnde politische Sicht dieser Gemeindeleiter erschüttert.

Damals nannte ich die folgenden Anliegen. Für diese Anliegen bete ich auch heute noch:

Prophetische Worte

Gott möge uns leitende Menschen in Politik und Wirtschaft schenken, die prophetische Worte an unsere Nation richten können. Also Worte mit Kraft und Gewicht, weil sie im Auftrage Gottes gesprochen wurden.

Neue Politkultur

Ich sorge mich darüber, dass in unserem Land die politische Gesprächskultur vergiftet ist. Wenn man sich die einschlägigen TV-Diskussionen anschaut, dann merkt man, dass eigentlich keine Gespräche mehr geführt werden. Fast alle Beteiligten breiten nur noch ihre Parteilparolen aus und suchen nicht mehr im gemeinsamen Diskurs die beste Lösung. Es geht um Macht und nicht mehr um das Wohl des Landes. Ich bete um eine neue Politkultur in unserem Land.

Eine Sicht für das Gesamtwohl

Es gibt zu viele »Idioten » in unserem Land. Im alten Griechenland unterschied man zwischen dem Politäs und dem Idiotäs. Der Politäs war jemand, der die ganze Polis (Stadtstaat) im Auge behielt, während der Idiotäs nicht weiter als bis zu seinem Gartenzaun denken konnte. Auch unter uns Christen gibt es zu viele « Idiotien ». In einer christlichen Wahlempfehlung wurden einmal die « zentral christlichen Anliegen » aufgelistet und auch jene Politiker, die in diesen Themen die richtige Position vertreten haben. Sie soll man wieder wählen. Als « zentral christliche » Anliegen wurden erwähnt: Abtreibungsfrage, Homosexualität und Drogen. Kein Wort über die neue Armut, kein Wort zu Umweltfragen, kein Wort zu den vielen Verkehrstoten, kein Wort zur Macht und Geldkonzentration in der Wirtschaft usw. Sind das alles Themen, die uns Christen nichts angehen sollen? Wenn ja, wäre das eine klassische Idiotie.

Eine Zwischenfrage: Haben Sie Ihren Zahnarzt gewählt, weil er Christ ist oder weil er ein guter Zahnarzt ist? Und wie wählen Sie die Politiker und Politikerinnen? Aus Liebe zur Schweiz, wähle ich Menschen in die Regierung, die das Gesamtwohl im Auge haben. Wenn sie auch noch an Jesus glauben ? umso besser für sie. Das ist aber nicht meine erste Wahlüberlegung. Denn wie die oben erwähnte Wahlempfehlung zeigt, muss beides nicht zwingend zusammengehen.

So bete ich auch, dass wir  » zuerst in unseren Kreisen, auch ich selber  » unsere Idiotien aufgeben können. Schon vor ca. 2500 Jahren hat Gott durch den Propheten Haggai sein Volk ermahnt: « Ihr sagt, es ist noch nicht Zeit den Tempel wieder aufzubauen, während ihr selber in euren feingetäfelten Häusern sitzt. » (1,4) Auch wir neigen allzu oft dazu, unsere eigenen Häuser auszubauen, während das Grosse darniederliegt. Und Haggai sagte weiter: « Schaut doch, wie es euch geht. Ihr säht und erntet, werdet aber nicht satt. Ihr trinkt und habt dennoch weiter Durst. » (1,6) Hier macht uns Gott auf eine ganz wichtige Tatsache aufmerksam. Erfüllung finden wir nicht in unseren kleinkarrierten Zielen. Idiotien erfüllen letztlich nicht. Möge Gott seiner Gemeinde einen neuen Aufbruch schenken, der darin besteht, dass wir wieder das Grosse, das Wohl der Gesamtheit  » weltweit  » in den Blick kriegen.


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Défis lancés aux chrétiens évangéliques

 

De nombreuses églises évangéliques sont aujourd’hui plutôt apolitiques. La politique et l’engagement au sein de la société sont négligés pour plusieurs raisons :

 

  • L?idée prédomine que le monde sera de toute façon anéanti prochainement, alors pourquoi donc se préoccuper de politique, de société et chercher à modifier la donne ? De tous temps, les chrétiens ont cru que la fin du monde était proche. L’insécurité grandissante dans le monde, provoquée par des changements d’ordre culturel, exacerbe naturellement les peurs. Reste que même si la fin du monde s?est rapprochée du fait de la réalisation de diverses prophéties bibliques, rien ne laisse croire que le jour de la fin est pour demain. Nous croyons qu’il n’est pas de notre ressort de connaître ou chercher à interpréter le moment de la fin (Mt 24.36 : « Pour ce qui est du jour et de l?heure, personne ne les connaît, ni les anges des cieux, ni le fils, mais le Père seul »). Il est également écrit que Christ reviendra de façon très soudaine. Tant que la fin du monde n’est pas arrivée, nous sommes appelés à prendre au sérieux la parole de Dieu et à nous engager en faveur de notre prochain, que ce soit au travers de la politique ou de la société.
  • Certaines églises affirment par ailleurs que nous ne sommes pas de ce monde. C?est vrai, mais la Bible nous enseigne aussi que nous sommes DANS ce monde (Jean 17.14-19). Et elle nous enseigne également que nous devons pratiquer le bien à l?égard de notre prochain, que ce dernier soit chrétien ou non (voir p.ex. l?histoire du bon Samaritain).
  • Souvent, nous ne nous préoccupons que du salut de notre propre âme et guère de la mission qui nous est confiée dans la Bible d?aimer notre prochain. Bien sûr, la relation à Dieu est un élément central de notre vie de foi, mais la Bible nous enseigne également que la foi, si elle n?a pas d??uvre, est morte en elle-même (Jc 2.17).
  • L?engagement social est jusqu?à présent souvent resté l?apanage de la diaconie. La diaconie est en soi une bonne chose, mais elle ne saurait suffire. Bien trop souvent, elle agit comme un pansement, sans s?attaquer aux causes. Nous devrions modifier les structures qui suscitent l?injustice plutôt que de venir en aide aux victimes de ces structures.
  • L?engagement politique des églises libres s?est jusqu?à présent souvent limité à des thèmes moraux tels que l?avortement, l?homosexualité, etc. La Bible nous appelle pourtant à aller plus loin et à rechercher le bien-être de notre prochain sous tous ses aspects. Certains cercles ecclésiastiques rejettent ce principe en l?attribuant aux théories de l?évangile de prospérité. Celles-ci affirment qu’il suffit de croire de la bonne façon pour être béni matériellement. Il se peut qu?ils aient encore à l?esprit les théories calvinistes de la prédestination, d?après lesquelles il est possible de déduire du succès rencontré au travail si la personne est sauvée ou non. Bien entendu, Dieu nous promet ses bénédictions, mais l?idée selon laquelle il n?est pour cette raison pas nécessaire d?offrir une justice sociale et un soutien aux faibles est en complète contradiction avec l’enseignement donné dans la Bible. Dans l’Ancien Testament déjà, les prophètes se plaignaient, au sujet du peuple d?Israël, de l?oppression et de la misère dans lesquelles vivaient les pauvres et les plus faibles en raison la dureté des c?urs des Israélites. Dans Matthieu 25, Jésus explique selon quels critères se fait le jugement : il décrit clairement que le facteur décisif est la solidarité envers les pauvres, les faibles, les détenus, etc. Lorsque les premiers chrétiens ont tout partagé, ce n?était pas en vain (Ac 4.32).

 

Les églises évangéliques se trouvent donc aujourd?hui face à plusieurs défis :

 

1. Dépasser les thèmes d?ordre moral :

L?engagement en faveur des thèmes moraux est bon, mais il ne suffit pas. Nous avons également reçu pour mission de nous engager pour défendre la justice et les plus faibles : « Faites droit au faible et à l?orphelin, rendez justice au malheureux et à l?indigent » (Ps 82.3) et « Ouvre ta bouche pour le muet, pour la cause de tous les délaissés » (Pr 31.8a).

 

2. Créer des structures justes au lieu de la seule diaconie :

Ce qui précède nous montre également qu?il ne suffit pas de panser les plaies par l?engagement diaconal, mais qu’il faut également combattre les causes en amont, aux niveaux politique et législatif. En voici quelques exemples :

 

3. Partager davantage : est-il normal que des personnes travaillant à temps complet n?arrivent pas à vivre de leur salaire ?

 

4. Travail en faveur des plus faibles et sécurité sociale : est-il normal que les personnes qui ne sont embauchées par aucune entreprise parce qu’elles manquent de qualifications ou sont diminuées psychiquement / physiquement soient réduites à vivre dans la pauvreté ?

 

5. Egalité des chances : est-il normal que l?égalité des chances dans la formation soit de plus en plus remise en question en raison des privatisations et du démantèlement des bourses en faveur d?enfants de familles à faible revenu et parce que certains cercles affirment que si on le veut vraiment, on peut tout atteindre par soi-même ?

 

6. Pouvoir : est-il normal que des milieux où l?argent coule à flot aient bien plus d?influence que les « malheureux et les indigents » lors de campagnes de votation ou d?élections, parce qu?ils détiennent des médias ou sont représentés par des groupes de pression au parlement ou au sein de commissions ?

 

7. Remettre en question les préjugés :

  • « Les étrangers sont privilégiés et les Suisses sont ?les dindons de la farce? ». Les étrangers possèdent en moyenne un niveau de formation largement inférieur et, partant, sont davantage touchés par le chômage et la dépendance envers l?assistance publique qui s’ensuit. Le préjugé selon lequel les étrangers nous exploitent ne tient pas la route.
  • « Les étrangers commettent davantage de crimes que les Suisses » : dans l’ensemble, le nombre d?étrangers impliqués dans des délits est effectivement supérieur à la moyenne. Mais en y regardant de plus près, l?on constate que statistiquement cela n?est dû qu?à la proportion bien plus importante de jeunes hommes parmi les étrangers que parmi les Suisses. Or, comme la criminalité, dans toutes les cultures, est avant tout le fait d?hommes jeunes, cela donne l?impression que les étrangers sont plus portés à la criminalité que les Suisses. Mais si l?on compare entre eux les catégories d?âge et les sexes, l?on constate que les étrangers ne commettent pas davantage de délits que les Suisses !
  • « Les bénéficiaires de prestations sociales sont déresponsabilisés par l?Etat » : ici aussi, il convient d?y regarder de plus près, car il ne saurait être question d’abandonner les gens à leur sort. La plupart des chômeurs et bénéficiaires de l?assistance sociale ne trouvent effectivement pas de travail, et il n’y a pas d’autre solution que de les soutenir et leur permettre de mener une vie digne. Au lieu de démanteler le système, il conviendrait d’offrir un soutien supplémentaire à la formation, afin de réintégrer ces personnes.

 

Nous devons dès lors être prêts à examiner les choses de plus près et à nous intéresser véritablement aux hommes et femmes avant d’émettre un jugement. Il est par trop facile et confortable de dire que le prochain est coupable de ce qui lui arrive, car cela nous décharge de notre responsabilité et nous évite de devoir partager…

 

8. Offrir un soutien véritable au lieu d?impératifs moraux :

Il ne suffit pas de nous prononcer par exemple contre l’avortement, contre la délinquance, pour le mariage et la famille, pour un plus grand sens des responsabilités, etc. Il nous faut également assumer notre part de responsabilités et rendre possible la réalisation de ces postulats ou soutenir les personnes concernées.

 

  • Avortement : que faisons-nous pour que des personnes dans des situations financière ou personnelle critiques ne doivent pas avorter ? Existe-t-il une aide financière globale, un soutien psychologique ou une crèche pour l?enfant ? Ou ces étapes nécessaires sont-elles à nouveau jugulées par la peur que certaines femmes puissent en profiter pour élever des enfants sans père ?
  • Délinquance : que faisons-nous pour nous attaquer aux causes de la délinquance (profondes différences sociales, matraquage publicitaire incessant, en même temps que l’absence de chances et de débouchés pour certaines couches sociales) plutôt que d’envoyer simplement les « méchants » en prison (et ensuite tout rentrera dans l?ordre) ?
  • Mariage et famille : s?ils sont indéniablement source de joie, les enfants engendrent des coûts et les familles se trouvent fréquemment plongées dans des situations financières difficiles, en particulier lorsque les parents ne peuvent pas travailler tous les deux. Que faisons-nous pour que les salaires suffisent ne serait-ce qu?à rendre possible la création d?une famille ? Il ne suffit pas de réduire les impôts des familles, surtout si la baisse est élaborée de telle façon que les familles à faible revenu n?en profitent guère, comme le prévoit à présent le parlement? (voir l?article à ce sujet sur ChristNetOnline) Et que faisons-nous pour éviter que les heures d’ouverture des magasins soient complètement déréglementées, de sorte que les familles s’en trouvent déchirées ?
  • Prise de responsabilité : que faisons-nous pour créer une véritable égalité des chances et pour renforcer la situation des chômeurs et des tributaires de l?aide sociale ?

 

9. Agir pour la Suisse, mais pas aux dépens des autres pays :

Il est bien beau d?entreprendre de prier et de nous préoccuper pour notre pays. Mais ne tombons pas dans le piège de penser que tout ce qui est bon pour notre pays l’est également aux yeux de Dieu. Nous sommes trop souvent enclins à trouver des raisons pour affirmer que ce qui est bon pour notre pays ne saurait être mauvais pour les autres. Il vaut la peine d?y penser à deux fois. Nous devons par exemple réfléchir franchement au secret bancaire, à nos exportations d’armes et à notre tendance à passer sous silence les injustices pour ne pas nuire aux relations économiques.

 

10. Intérêts propres :

Nous avons une tendance naturelle à croire davantage les théories qui nous confortent dans nos pensées que celles qui nous dérangent. Par conséquent, il nous faut prendre conscience des intérêts propres qui peuvent se cacher derrière nos opinions. Sommes-nous disposés à voter à l’encontre de nos propres intérêts ? Et à l?encontre des privilèges et intérêts de notre commune, de notre canton ou de notre pays à l?égard de ses voisins (p.ex. dans la « lutte pour attirer les riches contribuables »).

 

Lors d’élections et de scrutins, examinons attentivement quels intérêts (le plus souvent de nature financière) se trouvent à l’origine de quelles prises de position.

 

11. Tout pour Mammon ?

La prophétie de Scott Mac Leod « Missionnaires de miséricorde » (voir l?article sur ce thème sur ChristNetOnline) a tapé dans le mille. Sur les plans personnel et politique, nous sacrifions beaucoup trop aux intérêts de Mammon, sans même nous en rendre compte : nos valeurs, nos familles, nos dimanches, notre amour et notre solidarité. Allons-nous laisser encore plus de marge de man?uvre à Mammon ? Nous sommes appelés à décider qui nous voulons servir, Mammon ou Dieu. En tant que peuple et qu?église, nous avons l’occasion, de mercenaires de Mammon que nous sommes, de devenir des mercenaires de la miséricorde.

 

Les défis auxquels nous sommes confrontés sont de taille. Mais Dieu nous apporte son aide.


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Pour beaucoup, le fait qu’une personne soit d’origine juive suffit à la rendre spéciale. Si l’on vient aussi de Jérusalem, alors les églises et les salles peuvent en être remplies. En tant que Juif, on peut devenir un objet d’admiration religieuse. Tout comme certains adorent l’État d’Israël et le pays presque religieusement.

Jeff Spivak, pasteur d’une congrégation messianique en Israël, a dit un jour : « Dans la situation actuelle de la terre, les chrétiens qui croient en la Bible doivent prendre une position prophétique et finalement renoncer à adorer Israël ».

J’ai remarqué trois domaines problématiques où je sens que la sobriété biblique manque derrière l’amour d’Israël. Après les conséquences fatales de l’antisémitisme et l’horreur de l’Holocauste, nous devrions nous rappeler que dans l’histoire, il n’y a souvent eu qu’un petit mouvement de pendule du philosophe (amitié envers les Juifs) à l’antisémitisme (haine des Juifs), comme on peut le voir dans le réformateur Martin Luther.

Retour au judaïsme

Récemment, un journal chrétien a déclaré qu’Israël, en tant que peuple de l’alliance de Dieu, serait sauvé quelle que soit sa relation avec son Messie, Jésus de Nazareth. La preuve en a été donnée dans Apocalypse 21 ,12, où il est dit que les noms des douze tribus des fils d’Israël sont inscrits dans la Jérusalem céleste à côté des noms des douze apôtres de l’Agneau. L’idée prévaut que Dieu offre deux voies de salut : Premièrement, le chemin pour les Juifs à travers le judaïsme orthodoxe, et deuxièmement, le chemin pour les nations à travers la foi en Jésus ais Sauveur. En cela, tout ce qui est juif est particulièrement vénéré. Mais le salut immédiat des Juifs en Jésus-Christ est caché. Pierre a dit aux rabbins juifs (Actes 4:12) : « Il n’y a de salut en personne d’autre, par qui nous sommes sauvés ». Entre-temps, de nombreux chrétiens se sont convertis au judaïsme parce qu’ils pensent être plus proches de Dieu grâce à lui.

Les moyens d’une fin

La deuxième forme de surestimation d’Israël réside dans une attente égoïste de salut dans laquelle les Juifs ne sont qu’un moyen pour arriver à une fin. En raison du retour des Juifs dispersés dans le pays des pères et du début de l’accomplissement d’Ezéchiel 37, on s’attend de plus en plus à ce que le retour du Seigneur soit imminent. Retroussons nos manches et bénissons Israël afin que le Seigneur revienne et que NOUS soyons bénis. L’aide apportée aux Juifs est admirable, mais il y a un danger que les Juifs deviennent un moyen de parvenir à une fin. Paul et Moïse ont défendu Israël avec une attitude désintéressée.

Culpabilité personnelle

La troisième forme d’amour problématique pour Israël est due à la culpabilité personnelle envers les Juifs. J’ai souvent vécu des moments où il est apparu clairement que les personnes âgées en particulier défendaient les Juifs et Israël en raison d’un énorme sentiment de culpabilité, sans avoir travaillé sur leur propre passé. Ce n’est que par le pardon en Jésus que les blessures intérieures sont guéries, et non par les activités et la répression.

Nous avons besoin d’une sobriété biblique

C’est difficile lorsque les Juifs sont surnaturellement au centre de l’attention. Ensuite, s’ils ne réagissent pas comme ils le devraient, il y a un grand danger qu’ils soient rejetés. C’est pourquoi les Juifs sont souvent sceptiques à l’égard de tout l’amour d’Israël. Dans l’histoire du judaïsme, il y a toujours eu des périodes d’enthousiasme, puis d’oppression, et plus tard d’oppression, et à la fin, il y a eu l’anéantissement. Un amour exagéré d’Israël est souvent caractérisé par une pensée nationaliste israélienne. L’un est largement pro-Israël et contre-Arabe. On ne voit que le collectif et non l’individu. Des déclarations générales sont souvent faites.

 

Nous avons besoin d’une sobriété biblique qui dit ce qui suit :

1. le salut se fait par la foi seule (Actes 4:12). Le salut des Juifs est au nom de Jésus seul (Rom. 10:12-13).

2. il n’y a pas de pardon de la culpabilité vécu personnellement dans l’orthodoxie, quelle que soit la rigueur religieuse de la personne. Le pardon se fait par la foi seule (1 Jean 1:7-9).

3. le Seigneur ressuscité nous a chargé de rendre témoignage de lui à tous les hommes (Rm.10,14).

4. nous vivons par la grâce de la nouvelle alliance. Dieu nous donne la justice par Son sacrifice (Ezéch. 36:2627 ; Esa. 61:10 ; Jr. 31:31).

5) L’importance d’Israël réside dans sa relation avec le Messie. Par conséquent, tout engagement à soutenir et à accompagner Israël et les Juifs n’a de sens que s’il a pour but le retour d’Israël à son Dieu des pères et à son Messie.

 

Jurek Schulz

De : Témoignage messianique. AMZI ? Groupe de travail pour le témoignage messianique sur Israël. Reinach : Juillet/août 2003. www.amzi.org

~ 16 min

Dans le 19ème chapitre du prophète Isaïe, Dieu a promis de faire du Moyen-Orient un centre de bénédiction. La stratégie qu’il utilise pour ce faire est le sujet de cet enseignement, le troisième volet de « L’Islam et ses relations avec Israël et la Communauté ».

La situation au Moyen-Orient et les relations entre Juifs et Arabes sont devenues aujourd’hui l’incarnation de l’inconciliabilité, de la haine et de la violence à cause du conflit israélo-palestinien. Dans le monde entier, il y a souvent beaucoup plus de sang qui coule dans des centaines de conflits et d’affrontements violents. Mais le conflit du Moyen-Orient est devenu pour le monde le conflit qui émeut tous les esprits ; et chacun, qu’on le lui demande ou non, se sent obligé de prendre position. Ce conflit a déjà poussé de nombreux mouvements de paix israéliens, arabes et internationaux, des chefs de gouvernement, des politiciens et d’autres médiateurs à la limite de leurs pouvoirs, de leurs capacités et de leurs possibilités ; malheureusement, sans résultats durables. Le seul à avoir obtenu un certain succès grâce à un geste incroyablement courageux l’a payé de sa vie : l’ancien président égyptien Sadate a fait la paix avec Israël en 1979 et a été tué par son propre peuple. Son succès s’est fait sentir au fil des ans.

Selon un sondage en France, l’Irak est actuellement considéré comme la plus grande menace pour la paix mondiale et Israël comme la seconde. On dit que le conflit au Moyen-Orient a le potentiel de faire exploser le monde entier. Ce n’est pas vraiment parce qu’Israël et l’Irak possèdent respectivement des armes nucléaires et chimiques, mais parce que des pays comme l’Inde et le Pakistan en possèdent aussi. Et leur haine mutuelle n’est pas plus mesquine que celle qui existe entre les Juifs et les Arabes. La gestion du conflit au Moyen-Orient en termes d’engagement personnel et émotionnel des individus ainsi que de la communauté mondiale est unique. Les Européens de l’Ouest et de l’Est, les Américains, les Asiatiques et les Africains dansent autour de ce conflit sur diverses scènes politiques, en essayant de se surpasser les uns les autres pour proposer des solutions, sans qu’aucune solution proposée ne se soit encore imposée.

La pierre d’achoppement de Jérusalem

Toute réconciliation, toute initiative de paix est brisée par le fait que tant le peuple juif que l’Islam relient leur identité, leur foyer et leur héritage à Jérusalem, et plus précisément au Mont du Temple, lieu de la révélation de Dieu. Il est impossible pour les juifs et les musulmans de céder ce lieu pour changer sans se rendre. Jérusalem est pour les musulmans non seulement, comme beaucoup le pensent en Occident, la troisième ville sainte. Seules quelques raisons sont données ci-dessous.

Environ 18 ans après l’établissement de l’Islam à Médine, Jérusalem a été prise sous le calife Omar, le successeur de Muhammad. L’évêque de Jérusalem de l’époque, le patriarche Sophoronius, a donné le Mont du Temple à Omar comme site pour la construction d’un lieu de culte musulman (mosquée). À cette époque, le Mont du Temple avait été transformé en décharge par les chrétiens pour représenter la doctrine répandue du rejet du peuple juif par une profanation délibérée de leurs lieux saints. Omar a fait nettoyer le Mont du Temple et a construit la mosquée d’Axas en référence à la sourate 17, qui stipule que Mohammed a chevauché une nuit sur son cheval ailé (AI Burak) jusqu’au « lieu de prière éloigné » (AI Aksa) et que de là, il a été enlevé au ciel pour être installé par tous les prophètes comme leur tête. Cela ne pouvait pas se produire à Médine ou à La Mecque, car seule Jérusalem était la ville des prophètes. C’est pourquoi les premiers musulmans se sont penchés vers Jérusalem, et non vers La Mecque, pour prier. L’orientation ultérieure vers La Mecque devait être approuvée et justifiée dans le Coran par une révélation spéciale ; il s’agissait en fait d’une manoeuvre politique visant à faire passer La Mecque, qui avait été le centre du pouvoir en Arabie préislamique, sous la domination de l’Islam.

L’importance de Jérusalem pour l’Islam et le Judaïsme

Jérusalem, cependant, joue un rôle central pour les événements islamiques des derniers jours. Pour l’Islam, Jérusalem est la ville des prophètes et de la révélation de Dieu. Ce n’est pas un hasard si c’est la seule ville du monde islamique qui s’appelle « Al Quds », le Saint. Celui qui la possède appartient aux successeurs du Prophète, aux élus de Dieu, aux orthodoxes, au peuple à qui Dieu a confié sa domination sur ce monde. Pour le peuple juif, Jérusalem signifie simplement le centre, l’origine et l’accomplissement de son identité et de son destin en tant que peuple et nation. C’est pourquoi, depuis deux mille ans, à la fin de la Pâque, tous les Juifs ont toujours exprimé leur désir dans le souhait et la prière : « L’année prochaine à Jérusalem ». Lorsque je parle de Jérusalem, je parle du Mont du Temple, le lieu sur lequel se trouvait le Temple de Salomon, lors de la dédicace duquel le Dieu d’Israël est descendu dans Sa sainteté et a sanctifié le lieu pour toujours, déclarant : « Mon cœur habitera en ce lieu pour toujours » (1 Rois 8:10-11, et 9:3). Israël est appelé à vivre en présence de son Dieu et à être un peuple de prêtres pour Lui et une lumière pour les nations. Elle ne peut trouver le repos, la paix et l’accomplissement de son destin autrement qu’en retournant à la présence de Dieu, par « Aliya » (= monter ; en hébreu moderne le mot pour l’immigration des Juifs en Israël), c’est-à-dire en montant au temple, sur la montagne du temple, en présence de Dieu. Dieu a lié l’appel et l’héritage d’Israël à cette terre et spécifiquement à cet endroit.

La vocation d’Israël

La vocation d’Israël est de vivre dans et par la révélation de Dieu, d’en témoigner au monde ; d’apporter la lumière aux nations depuis la présence de Celui qui est la lumière du monde : « Lève-toi, deviens lumière ! Car ta lumière vient, et la gloire du Seigneur brille sur toi. Car voici, les ténèbres couvrent la terre, et l’obscurité les peuples ; mais sur vous l’Éternel brille, et sa gloire paraît au-dessus de vous, et les peuples affluent vers votre lumière, et les rois vers la splendeur qui brille sur vous » (Ésaïe 60:1-3). Même si une grande partie du peuple juif et de l’Etat d’Israël aujourd’hui n’ont pas encore pénétré dans cette lumière, ne sont pas encore entrés dans la présence de Dieu qui leur a été promise, Dieu est néanmoins à l’oeuvre pour restaurer Israël en tant que peuple et nation, pour l’introduire dans Son héritage, afin qu’en lui et à travers lui Sa gloire soit révélée et Son nom sanctifié parmi les nations.

Mais il ne s’agit pas d’Israël en soi, mais d’Israël par rapport à la gloire de Dieu et au salut des nations (Ez. 36:31-38). Mais Israël ne peut répondre à sa vocation que dans le lieu et la terre que Dieu lui a assignés. La terre et les gens sont tellement liés entre eux selon la Parole de Dieu que l’état de dispersion, de vie en dehors de la terre d’Israël, est un état de jugement et d’éloignement de Dieu pour le peuple d’Israël. Si le peuple juif ne veut pas perdre et abandonner son identité et son destin en tant que peuple – et il n’est un peuple qu’en tant que peuple de Dieu – il doit retourner en Israël, à Sion, à Jérusalem. Car c’est seulement là que Dieu rencontrera son peuple en tant que peuple : « …. .et ils regarderont celui qu’ils ont percé » (Zach.12:10).

Les racines du conflit au Moyen-Orient

C’est là que se trouvent les racines insolubles du conflit au Moyen-Orient. Les nations, et souvent certains des dirigeants israéliens eux-mêmes, considèrent le conflit comme un problème politique, ethnique, humain et culturel qui pourrait être résolu par des solutions et des compromis raisonnables. Ce faisant, cependant, ils font l’expérience du caractère sisyphe de leurs efforts sans se rendre compte qu’il s’agit de plus que de la lutte de deux peuples pour le même espace de vie, pour les droits historiques et l’indépendance. C’est la lutte pour l’identité et le destin, la lutte pour l’élection et l’héritage. Aussi centrale que soit Jérusalem pour le peuple juif et l’accomplissement de la promesse biblique, elle l’est aussi pour l’Islam, qui confesse et soutient sans équivoque que Dieu a donné à la communauté islamique la dignité et l’appel nécessaires à la révélation finale et définitive de la vérité pour amener le monde sous la domination de l’Islam. Jérusalem, la ville des prophètes, est un symbole imparable de la domination islamique. Pour l’Islam, il n’y a pas de plus grande remise en cause de son identité et de sa règle que de savoir que cette ville est aux mains des Juifs, qui, selon le Coran et la tradition islamique, sont considérés comme un peuple rejeté sous la malédiction de Dieu. La domination sur le Mont du Temple est un symbole et une légitimation pour se connaître en tant que peuple élu de Dieu et pour être ses témoins appelés par lui. Selon le Coran, il ne fait aucun doute que cette élection d’Abraham et d’Ismaël s’adresse aux musulmans, et avant tout au seul peuple arabe. La réconciliation avec les non musulmans n’existe pas.

La vue de la Bible

La vision de la Bible est différente. Selon Ésaïe 19:24-25, Dieu promet par ses prophètes qu’un jour viendra où il purifiera l’Égypte, l’Assyrie (l’Assyrie englobait alors ce qui est maintenant le monde arabe du Moyen-Orient), et Israël par son jugement, brisera leur orgueil, les réconciliera les uns avec les autres, et les liera ensemble pour en faire une bénédiction sur la terre. Dieu a promis l’inimaginable, à savoir que des pays comme la Syrie, l’Irak, l’Arabie saoudite et l’Égypte concluront un jour une alliance avec Israël qui deviendra un genre non seulement pour eux-mêmes mais pour le monde entier. Et Dieu ne fait pas de vaines paroles ! Le Deutéronome 23:19 dit : « Dieu n’est pas un homme pour mentir, ni un fils d’homme pour se repentir. Doit-il bien parler, et ne pas le faire ; doit-il déclarer, et ne pas exécuter » ? La promesse de Dieu de faire du Moyen-Orient un centre de bénédiction est liée à la fidélité de Dieu à Abraham. Les peuples arabes, en tant que descendants d’Ismaël, le fils d’Abraham selon la chair, sont promis à la bénédiction pour l’amour d’Abraham (Genèse 21:13-20). La bénédiction signifie toujours la plénitude de la vie, la fécondité dans tous les domaines de la vie, la paix, la liberté, le salut. L’Égypte n’était pas seulement la maison des esclaves d’Israël, pour laquelle ils ont subi un jugement, mais aussi un lieu de refuge pour Abraham, Joseph, Jacob et surtout pour le Messie lui-même. Sans oublier que Pharaon s’est laissé bénir par Jacob au temps de Joseph ; une attitude d’humilité pour laquelle Dieu, malgré tous les jugements, inclut l’Egypte dans la vocation particulière des descendants d’Abraham. C’est notamment l’une des raisons pour lesquelles l’Égypte, en tant que peuple et nation, est l’un des rares peuples, en dehors d’Israël, qui existe depuis les temps anciens : précisément parce que Dieu a encore une utilité pour l’Égypte dans son histoire du salut. N’est-il pas étonnant et, au sens propre du terme, étrange que ces mêmes peuples, destinés à être ensemble un centre de bénédiction, soient aujourd’hui non seulement connus de tous, mais – bien qu’à l’heure actuelle de manière négative « sont dans la bouche de tous » !

Rébellion contre Dieu

Dieu se prépare à réaliser ses promesses et ses plans. Une des conséquences de la rébellion contre le Dieu de la Bible est la haine, la violence et les ténèbres qui caractérisent aujourd’hui les relations de ces peuples et qui font de Jérusalem, la ville de la paix et du salut (la ville du grand Roi, c’est-à-dire du Messie, comme l’appelle Jésus), une ville d’horreur, de terreur, d’antagonismes inconciliables et de haine. La rébellion est basée sur une profonde méfiance envers Dieu, car ils ne le comprennent pas et ne croient pas qu’il s’est fixé comme but la rédemption et le salut de toutes les nations. Is. 2, 2-5 : « Viens, montons à la montagne de l’Eternel, à la maison du Dieu de Jacob. Il nous enseignera ses voies, et nous marcherons dans ses sentiers, car de Sion sortira la loi et la parole de l’Éternel, de Jérusalem, et il jugera entre les peuples et sera l’arbitre de nombreuses nations. Ils marteleront leurs épées en socs de charrues … Jamais plus une nation ne prendra l’épée contre une autre nation… »

La stratégie de Dieu

Dieu a choisi une stratégie qui seule est capable de créer le salut et la rédemption ; une stratégie qui doit briser tout orgueil, car elle signifie une incroyable dégradation et humiliation pour Dieu lui-même. Il s’est choisi un peuple au cou raide, fier et ingrat, et lui a associé son nom pour toujours en tant que « Dieu d’Israël ». Il s’est donné à eux et a remis son nom entre leurs mains, s’est révélé à eux, a montré sa gloire, et a planté sa tente au milieu d’eux. Il a supporté qu’ils aient, de manière innombrable, abusé de son nom et l’aient traîné dans la boue. Il est vrai qu’il les a châtiés par des jugements sévères et les a dispersés parmi toutes les nations ; cependant, il ne s’est jamais séparé d’eux, ne les a jamais rejetés, n’a jamais retiré ses plans pour en faire la lumière des nations, ses témoins (Ésaïe 43:10 ; 44:8). Il est même devenu une partie de ce peuple dans l’incarnation du Messie, le Fils unique du Père. Ésaïe 9:6 : « Car un Fils nous est donné, un Enfant nous est donné, et on l’appellera Conseiller merveilleux, Prince de la paix, Dieu fort, Père éternel, et le gouvernement sera sur ses épaules… » Jn. 3, 18 : « Dieu que personne n’a jamais vu. Le Fils unique, qui est au sein du Père, a apporté une nouvelle ». Il est devenu la malédiction pour prendre sur lui toute l’obscurité de la création, pour la détruire sur la croix, afin que, par la résurrection, par le dépassement de la mort, la lumière, la grâce et la vérité puissent percer et être apportées aux nations par ce peuple appelé. Ainsi s’accomplit la promesse du prophète Jérémie : « Les païens viendront à toi en disant L’héritage de nos pères n’était que mensonges… » (16, 19). La parole du prophète Ésaïe s’accomplira également de cette manière : « Le Seigneur Dieu, Yahvé des armées, préparera sur cette montagne un banquet nourrissant pour tous les peuples » …. Sur cette montagne, il enlève la couverture qui est sur toutes les nations, et la couverture qui est étendue sur tous les païens. Il détruit la mort pour toujours. Et l’Eternel essuie les larmes de toute face, et enlève l’opprobre de son peuple (Israël) de devant toute la terre » (25:6-9). Ce que dit le prophète Zacharie s’accomplira : « En ces jours-là, dix hommes de toute langue et de toute nation prendront un Judéen par la queue de cheval et lui diront : « Nous irons avec toi, car nous avons appris que Dieu est avec toi » (8:23).

Briser l’Islam

La stratégie de Dieu brisera l’orgueil de l’Islam et des peuples arabes qui comptent sur la puissance et la force de l’épée pour usurper la domination, le prestige et la première place. Ils appellent la Parole de Dieu de l’Ancien et du Nouveau Testament une contrefaçon et un mensonge, et mettent à sa place leur propre croyance religieuse qui sert leur fierté et leur honneur. La fierté et la puissance de l’Islam et des nations arabes doivent être brisées afin que les peuples arabes puissent faire l’expérience de la promesse de Jérémie 16 : « L’héritage de nos pères n’est que mensonge ». Libérés du mensonge de l’Islam, ils seront libres de se joindre à Israël dans la bénédiction promise et deviendront ainsi une bénédiction pour le monde. L’obtention de la bénédiction promise n’est possible que pour les peuples arabes et l’Égypte aux côtés d’Israël. Ils doivent s’incliner sous la main puissante du Dieu d’Israël et reconnaître humblement que Dieu n’a jamais rejeté le peuple juif. Au contraire, Il leur a promis des centaines de fois par Ses prophètes de les rassembler à nouveau, après un temps de jugement et de dispersion de toutes les nations, dans la terre qui leur a été promise comme leur appartenant depuis Abraham. Pour entrer dans leur vocation, les peuples arabe et égyptien doivent accepter que Dieu rétablisse les Juifs en tant que nation après deux mille ans sur la terre d’Israël, afin d’avoir besoin d’eux comme vaisseau et ambassadeur dans Son histoire de salut de fin-des-temps.

Les descendants d’Ismaël sont énumérés dans Ésaïe 60:1-7 comme étant les premiers parmi les nations à monter à Jérusalem pour rendre hommage au Messie : Kedar, Nebaioth, Midian…. Le Messie auquel ils rendront hommage est un Messie et un roi juif. Il est né en tant que Messie et Roi juif, est mort en tant que Messie et Roi juif, et reviendra en tant que Messie et Roi juif pour régner sur une Jérusalem qui est la capitale du peuple juif ; car il est la lumière qui illuminera le peuple juif et qu’il mènera « jusqu’aux extrémités de la terre ».

Israël doit s’humilier

Dieu résiste aux orgueilleux, mais fait grâce aux humbles. Toute forme d’orgueil devra se briser contre l’humilité du Dieu d’Israël. Mais l’orgueil du peuple juif doit aussi se briser contre la stratégie de Dieu. Elle devra se rendre compte qu’elle ne peut pas s’approprier la terre promise, la terre des pères, en vertu de ses propres capacités, de sa force ou de ses acquis religieux. Israël n’a pas le droit d’usurper la terre, ni de la donner, car c’est la terre de Dieu, une terre sur laquelle repose l’œil de Dieu (Dt 11, 10-14). Il est donné à Israël par Dieu comme un cadeau, un cadeau de mariage, un lieu pour le rencontrer. Ce n’est pas par l’armée ou la force, mais par l’Esprit de Dieu, que la terre et le peuple sont restaurés (Zacharie 5:6). Humanisme juif, religiosité juive, raison juive, l’armée israélienne doit s’incliner et confesser : « Si le Seigneur ne bâtit la ville, les ouvriers travaillent en vain » (ps. 127). Israël se rendra compte que ni lui ni ses puissants alliés ne peuvent créer et garantir la paix et la sécurité sur cette terre, mais qu’il ne peut que se tourner vers le seul qui soit capable d’apporter la paix sur cette terre parce que c’est SA terre et lui demander de l’aide. Lorsqu’il intervient, il ne prend pas parti et ne se soucie pas des droits historiques ou de la fierté nationale. Il offrira un espace de vie, la paix et la liberté pour tous, mais à ses conditions.

La fierté des nations

Dans la stratégie de Dieu, cependant, l’orgueil des nations sera également brisé. Le Psaume 2 dit que les puissants du monde se rebellent contre le Dieu d’Israël et son oint. À ces puissants, Dieu tend la main à travers les personnes qu’ils ont haïes, méprisées, rejetées, persécutées et tuées tout au long des millénaires. Le peuple d’Israël, qui est devenu l’incarnation du maudit et qu’on appelait le lépreux et les balayeurs du monde, devient porteur de bonnes nouvelles, de vie, en tant que serviteur du Tout-Puissant. Recevoir et honorer ce peuple comme ceux qui indiquent le chemin vers Celui qui est la lumière du monde brisera l’orgueil des nations. Les nations devront confesser : « Laissez-nous aller avec vous, car Dieu est avec vous » (Zacharie 8:23). De même qu’Israël apprend à aimer et à honorer Jésus, qu’elle a haï, méprisé et persécuté, lorsqu’elle le reconnaît comme Celui qui a été transpercé, de même les nations apprendront à aimer et à honorer Israël.

L’Église

Mais même l’orgueil de l’église devra être brisé par la stratégie de Dieu. Combien de fois l’Eglise a-t-elle mal jugé la nature de Dieu et cru que le peuple juif était abandonné par Dieu, déshérité et destiné à l’insignifiance, sinon au jugement ! Et si Dieu était inconstant et imprévisible dans ses promesses et ses appels ! « Car les appels de Dieu ne peuvent le faire regretter ! » (Rom. 11:29) Sans l’appel d’Israël, l’Eglise n’existerait pas, et sans la restauration d’Israël et sa libération dans son appel, la grande moisson pour le Royaume de Dieu ne sera pas récoltée (Zacharie 8:23 ; Esaïe 25). L’Église est appelée à partager la vocation du peuple juif ; mais elle ne peut pas se substituer au peuple d’Israël. Selon Eph. 2:19, elle est membre et participante et non pas la seule propriétaire du salut et de l’appel. La fécondité de l’église dépend de son unité, de son lien et de ses points communs avec le frère aîné, premier appelé et premier né. Devant le monde entier, l’Église doit à nouveau confesser : « Mon Seigneur et Messie Jésus est le Roi des Juifs, et les Juifs sont mon peuple. Nous leur appartenons en tant qu’église, et leur vie et leur histoire nous concernent directement ». Comme la Ruth de la Bible, l’église devra confesser : « Ton Dieu est mon Dieu, et ton peuple est mon peuple. Où tu iras, j’irai ; où tu resteras, je resterai » (Ruth 1:16). Si l’Eglise n’est pas prête à partager et à soutenir les vitupérations, les persécutions et les haines qui affligent encore le peuple juif, elle ne pourra pas partager la fécondité, l’autorité et la puissance que Dieu a promises à Israël. Avec Paul, nous pourrions dire : « Ce que l’Eglise a vécu jusqu’à présent en termes d’autorité et de pouvoir ne vaut guère la peine d’être mentionné par rapport à ce qui sera le cas lorsque Dieu libérera Israël dans son appel » (Rom. 11:15). L’église doit s’incliner sous la main puissante de Dieu afin qu’il l’exalte en son temps et selon ses conditions. L’Église deviendra une étrangère, elle-même méprisée, persécutée et détestée, si elle confesse que son Messie Jésus est le Roi des Juifs et que le peuple juif est Son peuple. Mais c’est ainsi qu’elle pourra entrer dans la plénitude de son héritage.

Le monde entier est concerné

Le conflit du Moyen-Orient ne touche pas seulement les Arabes et les Juifs, mais le monde entier, car la restauration d’Israël n’est pas le résultat d’une action humaine mais divine – même lorsque Dieu utilise des personnes et des institutions, comme l’ONU en 1948. Le fait que son action, qui a le salut du monde en vue, se heurte à tant de résistance de la part du peuple juif ainsi que du monde non juif et de l’Église, est la raison de beaucoup de souffrance et de détresse. Par son action avec et envers Israël, Dieu manifeste l’attitude du coeur du peuple juif et du monde païen envers lui et sa Parole. Tôt ou tard, chacun est obligé de prendre position sur ce qui est normatif et donc qui fait autorité pour lui : la parole biblique ou sa propre vision, humaine ou religieuse. Le Dieu de l’ancienne et de la nouvelle alliance offre la vie, la paix et le salut en Jésus au peuple juif et au monde entier. Rejeter ou même combattre cette offre a ses conséquences. Si le Dieu de la bible est la vie et l’amour seuls – et il l’est ! – une vie sans lui ne peut que se terminer dans la misère et la mort.

 

Marcel Rebiai

2002 COR-GDV, Gossau ZH.


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Un Homme rationnel qui maximise son profit

Les penseurs libéraux définissent l’humain comme un être rationnel qui tend à maximiser son profit sur le marché. Par la recherche de l’efficience, il cherche à optimiser le rapport entre les résultats1 et l’effort2 fourni. Son comportement ne serait pas déterminé selon des valeurs définies au préalable mais en fonctions des moyens3  lui permettant une maximisation du profit.

Nous rétorquons tout d’abord à ce postulat d’un homme très rationnel, que d’autres facteurs influencent le comportement économique des acteurs : valeurs socioculturelles, goûts personnels, etc. La Bible s’étend également davantage sur le sujet : son être humain est plus complexe et réel qu’un homo oeconomicus simpliste et uniforme. L’Homme est pécheur et on retrouve en lui des tendances contradictoires comme dans le mythe de l’attelage de Platon, où s’affrontent deux volontés contradictoires de tantôt faire le bien tantôt le mal. C’est que  la Bible nomme  lutte entre chair et esprit4. L’Homme doit combattre la chair et la déposer au pied de la Croix chaque jour. Il lui faut ainsi reconnaître ses erreurs et se repentir, attitude qui n’est absolument pas mentionnée par l’anthropologie néo-libérale. En d’autres termes, nous sommes appelés à rester prudents et autocritiques. En tant que chrétiens régénérés5 par l’Esprit Saint, nos priorités spirituelles doivent primer sur le matérialisme de la chair. L’anthropologie libérale est donc trop simpliste – mono causale- voire utopique, puisqu’elle ne prend pas en compte les dysfonctionnements et transgressions du comportement humain. Elle donne également une vision très pessimiste de l’Homme, car sa motivation principale est de faire du profit sans s’occuper du reste. L’Homme est certes pécheur et égoïste, mais cela ne l’empêche nullement de favoriser des œuvres caritatives ou de vouloir p. ex. devenir moine ou de rechercher des vocations à but non lucratif (infirmier, assistant social, pasteur, syndicaliste, etc ). Cela devient encore plus dangereux quand certains auteurs comme Friedmann affirment que maximiser son profit devient une morale en soi. Cela montre bien que la théorie néo-libérale a des prétentions plus que scientifiques, puisque nous entrons dans le domaine de l’éthique et de la théologie. En essayant d’étendre cela à tous les domaines, cela ressemble à une volonté de domination totalitaire. D’ailleurs, on peut se demander comment il est possible d’appliquer cette idée à la fonction publique. Aimerions-nous avoir un Etat où il est moral que les fonctionnaires maximisent leur profit au lieu d’appliquer les lois ?

A cela, j’aimerais encore ajouter qu’il faut premièrement mentionner qu’il existe deux conceptions se rapportant à l’idée de profit. Le profit peut être simplement ce qu’il reste lorsque l’on soustrait les dépenses aux recettes et que ce solde est positif, mais il y a également la notion dite de surprofit définie de façon relative aux gains effectués par des acteurs économiques sur un marché. En effet on dit qu’il y a surprofit quand par exemple une entreprise réalise un profit de plus de 20%, alors qu’il est plutôt courrant que celui-ci se situe par exemple en dessous des 10%. Deuxièmement, rappelons également que les entrepreneurs n’ont pas toujours cherché uniquement à maximiser leur profit lors de la période industrielle. Certains ont utilisé ces gains à des fins idéologiques et politiques. Les succès notamment de Henry Ford ou de Frederick Winslow Taylor les ont incités à mieux encadrer leurs employés en leur proposant des cours, un logement et « une éducation aux bonnes mœurs »6. Ces mesures, motivées par des buts non pécuniaires, s’opposaient bien souvent à une simple idée de maximisation du profit. On perçoit d’ailleurs à travers elles la prise en compte du long terme dans la gestion de l’entreprise.

L’acteur économique ne maximise donc pas simplement son profit, mais y ajoute ses valeurs et représentations idéologiques, ce qui ouvre clairement la voie à une discussion éthique et spirituelle, en particulier en ce qui a trait à la problématique du long terme et de la stabilisation dans le domaine économique. L’homme chrétien devrait donc faire primer les valeurs spirituelles sur le matérialisme et l’égoïsme. Il devrait donc se laisser diriger par l’Esprit Saint et non par ses besoins matériels et faire un choix éthique dans la façon de dépenser son argent.

L’homme seul et autonome

Un deuxième aspect de cette théorie libérale est que l’homme serait seul et indépendant dans la gestion de son existence. Il ne dépendrait donc de personne. Cette idée d’autonomie se retrouve dans la manière dont les libéraux définissent le concept de solidarité. En effet, l’individu dans le besoin serait tout d’abord aidé par sa famille, par ses proches, puis par son village, l’État ne devant intervenir qu’en dernier recours. Nous avons donc à faire à un ensemble d’individus isolés, reliés par un lien social extrêmement ténu, comme si ce lien était jugé secondaire, voire mauvais. Malgré cette idée de solidarité qui peut apparaître comme tout à fait légitime et séduisante pour certains, le message caché de ce discours est en fait un rejet de ce qui est collectif comme par exemple le bien commun ou l’unité de la société. Pourquoi devrait-on définir la société en commençant seulement par l’individu ? Est-il vraiment possible de construire une société en faisant la simple addition d’individus isolés, aux relations réduites et contingentes ? Que fait-on de tous les phénomènes collectifs notoires (mode, construction d’une identité collective où le « je » se définit par rapport au « nous », etc.) ? Cette vision dévoile l’illusion que l’Homme se suffit à lui-même et n’a pas besoin de Dieu. Cela rappelle un peu l’utopie de Nietzsche du « surhomme » orgueilleux et débarrassé aussi de tout « carcan moral ».

En revanche, la Bible, tout en respectant – et défendant – la sphère personnelle de chacun7, replace l’homme dans un cadre collectif. L’humain reste, avant tout, en relation avec Dieu8 et ses semblables. Le chrétien est appelé à vivre en bons termes au sein de l’Eglise9 qui est le corps de Christ.. Celle-ci n’est pas uniforme, mais cohérente et unie par un lien d’amour et de solidarité10. Dieu n’a donc pas créé l’Homme pour vivre isolé – et pour glorifier cet état de fait – mais bien au contraire pour être en relation avec Dieu et le reste de l’humanité. Cette perception atomiste11 que soutiennent les libéraux ne correspond donc ni à la réalité sociale ni à une conception biblique.

L’anthropocentrisme libéral

Toujours selon les libéraux, l’Homme serait au centre du monde et souverain sur toute la création. Il déciderait librement et de manière indépendante de son comportement. Il est vrai que Dieu lui a demandé, lors de la Genèse, de nommer12les animaux dans le jardin d’Eden et à dominer sur eux13. Mais cette domination n’implique pas automatiquement un anthropocentrisme, car la bible demande en retour, une responsabilité face à Dieu. En outre, l’anthropocentrisme libéral ne tient pas compte du péché de l’être humain. La Bible affirme que l’homme est, lui aussi, soumis à des réalités et des limites spirituelles14, morales et physiques. Cette reconnaissance, qui contribue à limiter sa marge de manœuvre, devrait donc l’inciter à plus d’humilité, notamment en ce qui concerne la façon dont il traite la création.

Contrairement donc à ce que prétendent les libéraux, l’Homme ne se situe pas au centre de la Création. Il pâtit de sa nature pécheresse ; il dépend de son environnement et de ses relations avec autrui. Si ce postulat d’anthropocentrisme paraît, à bien des égards, optimiste et contribuer à renforcer la dignité de l’individu, il reflète également l’orgueil humain face à son entourage. Or, la Bible rappelle à ce propos, que l’orgueil précède bien souvent le désastre.15

L’Homme parfaitement responsable de soi

Enfin, l’être humain serait tout à fait à même de prendre soin de lui. Ce postulat de responsabilité personnelle est souvent utilisé afin de restreindre les politiques sociales. Celles-ci seraient, toujours selon cette idée, inutiles et rendraient l’individu dépendant de l’Etat. On retrouve à nouveau, derrière cette conception, la description d’un homme seul et idéalisé. La Bible rappelle pourtant que nous subissons notre nature pécheresse16 qui incite aux comportements irresponsables comme prendre la volant en ayant bu ou fumer en sachant que cela provoque le cancer. Quels beaux exemples de responsabilité de soi-même ! Pour pouvoir y faire face, il nous faut être renouvelés par le Saint-Esprit. Ce concept de responsabilité personnelle est aussi critiquable en ce qu’il laisse entendre qu’aider l’autre – et être aidé par l’autre – serait superflu, ce qui porte un coup dur à la solidarité, ceci d’autant plus que le nouveau testament parle  de la vocation de la diaconie dont un des aspects est aussi de s’occuper des faibles de notre société comme les malades, veuves, orphelins17, etc. Avec cette vision néo-libérale, on nous propose au contraire un Homme sauvage, à très court terme et fataliste puisque ce sont les mécanismes de marché qui régissent l’économie, alors qu’il est toujours possible d’infléchir le cours de l’économie par des décisions humaines aussi bien niveau des lois, de la monnaie que du coté des entreprises.

En considérant de façon plus générale tous les aspects mentionnés ci-dessus, on peut encore remarquer une sorte de « vide intérieur » dans la façon de concevoir l’être humain. En effet celui-ci est décrit comme tellement libre avec un « réduit sacré » intérieur dans lequel la collectivité, le contexte culturel et d’autres liens n’auraient accès. Comme ceci semble acceptable et légitime, il peut jaillir quasiment n’importe quoi de cette sorte de « boîte noire », ce qui peut être extrêmement dangereux, puisqu’il y n’a pas de limitation morale à cela. Ceci va évidemment contre la réalité, car chaque personne a une histoire et une personnalité propre et est conditionnée par son environnement. L’autre danger sous-jacent que nous pouvons voir est que c’est une vision aussi très uniforme de l’individu qui rappelle les régimes totalitaires stalinien et hitlérien où l’individu est enfermé dans la masse prolétarienne ou raciale sans distinction. Ici il est plutôt enfermé dans le marché où il agit avec la même rationalité, la même autonomie, responsabilité de soi, etc.

Or, en lisant la Bible, nous pouvons remarquer que l’Homme n’est pas conçu de façon vide et uniforme. Dieu entretient une relation toute particulière avec les êtres humains, chacun d’entre eux étant unique, avec en revanche un souci de justice et d’égalité de traitement puisque « Dieu ne fait pas de considération de personnes »18. La conception biblique est donc plus complexe que la théorie libérale, et ce, malgré les prétentions scientifiques de cette dernière. L’Homme biblique se rapproche bien davantage de la réalité quotidienne puisque ce Livre prend en compte tous les aspects de sa philosophie et de son comportement et met aussi en évidence ses paradoxes et contradictions.

Thomas Tichy, politologue, 2004.

 


1.  Ou les gains recherchés.

2. Ou le coût attribué.

3. Raison instrumentale appelée aussi „Zweckrationalität“ chez Max Weber.

4. Rm. 7: 18. ; Gal. 5: 16-18, Mt. 26: 41.

5. Nés de nouveau, Tite 3:5-7. Jn. 3 : 3. L’idée de naître de nouveau pourrait se résumer courtement par le fait de recevoir Dieu dans sa vie par le Saint-Esprit. Cela implique que l’on reçoit une nouvelle identité. On est en Dieu et on ne fonde plus sa vie sur son éducation, son origine sociale, etc. C’est de cette façon qu’on est libéré par Dieu de la domination par le péché.

6. Paternalisme.

7. Jésus nous exhorte, par exemple, à avoir une relation personnelle avec Dieu. Mt. 6: 5-6.

8. Le péché limite, malheureusement, cette relation. Se référer aussi à l’idée d’alliance dans l’Ancien et le Nouveau Testament.

9. Ici, il ne s’agit pas de l’Église au sens institutionnel ou organisationnel, mais de „l’Église universelle“ qui est simplement l’ensemble des chrétiens libres de s’organiser comme ils l’entendent avec une forte hiérarchie ou pas.

10. Si un membre du corps souffre, etc. (1 Co. 12). En ce qui concerne la solidarité, il est impossible de ne pas mentionner qu’elle était très développée dans l’Église primitive où les biens étaient gérés en communs. Ceci n’a pas forcément une valeur obligatoire et prescriptive, mais montre une autre possibilité pour le comportement humain, que l’égoïsme pur que la vision neo-libérale propose de l’Homme.

11. En rapport avec cela, je sais que certains libéraux me tiendront gré de n’avoir pas mentionné Tocqueville. Cet auteur décrit la société américaine et parle du rôle important joué par les associations de citoyens du début du XIXe siècle. Je répondrai à cela que tout d’abord tous les libéraux ne sont pas forcément tocquevilliens et que les associations de citoyens (société civile), sont précédées de la prééminence que l’on fait à l’individu. Rien ne garantit nécessairement que celui-ci forme le projet d’aller vers les autres et de s’associer à eux, car il peut très bien choisir une vie plus solitaire et tournée vers lui-même, puisque l’on postule qu’il est libre.

[^12: Gn. 2: 19-20 et Rom. 7: 14-19.

13.  Gn. 1: 26, 28-30.

14. Gal. 5: 17.

15. Proverbes 16: 18.

16. Romains 7: 14-19.

17. 1. Tm. 5: 4, Ac. 6: 1.

18. Ex: Col. 3: 25

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C’est un désir primordial de l’homme de pouvoir vivre dans un monde idéal. En conséquence, de nombreuses personnes et idéologies ont promis à l’humanité le paradis sur terre – et ont apporté l’enfer. Il suffit de penser à des gens comme Staline, Hitler ou Mao. L’aspiration à un monde idéal est cependant donnée par Dieu. Il n’est donc pas surprenant que l’aspiration à un monde de justice et de paix se retrouve également dans la Bible et fasse partie intégrante de l’espérance prophétique de l’Ancien Testament.

1 Les prophètes de l’Ancien Testament

Les prophètes de l’Ancien Testament ont annoncé le salut de Dieu sous le couple conceptuel de la paix et de la justice, entre autres choses (par exemple Ésaïe 2:2-4 ; 9:5-6). Les prophètes étaient des visionnaires qui regardaient au-delà de leurs propres périodes sombres et voyaient l’avenir à travers les yeux de Dieu. Ils ne parlaient pas d’eux-mêmes – en ce sens, ils n’étaient pas idéalistes – mais au nom de Dieu et poussés par l’Esprit Saint (2 Pierre 1:21).

L’accomplissement de la vision prophétique exigeait l’obéissance du peuple d’Israël aux commandements de Yahvé. Il l’avait livré d’Égypte et en avait fait sa possession particulière. La tâche propre à Israël était d’être béni par l’obéissance à Dieu, afin de devenir une lumière pour les nations. Mais Israël a échoué. À la fin de l’Ancien Testament, le royaume de Dieu – comme la vision des prophètes a été appelée plus tard – était donc une perspective lointaine.

2 Le Royaume de Dieu dans le Nouveau Testament

Le Nouveau Testament reprend l’espoir des prophètes. Le message du Nouveau Testament est le suivant : En Jésus-Christ, le Fils de Dieu, le royaume de Dieu est enfin arrivé ! Jésus a proclamé : « Le temps est accompli, le royaume de Dieu est à portée de main. Repentez-vous et croyez en l’Évangile ! (Marc 1:15).

Le message de Jésus a suscité des espoirs, mais il a aussi suscité des questions. En Israël, les gens croyaient aux prophètes et attendaient la venue du règne de Dieu. Mais Jésus et ses disciples semblaient ne rien bouger. Il a été noté que Jésus s’est mis à proclamer le royaume de Dieu avec d’anciennes prostituées, des escrocs et de simples campagnards. Pourtant, l’injustice et l’oppression n’ont pas disparu. La question restait posée : où était le royaume de Dieu ?

Jésus a chassé les démons et guéri les maladies, vainquant ainsi Satan et son royaume. En cela, la présence du royaume de Dieu a été démontrée. Un aspect largement oublié est que Jésus pouvait aussi désigner ses disciples et démontrer la présence du royaume de Dieu en eux. Dans la communauté de la racaille rachetée qui a suivi Jésus, le royaume de Dieu avait commencé, car dans cette communauté, les valeurs du royaume de Dieu ont été radicalement mises en pratique. Le royaume de Dieu n’est pas seulement un événement spirituel mais aussi humain et tangible.

Jésus est resté un mystère pour la plupart des Juifs, car on s’attendait généralement à ce que le royaume de Dieu fasse irruption avec puissance. Dans la période entre l’Ancien et le Nouveau Testament, une attente distincte du Messie s’était développée. L’idée générale du Messie – aussi diverse soit-elle – était que le Messie serait un libérateur politique et amènerait le royaume de Dieu en Israël à une prospérité ancienne, similaire au royaume de David et de Salomon. Mais Jésus a enseigné que le royaume de Dieu ne vient pas avec la puissance, mais commence petit comme une graine (Matt. 13:31-32) et est aussi discret qu’un peu de levain (Matt. 13:33). Jésus n’avait pas de programme politique, mais il a proclamé le salut de Dieu aux individus. Cependant, son message était d’une nature si radicale et transformatrice que, s’il était vécu par un groupe de personnes, il pourrait et devrait très bien avoir des implications sociales et politiques.

3 Une communauté du Royaume de Dieu

Une étude attentive des évangiles montre que Jésus a voulu la communauté chrétienne. Il n’a pas seulement proclamé le royaume de Dieu, il a aussi rassemblé les gens qui appartenaient à ce royaume. Il a appelé des individus à le suivre et a commencé à les former en une communauté du royaume de Dieu. La relation entre la communauté chrétienne et le royaume de Dieu est d’une importance fondamentale. L’église est le peuple du royaume de Dieu. Il ne doit pas être assimilé au royaume de Dieu, mais est une démonstration visible de l’entrée du royaume dans l’histoire. En elle, l’espoir des prophètes commence à se réaliser, qui avaient parlé du royaume de Dieu non seulement pour changer les individus, mais aussi pour changer la société.

Ce n’est qu’après que les disciples de Jésus aient été aspergés du Saint-Esprit (Actes 2:1 ss) que la prise de conscience fondamentale qu’ils étaient le peuple du royaume de Dieu s’est imposée. Cette prise de conscience a révolutionné leurs relations. Ils ont commencé à se considérer non seulement comme des individus rachetés, mais également comme une communauté rachetée. Le livre des Actes témoigne avec force de la puissance transformatrice de cette réalisation. La première communauté chrétienne est devenue une alternative attrayante à la structure sociale dominante. On pouvait voir et sentir que le royaume de Dieu était présent dans leur communauté.

4 Les trois valeurs du Royaume pour aujourd’hui

Toute église, si elle prétend être l’église du Christ, doit s’engager à respecter les valeurs du royaume de Dieu. Il doit s’agir d’une communauté du royaume de Dieu au sens le plus vrai du terme.

La première et principale caractéristique de l’église chrétienne doit être l’amour. Jésus a déclaré que l’amour était la priorité absolue (Jean 13:34). Toutefois, il ne faut pas mettre cela sur le même plan que le concept postmoderne de tolérance. Elle est plutôt orientée vers Jésus-Christ lui-même (Jn 13, 35).

Un deuxième royaume de valeur de Dieu est la joie (Gal 5, 22). Jésus a célébré des fêtes de joie avec ses disciples. Il a donc été accusé d’être un glouton et un ivrogne (Lc 7:34). Mais Jésus a simplement réagi différemment à l’oppression politique et aux difficultés économiques que ne l’a fait l’establishment juif. Pendant que ce dernier se plaignait et jeûnait, Jésus célébrait ! Pour lui, comme l’a dit Jürgen Moltmann, le règne de Dieu était comme la joie d’un mariage. Les chrétiens devraient pouvoir faire leur deuil et célébrer parce qu’ils vivent dans la certitude que Dieu a déjà commencé le renouvellement du ciel et de la terre.

La paix est la valeur de Dieu pour un troisième royaume. Esaïe a prévu que grâce à l’enfant qui naîtra, une paix éternelle viendra au peuple (Esaïe 9:5-6). Le Nouveau Testament voit cet enfant de la paix comme étant Jésus-Christ (Luc 2:14). Jésus a loué les artisans de la paix et les a appelés enfants de Dieu (Mt 5,9). Les chrétiens devraient être des artisans de la paix. L’Église est appelée à dépasser les frontières et à vivre la réconciliation dans ses propres rangs.

Lorsque le Nouveau Testament considère l’amour, la joie et la paix comme des valeurs décisives du Royaume, il ne s’agit pas d’une utopie séculaire de salut. Le Nouveau Testament montre clairement que la paix est le résultat de l’action du Saint-Esprit (Gal 5, 22-23), et que la paix n’existe qu’en Jésus-Christ. « Il est notre paix » (Eph 2, 14). Une philosophie de la paix divorcée de la fidélité de disciple au plus grand pacificateur de tous les temps n’est rien d’autre qu’une utopie ; inversement, une foi sans un engagement radical envers le royaume de Dieu n’est rien d’autre qu’une hypocrisie.


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Ne sommes-nous pas toujours préoccupés par l’état de notre société ? Les valeurs fondamentales comme l’honnêteté et la responsabilité sont en déclin. Nos téléviseurs crachent de la violence, des banalités et des obscénités. Nous vivons dans un monde de griefs.

Dans le Sermon sur la Montagne, Jésus a dit que ses disciples pouvaient et devaient faire quelque chose contre les maux.

Pour ce faire, il a utilisé l’image du sel et de la lumière. Vous êtes le sel de la terre… vous êtes la lumière du monde », dit-il à ses disciples (Mt 5, 13-16). Le sel était utilisé pour conserver les aliments. Le sel a un pouvoir de conservation. Jésus a appliqué ce simple fait à nos vies. Il voulait que ses disciples soient comme le sel pour le monde ; ils devaient avoir une influence préservatrice sur ceux qui les entouraient tout au long de leur vie. Le mot figuratif de lumière est similaire. Lorsqu’il n’y avait pas d’électricité, la ménagère a allumé une lampe à pétrole alors qu’il faisait nuit. Elle l’a placé au milieu de la pièce sur un endroit surélevé afin que la flamme puisse répandre sa lumière dans toute la pièce. Jésus voulait que ses disciples soient de telles lumières dans les ténèbres. L’obscurité est ici synonyme d’impiété et de désorientation. Les disciples du Christ doivent apporter la lumière dans l’obscurité de leur environnement et donner une orientation.

Comment les chrétiens peuvent-ils être sel et lumière et contribuer au renouvellement de la société ?

La Bible nous donne des directives pratiques et des exemples utiles. Il nous aide à examiner notre société de manière critique et nous fournit des réponses de Dieu. La Bible a été écrite dans des situations similaires à la nôtre. De nombreux textes bibliques ont été donnés en réponse à des maux sociaux. Les gens à qui la parole de Dieu a été adressée à l’époque étaient tout aussi préoccupés par l’état de la société dans laquelle ils vivaient que nous le sommes aujourd’hui. Eux aussi se demandaient ce qu’il fallait faire face aux griefs.

L’une des choses les plus importantes que nous puissions faire – et que nous devons faire – est de développer une attitude critique.

L’apôtre Paul, dans Romains 12:1-2, nous appelle à développer une attitude socialement critique. Il invite ses lecteurs à ne pas adopter sans discernement les schémas de pensée de leur culture. L’apôtre indique ainsi qu’il s’inscrit, comme Jésus, dans une tradition prophétique qui ne s’est pas contentée d’adopter le statu quo sans critique, mais l’a soumis à la critique de la révélation de Dieu. Il faut dire tout de suite qu’il ne s’agit pas d’un « non », mais d’une attitude critique envers le monde.

Les meilleurs exemples d’une attitude à la fois critique et constructive sont donnés par les prophètes de l’Ancien Testament. Ils aimaient leur peuple d’un amour passionné, et en même temps, ils étaient leurs critiques les plus sévères.

Un exemple de l’attitude des prophètes se trouve dans Esaïe 2:6-8. Esaïe a critiqué ses contemporains pour avoir couvert le pays de sorciers et de devins (Esaïe 2:6). Dans le même souffle, il a critiqué le matérialisme débridé. Ton pays est plein d’argent et d’or et de trésors innombrables » (Is 2,7). (Ésaïe 2:7). Enfin, il s’est également retourné contre l’idolâtrie. Il se plaint que le pays est rempli d’idoles et que chacun adore son propre travail (Esaïe 2:8).

Les prophètes de l’ancien Israël ont établi une critique de la société basée sur la révélation de Dieu. Ils n’étaient pas des idéalistes au sens strict du terme, mais se savaient poussés par l’Esprit de Dieu. Ils ne s’excusent pas d’avoir défendu Dieu comme étant le seul vrai, ni de ses exigences envers l’individu et la société juive. Ce qui est remarquable dans leur critique sociale, c’est son équilibre. Aucun prophète ne s’est spécialisé, pour ainsi dire, dans les transgressions morales et a ainsi laissé de côté les autres griefs. Isaïe a soumis son peuple à une critique globale. Le spiritisme et le matérialisme sont dénoncés, ainsi que l’idolâtrie.

La Bible est un guide très pratique pour une critique sociale constructive. Ceux qui la prennent au sérieux ne peuvent pas accepter le statu quo sans remettre en question.

Mais une attitude critique ne suffit pas.

Les chrétiens doivent faire ce que dit la Bible. Dans la bible, il est constamment demandé aux croyants de faire le bien (par exemple Mt 5,16 ; 2Ti 3,17 ; Ep 2,8-10). Il est maintenant d’une importance fondamentale de ne pas confondre la grâce avec l’action ou le travail. La réconciliation avec Dieu est une pure grâce. C’est sur la base de la mort de Jésus Christ qui a souffert pour nous. Elle est accessible par la foi et l’acceptation du Christ comme Seigneur, et non par l’action. Dans le Nouveau Testament, l’image suivante apparaît : En ce qui concerne l’acceptation par Dieu, il est dit : « Par la grâce, vous avez été sauvés par la foi ». (Eph 2:8). En ce qui concerne ce que Dieu veut faire de la vie de ceux qui ont reçu son salut, il dit : « Nous sommes ses créatures, créées en Jésus-Christ pour faire dans nos vies les bonnes œuvres que Dieu a préparées pour nous à l’avance » (Eph 2:10). (Eph 2:10).

La foi en Jésus-Christ, le Fils de Dieu, libère les gens pour qu’ils fassent ce qu’ils sont censés faire. La liberté chrétienne n’est pas un laissez-passer, mais une libération de l’esclavage de l’égocentrisme destructeur pour pouvoir faire la volonté de Dieu. La foi pousse à l’action ; dans l’amour de Dieu et du prochain, elle démontre sa vitalité. Dieu ne nous tient pas pour responsables des causes des maux de la société, car la plupart ne sont pas le résultat direct de nos actions. Nous sommes pris dans un contexte plus large de structures pécheresses. Mais nous sommes coupables si nous acceptons la poursuite des griefs et ne faisons rien pour y remédier.

Mais que pouvons-nous faire concrètement ?

J’aimerais esquisser quelques réflexions : Le plus important est que nous commencions – même si c’est la fameuse goutte d’eau dans l’océan ! Le meilleur endroit pour commencer est l’amour. L’amour, l’amour, l’amour ! Il n’est pas nécessaire d’être un expert pour aimer. L’amour est versé dans nos cœurs par l’Esprit Saint (Rm 5, 5).

Nous avons également une responsabilité politique. Être sel et lumière à notre époque signifie aussi participer au processus politique. Ne rien faire, c’est accepter les choses telles qu’elles sont. C’est pourquoi nous ne pouvons pas laisser les élections et les votes aux « autres ». Si notre compréhension de la démocratie se limite à distinguer entre 25 marques de dentifrice au supermarché, nous devons nous demander si nous avons compris ce que Jésus nous a appelés à faire.

Nous devons également nous montrer critiques envers nous-mêmes et remettre en question notre mode de vie. Pourvu que nous nous considérions comme des chrétiens engagés ? par exemple, notre comportement de consommateur parle-t-il au nom de notre foi ? Nageons-nous en même temps ou sommes-nous une alternative ? Si nous consommions moins sans critique, cela changerait l’ordre du marché. Les stratèges du marché et les publicitaires se feraient pousser des cheveux gris, car ils ne craignent rien tant que les gens cessent d’être influencés par leurs campagnes publicitaires ineptes. Imaginons : Quand il s’agit de publicité, les gens s’éteignent tout simplement ! Qu’ils se déchaînent avec leurs banalités ? on s’en fout ! Cela mettrait quelque chose en route. La question est de savoir qui va la lancer.


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Les problèmes environnementaux actuels n’ont rien à voir avec l’Évangile ?

La préservation de la création semble assez peu importante pour de nombreux chrétiens. Il n’y a pas d’autre moyen d’expliquer la conduite insouciante des voitures, les voyages en avion et la consommation de plaisirs gourmands en énergie. Aux États-Unis, avec l’élection du président Bush, qui, comme on le sait, a été fortement soutenu par les chrétiens, ce vol de la création de Dieu a atteint un nouveau sommet. Pourquoi de nombreux chrétiens se comportent-ils si peu en faveur de la création ?

Une réponse cruciale est probablement enracinée dans la Bible elle-même. Il n’y a que des appels minimaux à la protection et à la préservation de la création (Gen. 1:28). Nous, les humains, devons soumettre la terre et régner sur les animaux. Dans Rm 8,19.22, Paul écrit probablement aussi que la création souffre sous le péché et attend la restauration complète par Jésus-Christ. Mais l’appel aux disciples de Jésus à vivre un style de vie en harmonie avec la création fait largement défaut. (Après tout, cela aurait été complètement inutile et incompréhensible à ce stade).

Tant que nous ne traiterons que directement des déclarations de la Bible sur la création, nous continuerons à éviter les graves problèmes environnementaux du monde, tant au niveau personnel que dans nos congrégations. Cependant, dès que nous réalisons que les problèmes environnementaux sont en fin de compte des problèmes sociaux, la question prend une pertinence biblique brûlante. Et l’église de Jésus peut, espérons-le, être tirée de son sommeil. C’est ce dont il sera question dans les sections suivantes.

Arrivée dans une ville de millions d’habitants d’un pays en développement

Ne ressentons-nous pas tous la même chose lorsque nous arrivons dans un pays en développement ou émergent : le chaos choquant de la circulation nous coupe le souffle à plusieurs égards. D’une part, c’est l’énorme cohue des nombreux usagers de la route, généralement mal protégés, qui éveille en nous la peur des accidents et des blessures. Et à juste titre, car il est un fait que la circulation fait un grand nombre de victimes (dans les mégalopoles indiennes, 3 à 6 morts par jour !). À cela s’ajoutent le bruit et la pollution atmosphérique, à tel point que de graves dommages pour la santé humaine et animale sont inévitables.

Outre le trafic, on remarquera l’omniprésence de la pauvreté. Dès qu’on attend au premier feu rouge, des infirmes enveloppés dans des chiffons apparaissent et se faufilent dans les voitures à l’arrêt avec des regards suppliants – suppliant pour un cadeau. Beaucoup n’ont pas de lit ou de maison pour se retirer. La plupart d’entre eux travaillent toute la journée pour gagner juste assez pour avoir assez à manger. Parfois, ce n’est pas suffisant. Les faibles revenus (selon l’ONU, un revenu inférieur à 1 USD par jour est considéré comme le seuil de pauvreté) entraînent une exposition à tous ces phénomènes très désagréables dans les grandes villes modernes. Pas de protection contre la circulation dangereuse, pas de retraite dans un environnement plus calme, pas de repos pour les yeux à la vue d’un beau paysage, pas de détente dans un fauteuil confortable, dans un restaurant de jardin ou d’activité sportive.

Ceux qui n’ont jamais fui la grande ville puante d’un pays en développement remarqueront autre chose. L’eau est une denrée très rare. Et si l’on voit de l’eau, elle est souvent inesthétique, malodorante et généralement imbuvable. Vous êtes maintenant dans un pays chaud et vous aimeriez surtout vous rafraîchir avec de l’eau, vous laver et boire beaucoup, mais non : pénurie d’eau, c’est-à-dire économiser l’eau et se passer de beaucoup ! En tant que visiteur occidental disposant de beaucoup d’argent, vous pouvez certainement acheter suffisamment d’eau de la qualité souhaitée, mais que fait la population locale, plus pauvre ? Il n’est pas difficile d’imaginer comment une mauvaise disponibilité de l’eau entraîne également de nombreux problèmes de santé.

Les riches contaminent, les pauvres souffrent

À la lumière de ces circonstances défavorables, j’ai fait une observation judicieuse. Les pauvres des grandes villes sont principalement harcelés en raison de problèmes environnementaux. Le bruit, l’air toxique, la puanteur, la poussière et la fumée, une flore et une faune minimales, le manque de paysages, le manque d’eau, tous les problèmes environnementaux causés par l’homme. Une grande injustice ici est que ceux qui causent le plus de pollution sont les moins touchés. Les riches consomment de nombreux biens industriels, qui sont produits dans des industries parfois très sales, tandis que les pauvres doivent laver leur linge et se laver eux-mêmes dans les eaux usées de ces industries ! Et ces industries produisent aussi pour nous dans la riche Suisse. Ainsi, chaque fois que nous achetons des produits portant des étiquettes telles que « made in China », « made in India », etc., nous nous rendons conjointement responsables de cette pollution ! Où est la justice dans tout cela ? La miséricorde et la justice, dont la Bible parle si souvent (« la justice » est mentionnée 98 fois dans le seul Nouveau Testament), ne sont en aucun cas exigées ou vécues par les chrétiens en relation avec les problèmes environnementaux ! Les chrétiens du monde entier devraient se lever avec véhémence pour que cesse cette pollution mortelle de l’eau. Imaginons cela de manière réaliste : pratiquement toutes les eaux sont empoisonnées d’une manière très nocive pour la santé, et ce dans des pays où l’eau est de toute façon très rare, et où les difficultés économiques ne donnent à de nombreuses personnes aucune autre alternative que d’utiliser cette eau insalubre. L’enjeu est donc très clair. Pas seulement sur la préservation de certaines espèces animales et végétales. Non, il s’agit de la vie et de la mort des gens. Nous, les gens qui consomment beaucoup, sommes coupables de la mort d’innombrables personnes par la pollution du sol et de l’eau. Les pauvres doivent se débattre suffisamment avec le manque de revenus. Pourquoi les chargeons-nous également de la pollution des industries qui produisent pour nous ?

La pauvreté dans les campagnes

Dans les campagnes, dans les régions éloignées, c’est avant tout une pauvreté d’opportunités. On vit avec beaucoup d’efforts de ce que la terre (l’agriculture) ne fait que donner. Un revenu qui pourrait répondre à d’autres besoins (par exemple, éducation scolaire, outils) est impossible à obtenir. La population est largement exposée, impuissante, à de nombreuses maladies. Cette pauvreté est tout à fait comparable à notre époque préindustrialisée. Ou alors on parle correctement de sous-développement. Heureusement, la pollution de l’environnement n’est pas encore une cause de problèmes ici. Mais la vie est si pénible et sans espoir par rapport à ce que l’on peut avoir en ville que beaucoup de gens s’y installent.

L’évolution ne doit pas être unilatérale et pas trop rapide

Un développement ciblé peut-il résoudre ces problèmes ? Le cours « Technologie et développement durable », que j’ai suivi pendant 4 mois en Inde du Sud au début de cette année, a tenté de répondre à cette question. La première prise de conscience a été très décevante. Le développement a tendance à conduire à une moindre durabilité. Cela se voit facilement, par exemple, dans le remplacement du sac de jute par des sacs en plastique. Ou le remplacement des feuilles de bananier en plaques par des plaques de métal et de plastique. Deuxième constat : au final, personne ne veut vraiment se passer du développement (il n’y a pas d’abandons conséquents). Il est donc crucial : les développements ne doivent pas être unilatéraux (non réticulés) et pas trop rapides. Que signifie « unilatéral » ? Malheureusement, c’est la forme habituelle de développement dans les économies de marché libérales aujourd’hui. Un besoin émergent est couvert par des entrepreneurs pleins de ressources, aussi rapidement et à moindre coût que possible, avec un produit. En d’autres termes, rapidement et s’il n’y a que des lois et des règlements minimaux ou faibles, sans tenir compte des exigences sociales et écologiques. Dans les pays industrialisés occidentaux, nous sommes heureusement plus avancés en termes de réglementation.

Dans un pays en développement comme l’Inde, personne ne pense vraiment à la protection de l’environnement. Au contraire, ils envisagent actuellement de construire 3000 km d’autoroute ! Qui peut les blâmer, nous l’avons aussi. D’ailleurs, c’est vrai jusqu’aux professeurs : Ce que l’Occident possède, nous le voulons aussi. Cela ne signifie rien d’autre qu’un développement rapide et unilatéral. Le résultat sera : encore plus d’injustice, encore plus de difficultés sociales, encore plus de pollution. De mon point de vue, il n’y a qu’un seul moyen de sortir de l’impasse, et c’est précisément nous, les chrétiens, qui avons pu le prendre de manière conséquente.

Un changement de valeurs est nécessaire. Et cela doit commencer dans les pays riches, ou avec les gens riches.

Les péchés non reconnus de la société d’abondance

Nous, les Occidentaux, sommes obsédés par un besoin de plus en plus pressant, et nous devrions nous en abstenir. Cette dépendance à un plaisir et une satisfaction de plus en plus grands, peut être caractérisée comme suit :

  1. Consommation : plus j’achète/consommation, plus je suis heureux.
  2. Mobilité : je suis plus heureux dans les endroits que je visite.
  3. Individualisme : plus je suis heureux, plus je peux organiser mon temps seul

Ces messages de plus de consommation, de plus de connaissances et de plus d’individualité sont profondément ancrés et nourris en nous chaque jour. Pas seulement par le biais de la publicité malveillante ? non par le biais de nos propres amis et membres de la famille ainsi que de nos propres pensées ! Mais ces messages ne sont certainement pas des messages bibliques. La Bible dit que la communion avec le Dieu trinitaire rend heureux. L’amour pour Dieu le Père, pour Jésus-Christ et pour le Saint-Esprit vous rend heureux. Et aimez votre voisin comme vous-même. Nous raccourcissons toujours ce premier commandement central jusqu’au dernier point : …. s’aimer soi-même.

Nous devons reconnaître ces « mensonges », les confesser devant Jésus, lui demander pardon et le laisser nous changer. Alors, par exemple, apprenez :

  1. Moins de consommation nous rend plus libres (plus de temps devient disponible) et plus créatifs. Parlons davantage avec nos amis de ce que nous vivons en communauté, en jouant et en travaillant ainsi que dans les sports et la nature, plutôt que de nos derniers achats et de nos besoins extravagants.
  2. Il y a tant de choses à découvrir dans les environs qui sont passionnantes et qui restent à découvrir. D’où les chrétiens tirent-ils l’idée que seules les vacances à l’étranger sont vraiment des vacances … ?
  3. L’homme est créé pour la communauté. Pourquoi tant de chrétiens vivent-ils de manière extraordinairement individualiste et égocentrique ?
  4. Avec mon pouvoir d’achat excédentaire, je peux aider très efficacement les habitants des pays en développement (avec l’argent dépensé pour un enfant en Suisse, on peut entretenir/élever au moins 25-30 enfants en Inde).
  5. Achetez de la qualité. S’assurer que les critères sociaux et écologiques sont respectés lors de la production et que le produit est durable (je sais d’après l’industrie indienne qu’ils sont maintenant plus préoccupés par la pollution de l’environnement puisque les clients (nous !) l’exigent de plus en plus, par exemple via des certificats environnementaux).

Et nous nous retrouvons même dans la ligne de la Bible (par exemple « Devenez comme des enfants ? »). Je constate si souvent avec nos enfants qu’ils ne cherchent pas à consommer. La proximité, le repos et la communion avec les hommes et les animaux sont ce qu’il y a de plus beau pour eux. Les règles suivantes peuvent être appliquées à titre de mesure simple pour une meilleure compatibilité environnementale :

– Transport : peu et surtout seulement sur de courtes distances ainsi que des transports économes en énergie.

– Matériaux : un effort minimum dans la production et le transport ainsi que des matériaux bien biodégradables.

– Espace/installations : peu d’énergie de chauffage pour les chambres et l’eau chaude ainsi que peu d’énergie de fonctionnement pour les installations.

Exprimé en termes évangéliques, un changement de valeurs devrait signifier : Commencer une nouvelle vie avec Jésus-Christ.

Mais il faut d’abord renoncer clairement à Mammon (Mt. 6.24 : « Nul ne peut servir deux maîtres, car soit il haïra l’un et aimera l’autre, soit il s’attachera à l’un et méprisera l’autre. Vous ne pouvez pas servir Dieu et Mammon). Ou voulons-nous continuer à ignorer l’attente de Dieu en matière d’amour, de miséricorde et de justice et nous tourner vers des « choses plus confortables » ? Se cacher des responsabilités n’a jamais été profitable à Dieu (Matt. 23:23). Cependant, c’est précisément ce que nous faisons avec notre co-consommation sauvage, nos voyages dans le monde entier et nos égos complaisants.

Développer un style de vie attrayant, centré sur l’évangile

Pour faire de réels progrès, nous devons avant tout trouver un attrait et un langage adaptés à ces autres valeurs. Car aujourd’hui, c’est ce qui est attrayant qui est recherché, et non le renoncement. Pourquoi ne pas commencer par de petits groupes dans nos églises, tels que les groupes d’appartenance et les équipes de direction de l’école du dimanche ? Offrir des après-midi passionnants en famille dans les bois, observer les animaux dans une réserve naturelle, nager dans un lac marécageux, faire du VTT avec des amis ou des voisins, faire de l’artisanat ensemble, pratiquer l’hospitalité, etc.

Il y aurait beaucoup plus de moyens attrayants non seulement pour connaître l’Evangile mais aussi pour le vivre de manière holistique. Mais, encore une fois, nous ne pouvons pas le faire. L’Esprit Saint doit changer nos cœurs afin que nous puissions nous engager sur la nouvelle voie avec joie et conviction. Dans la famille ou le groupe de maison, nous pouvons commencer à présenter notre style de vie à Dieu, à écouter sa voix et à avoir un effet sur notre société.

Publié dans le magazine « Bausteine » n° 7/2002

Werner Hässig


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~ 7 min

Exposé tenu lors du ForumChristNet « I.D. Suisse » le 15 juin 2002 à Berne.

Le concept de « nation »

1. Introduction

Qu?est-ce qui fait de moi un Suisse ? Mes origines, ma mentalité, ma langue, mon histoire, mon orientation politique ? J?aurais en effet beaucoup à dire, même si j?ai des origines allemandes. C?est dans cette Suisse aux multiples facettes que j?ai choisi de vivre et de m?engager. Je veux être intégré dans ce pays, m?en sentir responsable.

2. Le concept de « nation »

On appelle nation une association de personnes réunies par un même mode de pensée et un même comportement, donc potentiellement capables d?autodétermination politique et en manifestant la volonté. Ce concept a pris une dimension politique d?abord en Occident au 19è siècle, pour ensuite gagner le reste du monde à partir du 20è siècle.

Au travers de son histoire et de sa constitution politique uniforme, la Suisse s?est forgé un solide sentiment d?identité nationale : elle comprend quatre « nations linguistiques », est très attentive aux différences existant aussi bien au niveau régional que communal, et elle a fort bien su consolider le processus de prise de décision démocratique. La Suisse est une « nation volontariste ».

Le concept de nation revient environ 700 fois dans la Bible, où il désigne les « peuples ». Il s?agit de grandes communautés constituées de familles, de tribus ou de clans qui avaient un passé commun. Ainsi on parlait encore de « nation » au Moyen-Âge, et même sous l?empire austro-hongrois, qui était alors un Etat composé de plusieurs nations. A noter que dans la Bible, le terme employé pour nation (ou peuple) est goi (goijim au pluriel) alors que le terme ?am est réservé à Israël, le peuple élu.

3. Le nationalisme:

Les idéologies nationalistes visent à défendre, renforcer et démarquer l?identité nationale, ressentie comme unique. Ce repli sur soi, visant à consolider la cohésion interne, exclut même les minorités vivant à l?intérieur du pays. Les idéologies nationalistes peuvent revêtir différentes formes en fonction du contexte historique, politique et socio-économique. La branche des sciences politiques fait notamment la distinction entre nationalisme culturel, politique, économique et religieux.

J?ai pu constater que certains chrétiens à tendance nationaliste s?identifient souvent à Israël. Je ne partage pas ce point de vue, pour les raisons suivantes :

·       Aux yeux de Dieu, Israël est le peuple élu de Dieu, le peuple No 1. Les « nations » viennent donc en 2è position, et cela est donc également valable pour la Suisse.

·       Etant membres « des nations », nous ne pouvons pas appartenir au peuple d?Israël (sauf si nous pouvons justifier des origines juives). Par contre nous sommes un en Christ avec les croyants d?Israël.

·       Israël n?est pas notre patrie, que nous devrions récupérer d?une façon ou d?une autre. La terre d?Israël fait partie de la promesse que Dieu a faite à Abraham, le père de la nation (1 Genèse 15 :18 « En ce jour-là, Dieu conclut une alliance avec Abraham en disant : Je donne ce pays à ta descendance ; depuis le fleuve d?Egypte jusqu?au grand fleuve, l?Euphrate. »)

·       D?ailleurs même Israël n?a aucun droit sur son pays. C?est un cadeau de Dieu, et il pourrait très bien le lui reprendre s?il y voyait le moyen d?atteindre son but : ramener son peuple à lui.

·       En tant que Suisses, nous ne pouvons pas vivre dans l?illusion d?être le pays No 1 ou d?en faire partie.

·       Dans Zacharie 8:23, nous lisons: « En ces jours-là, dix hommes de toutes les langues des nations saisiront un Juif, ils le saisiront par le pan de son vêtement et diront : Nous irons avec nous, car nous avons appris que Dieu est avec vous ». Dans cette prophétie, je retrouve cette tendance qu?ont certains chrétiens à s?identifier à Israël.

L?héritage de la Réforme

·       Les réformateurs ont incontestablement marqué la politique, et ce à l?échelle mondiale.

·       Martin Luther a clairement défendu sa position devant la Diète de Worms en présence de l?Empereur. Un homme politique l?a ensuite mis en sécurité.

·       Ulrich Zwingli a été pendant plusieurs années conseiller auprès du gouvernement zürichois. Il mourut lors de la 2è Guerre de Kappel.

·       Jean Calvin a fortement marqué Genève, jusque dans l?organisation de la vie publique et par ses valeurs éthiques. Ses activités ont d?ailleurs eu des répercussions considérables aussi bien en Angleterre qu?en Amérique ou en Europe de l?Est.

·       A Berne, la Réforme a été l?occasion tant attendue qui a permis au gouvernement de se soustraire de l?influence de Rome et de s?approprier certains territoires, notamment l?Oberland bernois.

·       Après la Réforme, l?Allemagne a longtemps conservé le principe politique voulant que le pouvoir en place détermine la confession.

Les Eglises libres

·       Pendant la Réforme, les baptistes furent mis sous pression parce qu?ils refusaient de se soumettre à la politique et à la confession prédominante. Nombre d?entre eux furent expropriés, mis à mort ou chassés.

·       Autour de 1831, Berne instaura peu à peu un gouvernement progressif. Les cercles aristocratiques durent se retirer de la politique et s?engagèrent alors dans le mouvement piétiste, qui devint une « Evangelische Gesellschaft » (une société évangéliste).

·       Vers 1880 commencèrent les grandes campagnes d?évangélisation, qui permirent à de nombreuses personnes de trouver un sens à leur vie en la remettant à Dieu.

Les amis d?Israël

·       Ils s?identifient nettement à l?actuelle Israël du Proche-Orient sur le plan national.

·       Le fait qu?ils proviennent de différent mouvements d?opposition aux Eglises dominantes expliquent leur tendance au repli sur soi (à l?image des Pharisiens vivant au temps de Jésus). Cela les rapproche de la tradition judaïque, qui s?est montrée nettement isolationniste au cours de l?Histoire.

La Suisse

·       Fondation en 1291 sur la prairie du Grutli.
Le Pacte commence ainsi : « Au nom du Seigneur. C’est accomplir une action honorable et profitable au bien public que de confirmer, selon les formes consacrées, les mesures prises en vue de la sécurité et de la paix ? Les décisions ci-dessus consignées [?] devront, si Dieu le permet, durer à perpétuité.»
Il est frappant de voir qu?à cette époque, dans les campagnes entourant le Lac des Quatre Cantons (qui étaient alors en plein bouleversement), on arriva à un accord politique de façon autonome et en rupture complète avec les autorités. Ce dernier devait « durer à perpétuité». A en croire les spécialistes cela était exceptionnel pour l?époque. Au fil du temps, ce « pacte d?urgence » sommaire devint une confédération, c?est-à-dire que les différents territoires se regroupèrent peu à peu en Etats ayant une visée politique commune.

·       Au 19è siècle, suite à la réorganisation de la vie publique par Napoléon Ier une confédération moderne vit le jour. C?est aux 18è et 19è siècles, sous l?influence des Lumières, qu?on développa et instaura les principes démocratiques et libéraux, mettant ainsi à pied d?égalité les différentes confessions du christianisme. Dans les milieux politiques et religieux, la notion de tolérance fit son chemin. Cela explique pourquoi il n?y eut plus de guerre de religion après 1848. Même les Eglises libres, dont les membres étaient encore fortement réprimés vers 1700, obtinrent le droit de s?organiser librement.

Notre identité en Christ

·       Notre identité chrétienne se trouve en Jésus-Christ seul (cf. Gal. 2:20 : « Ce n?est plus moi qui vis, c?est Christ qui vit en moi ; ma vie présente dans la chair, je la vis dans la foi au Fils de Dieu, qui m?a aimé et qui s?est livré lui-même pour moi » [Version Segond révisée])

·       Face à cette identité première, mon identité suisse (celle de mon passeport) est secondaire, c?est un adiaphore. Que je sois Turc, Juif, Palestinien ou Suisse, cela vient après le fait que nous sommes tous un en Jésus-Christ (cf. Gal. 3:28 : « Il n?y a plus Juif ni Grec, il n?y a plus esclave ni libre, il n?y a plus ni homme ni femme, car vous tous, vous êtes un en Christ-Jésus »). C?est cela notre véritable identité. C?est pourquoi il est inutile d?accorder trop d?importance à la nationalité. Seule notre foi en Jésus-Christ nous permet de savoir ce que nous pouvons apporter au monde et aux nations en tant que Suisses.
Dans certaines circonstances, l?adiaphore prend une signification majeure, c?est-à-dire qu?il devient le moyen d?exprimer notre confession de foi. Il se pourrait donc qu?un jour notre appartenance à Jésus-Christ se manifeste au travers de notre nationalité suisse. C?est par exemple le cas dans un pays purement islamique dans lequel il est interdit de montrer la croix suisse.

·       Phil. 3:20-21 : « Pour nous, notre cité est dans les cieux ; de là nous attendons comme Sauveur le Seigneur Jésus-Christ, qui transformera notre corps humilié, en le rendant semblable à son corps glorieux par le pouvoir efficace qu?il a de s?assujettir toutes choses ».
Ce passage parle de « l?au-delà » de notre citoyenneté. « Les cieux » sont le but de l?Histoire, la terre promise, le lieu où le Père règne éternellement. Nous y avons notre place. Notre identité nationale est également comprise dans l?expression « corps humilié ».
Le pasteur allemand Dietrich Bonhoeffer (résistant sous le régime nazi) parlait des « dernières » et « avant-dernières choses », autrement dit ce qui est décisif par rapport à ce qui est secondaire. Les « dernières choses » représentent l?appartenance à Dieu qui garantit notre citoyenneté céleste. Quant aux « avant-dernières choses » comprennent entre autres notre appartenance à un peuple, une région ou une race. Les « avant-dernières choses » précèdent donc les « dernières ».

·       2 Cor 5:17 : « Si quelqu?un est en Christ, il est une nouvelle créature. Les choses anciennes sont passées ; voici : toutes choses sont devenues nouvelles.»
« Les choses anciennes » incluent la nation en tant que fondement pour projets, nos choix et nos actions. ? « Les choses nouvelles », c?est le fait d?être ouvert à ceux qui pourraient nous déranger ou nous faire peur, à savoir le faible, l?étranger ou l?Autre.

·       ChristNet a la lourde tâche de redéfinir sur ces bases l?identité suisse.

Bibliographie

Hans Küng, théologien catholique suisse vivant en Allemagne. A publié en 1991 à l?occasion du 700e anniversaire de la Confédération le livre « Die Schweiz ohne Orientierung? Europäische Perspektiven ». La vision d?un avenir possible. (P. 91ss.). (Benziger-Verlag 1992).

Scott MacLeod, musicien et écrivain, responsable d?un groupe chrétien faisant du travail de rue à Nashville, Tennessee, Etats-Unis. « Le lion de lumière. Une parole pour la Suisse. » (Editions Schleife, Winterthour : 2001).

Werner Ninck, juin 2002