Impôts – permettre des solutions en commun
Nous ne sommes pas de simples individus autonomes, car tous ceux qui nous entourent sont nos prochains, à qui nous devons des égards, qui ont exactement les mêmes droits que nous-mêmes et qui ont une valeur égale aux yeux de Dieu. Toutes nos actions ont des répercussions sur nos prochains. Pour cette raison, des lois et des règles sont nécessaires pour régir notre vie en société.
Pour pouvoir vivre ensemble, nous devons définir ensemble de nombreux fondements : quelles sont les choses que nous voulons faire ensemble, quelles sont celles que chacun fait à sa guise, quel système économique souhaitons-nous, etc. Il faut dès lors une organisation commune où chacun dispose du même droit de parole : l’Etat. L’Etat, non pas en tant que représentation lointaine et néfaste, mais l’Etat auquel nous appartenons tous !
Etant donné que ces règles ont été définies en commun, elles s’appliquent à tous de la même manière, et nous ne pouvons y déroger pour notre simple avantage. Les puissants y trouveraient peut-être leur compte, mais l’amour du prochain, dans son sens chrétien, nous enjoint à respecter aussi les droits des plus faibles.
Une organisation commune implique un financement en commun des choses convenues, et une règle permettant de calculer la contribution de chacun. Etant donné que la richesse ne repose que dans une moindre mesure sur la prestation, il est normal que les riches doivent contribuer davantage que les pauvres, et qu’une progression fiscale vienne atténuer un peu la répartition extrêmement inéquitable réalisée par le marché.
A cet effet, les taux d’imposition doivent être conçus de telle manière que chacun contribue selon sa propre capacité, tout en conservant une partie du fruit de ses efforts. Un bel exercice d’équilibre. Il est toutefois absurde que d’aucuns viennent se plaindre de ce qu’ils ne peuvent conserver que 60 de leurs 100 millions de francs de revenus annuels. Cela n’a plus rien à voir avec une quelconque performance et il ne saurait dès lors être question d’ « inégalité ».
Nul ne peut se plaindre de devoir travailler pour les autres : en effet, il profite autant des prestations communes et il bénéficie d’un système établi en commun sans lequel il ne pourrait pas gagner tout cet argent. Il se doit donc aussi de remédier aux dommages causés par le système et de soutenir d’autres personnes lésées par le système ou qui ont carrément été mises à l’écart par le système économique actuel au motif qu’elles n’étaient pas suffisamment performantes.
Lorsque d’aucuns disent qu’il ne vaut plus la peine de travailler quand les impôts sont élevés, il y a de quoi douter de la morale du travail… ne travaillons-nous donc que pour nous enrichir ?
Certains estiment que la redistribution n’est pas biblique. Rien de plus faux : voir à ce sujet les textes sur la Bible et les impôts sur le site web de ChristNet. D’autres affirment que la progression fiscale n’est pas biblique, et que la Bible ne mentionne que le taux unique. C’est faux, là encore. Premièrement : le taux unique dans la Bible doit être vu en lien avec d’autres redistributions. Tous les sept ans, les dettes étaient remises et tous les 50 ans intervenait une année de jubilé à l’occasion de laquelle toutes les propriétés foncières (soit le capital de base de chacun) revenait à son propriétaire d’origine. L’accumulation des inégalités, telle qu’on la voit aujourd’hui, n’était donc pas possible. De nos jours, même l’impôt (minimal) sur les successions est supprimé. Il n’est donc pas possible d’introduire en même temps un taux unique « chrétien »… Deuxièmement : dans les temps bibliques, les différences de revenu pour la majorité des gens, qui étaient agriculteurs ou artisans, étaient bien moindres. Une progression à des fins de compensation n’avait donc pas de raison d’être. Libre à nous, aujourd’hui, de faire les choses autrement si les circonstances le requièrent pour répondre au sens original des Ecritures.
Il y a enfin ceux qui estiment que la situation actuelle ressemble à l’époque où les prophètes se sont plaint de ce que les détenteurs du pouvoir opprimaient leurs sujets par des impôts élevés. A cela, nous pouvons seulement répondre que la comparaison est purement grotesque : il s’agissait à l’époque de personnes dont l’existence même était menacée. Aujourd’hui, cette plainte émane avant tout de personnes qui possèdent maison et voiture et passent leurs vacances dans des pays lointains…
En tant que chrétiens, nous voulons présenter à ceux qui ridiculisent le fait de payer les impôts un autre état d’esprit. Nous nous réjouissons d’appartenir à la Suisse et sommes disposés à apporter notre contribution – à savoir : nous sommes prêts à payer des impôts. Nous savons que l’Etat est une institution nécessaire. Et l’Etat – c’est nous ! Il n’est pas anodin que Jésus nous ait enseigné que le paiement des impôts va de soi. Lorsque les pharisiens lui ont posé une question sur le sujet, il a demandé une pièce de monnaie, a montré l’illustration de l’empereur qui y était gravée et a dit : « Rendez donc à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ! » (Mt 22,21)
Ces derniers temps, la concurrence fiscale est devenue la voie royale pour éviter de payer des impôts. Encore quelques mots sur ce thème.
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