La politique de santé doit mettre la solidarité au premier plan !

,
~ 4 min

La charité est essentiellement synonyme de solidarité. C’est particulièrement vrai dans le domaine de la santé. Dans quelle mesure est-il important pour nous que nos voisins aient accès aux soins de santé ? Et à quel point est-il important pour nous que les pauvres aient autant d’accès que les riches ? En ce sens, quelle est l’importance de la justice pour nous ? Où se situe la limite du traitement nécessaire ou approprié pour la santé ? Il s’agit de chances de vie et d’accès à la société : certains traitements peuvent ne pas être nécessaires à la survie, mais ils peuvent être massivement invalidants.

La solidarité en matière de soins de santé signifie avant tout la solidarité des bien-portants avec les malades et la solidarité des riches avec les pauvres. Tous deux sont aujourd’hui en danger : Ceux qui ne veulent pas partager affirment de plus en plus que les malades vont trop souvent chez le médecin et que c’est la faute des pauvres s’ils sont pauvres. En matière de politique de santé, il est évident que les attaques de la droite contre l’État-providence ne sont pas simplement dirigées contre les bénéficiaires individuels de l’État-providence, mais qu’ils sont essentiellement plus intéressés par leur propre portefeuille que par le bien-être de leurs voisins. Après tout, qui tombe malade volontairement ?

Raisons de l’augmentation des coûts

La loi sur l’assurance maladie de Ruth Dreifuss visait deux objectifs : d’une part, renforcer la solidarité entre les personnes en bonne santé et les malades, et d’autre part, mettre un terme à l’explosion des coûts du système de santé. Le premier postulat a été rempli aujourd’hui, mais le second ne l’a pas été. Quelles en sont les raisons ?

– Le progrès médical ne peut être arrêté. Des traitements de plus en plus performants (mais donc généralement aussi plus coûteux) sont mis au point, et de plus en plus de maladies peuvent désormais être (mieux) soignées.

– Ces dernières années, les prix des médicaments ont augmenté massivement. Les entreprises pharmaceutiques suisses ont réussi à faire passer au Conseil national le fait que les réimportations de l’étranger (où les médicaments suisses sont beaucoup moins chers) restent interdites…

– Trop de concurrence : en raison de la concurrence entre les hôpitaux, chaque hôpital (privé et public) veut toujours acheter les derniers équipements de plusieurs millions de dollars. Cela les oblige également à les amortir en effectuant avec eux des examens inutiles.

– Le vieillissement de la population entraîne le fait que de plus en plus de personnes ont besoin de soins. Je suppose qu’ils ne peuvent pas s’en empêcher…

La désolidarisation comme solution ?

Le nouveau ministre de l’intérieur et donc de la santé, M. Couchepin, a déjà annoncé comment il souhaite rendre les soins de santé plus abordables.

– Primes « ajustées au risque » pour les personnes de plus de 50 ans. Les personnes âgées devraient payer plus de primes d’assurance maladie car elles « causent » également plus de frais. L’idée de la solidarité des bien-portants avec les malades comme principe de soins de santé lui semble totalement inconnue. Les personnes âgées ne peuvent tout simplement pas s’empêcher d’augmenter les coûts de santé, et ne devraient donc pas être punies pour cela non plus. Couchepin s’appuie apparemment sur des statistiques qui « montrent » que les personnes âgées ont tendance à être riches en moyenne. Mais cette richesse est très inégalement répartie et, même aujourd’hui, la personne âgée moyenne (c’est-à-dire la médiane) est plus pauvre que le citoyen moyen, il ne veut pas voir cela….

– Couchepin prévoit également de réduire l’assurance de base. On ne sait pas encore exactement ce qu’il prévoit, mais il est à craindre que de nombreux traitements, qui sont aujourd’hui couverts par l’assurance de base (solidaire), ne seront à l’avenir accessibles que par le biais d’une assurance complémentaire coûteuse. Adieu la solidarité…

– En revanche, il veut « renforcer la concurrence ». L’exemple des hôpitaux nous montre que cela augmente les coûts et ne les réduit pas. Et surtout les États-Unis, où la concurrence « joue » à cet égard, devraient suffire à nous mettre en garde : les médecins font de la publicité sur des affiches de taille mondiale pour attirer les clients (j’ai d’ailleurs vu des affiches aux États-Unis avec des slogans comme « Avez-vous mal à la tête aujourd’hui, ne vous sentez-vous pas bien ? Alors venez voir le Dr. XY »). Résultat : selon les calculs de l’OCDE, les soins de santé engloutissent 14 % du produit national brut aux États-Unis, environ 10 % en Suisse et environ 9,5 % en moyenne dans l’UE. Pourtant, aux États-Unis, la moitié de la population n’a pas d’assurance maladie parce qu’elle n’en a pas les moyens, et la mortalité infantile (selon l’ONU, principal indicateur de la diffusion des soins de santé) est plus de 50 % plus élevée qu’en Suisse, en Allemagne ou en France (0,8 % contre 0,5 %) Voulons-nous vraiment ce système ?

Couchepin semble avoir succombé à son idéologie néo-libérale : « la concurrence rend tout bon », et « chacun peut le faire lui-même s’il le veut ». Opposons-nous clairement à ces tendances à la désolidarisation. La question va devenir brûlante dans les mois à venir (mais surtout après les élections de l’automne) !


Photo by Tim Marshall on Unsplash

0 réponses

Laisser un commentaire

Rejoindre la discussion?
N’hésitez pas à contribuer !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.