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Les trois quarts des chrétiens évangéliques ont voté pour Donald Trump lors des deux dernières élections présidentielles. Une réflexion sur les raisons pour lesquelles de nombreux évangéliques américains soutiennent l’actuel candidat républicain à la présidence, bien qu’il se comporte à l’encontre de leurs valeurs morales.

Je ne me souviens pas de la dernière fois qu’un (ex-)président ou un candidat à la présidence des États-Unis a dit aussi rarement la vérité, a répandu autant de haine au lieu de l’amour et s’est ainsi tourné aussi clairement contre les valeurs fondamentales du christianisme. Qu’est-ce qui a pris à la chrétienté évangélique (blanche) américaine ?

La peur de la ruine ?

Donald Trump se présente comme une personnalité forte, un leader qui se bat pour que les États-Unis restent une nation chrétienne. Les Américains évangéliques blancs comptent sur le leader républicain pour défendre les Etats-Unis en tant que nation chrétienne. Selon une étude 1 , quatre personnes interrogées sur cinq estiment que les États-Unis devraient être une nation chrétienne, ce qui, selon des chercheurs comme Anthea Butler, est aussi une façon de s’appuyer sur une identité protestante blanche patriotique 2 . En ce sens, ils se sentent menacés par l’arrivée massive et illégale de migrants d’Amérique latine, qui pourrait modifier la domination protestante. 3 Ils craignent que la culture chrétienne soit mise en danger par la libéralisation des mœurs et la liberté d’afficher son orientation sexuelle (voir la culture LGBTQ). Et surtout par une population qui fréquente de moins en moins les églises et qui affiche son sécularisme.

De nombreux évangéliques se rendent compte qu’ils sont de plus en plus minoritaires et se sentent menacés par une culture en mutation dans leur environnement. Ce sentiment est renforcé par des « bulles » sur les réseaux sociaux, qui ont tendance à se radicaliser jusqu’à la paranoïa : Les théories du complot les plus absurdes sont avalées par une partie anxieuse de la population, sans se soucier de leur véracité. Car ces théories confirment leurs craintes, les nomment et donnent également un nom aux responsables. Cela leur donne de l’espoir, car il y a la perspective qu’avec l’élimination des « méchants », le problème disparaîtra également. Q-Anon est l’expression la plus parlante de cette pananoïa, qui voit le grand mal dans le gouvernement qui fait croître toutes ces menaces. Ces peurs renforcent la tendance à se jeter dans les bras d’un « sauveur ». Et Donald Trump se présente comme celui qui lutte contre ce système. C’est aussi la raison pour laquelle il a pu affirmer sans aucune preuve que l’élection avait été volée et inciter le Parti républicain à se purger de ses opposants.

Ce phénomène de radicalisation de la peur dans une culture en mutation rapide (et pas seulement chez les chrétiens), associé au rêve de l’homme fort à la tête du gouvernement « qui rétablira l’ordre », avait déjà été prédit en 1990 par le sociologue Anthony Giddens dans son ouvrage « The consequences of modernity ». L’Europe, même la Suisse, n’est pas épargnée par ce phénomène.

Quelles valeurs, quelles priorités ?

Beaucoup de chrétiens évangéliques ne réalisent pas qu’ils se laissent séduire par un menteur notoire 4. Avant sa campagne présidentielle de 2016, il était pour l’avortement, 5 se vantait d’abuser des femmes, 6 etc. Depuis qu’il s’est rendu compte qu’il avait besoin des évangéliques pour être élu, il fait tout ce qu’ils veulent entendre et prétend même que la Bible est son livre préféré. 7

Le problème est qu’une partie des chrétiens évangéliques est plus conservatrice que les principales valeurs bibliques. L’avortement, l’homosexualité et d’autres thèmes sexuels sont plus importants pour beaucoup que la loi suprême que Jésus nous a enseignée (Matthieu 22), à savoir l’amour pour Dieu et pour le prochain, dont tout doit découler. Or, l’amour du prochain est bafoué par Trump : Il prêche la haine et le mépris des minorités (« Les Mexicains sont des violeurs » ; « Les migrants de Springfield mangent les animaux domestiques des autochtones »), des plus faibles et des opposants 8 au lieu de l’amour du prochain et cultive le mensonge au lieu de la vérité.

C’est précisément celui qui se présente comme le gardien des chrétiens qui érode et détruit ainsi l’une des valeurs centrales de la culture chrétienne. La vérité est subordonnée à l’idéologie, comme si tous les moyens étaient bons pour « sauver ». L’idée que tout est de toute façon construit sert de justification. Nous sommes ainsi pleinement dans la postmodernité selon Jean-François Lyotard 9 : s’il n’y a plus de vérité, et donc plus d’objectivité éthique ni d’autorité, alors l’épanouissement des puissants a le champ libre. La vérité est un obstacle gênant pour les puissants, mais les défavorisés en dépendent pour ne pas passer sous les fourches caudines.

Mais les chrétiens devraient être les gardiens de la vérité, car les soi-disant « vérités alternatives » sont des mensonges. Surtout si l’on se réfère aux Dix Commandements qui sont réintroduits dans les écoles de Louisiane 10 . La vérité n’est pas ce que l’on aimerait croire ou ce qui correspond toujours à sa propre vision du monde. La vérité doit être recherchée et vérifiée. Et elle doit être réclamée ! Si les chrétiens ne le font plus, ils ne sont plus le sel de la terre. Sans vérité, le mensonge et la méfiance envers nos semblables prennent le dessus. La cohabitation n’est donc plus possible.

Sommes-nous, nous chrétiens, aveuglés par la peur de notre propre survie ? Sommes-nous prisonniers de la lutte pour notre communauté (« nous contre les autres ») au lieu de nous préoccuper des valeurs chrétiennes pour l’ensemble de la société ? Il semble que nous ne soyons plus le sel de la terre. Bien trop peu de chrétiens osent élever la voix et revendiquer les valeurs chrétiennes centrales. En 2019, le rédacteur en chef de « Christianity Today » a décrit Trump comme inapte en raison de sa moralité et de ses valeurs, ce qui l’a placé sous le feu des critiques. 11

Justification de tout – jusqu’où ?

Un pasteur américain, interrogé par un ancien diplomate français sur la moralité de Donald Trump, a répondu que l’ancien président était comme le roi David, qui avait lui aussi péché 12 . Le roi David est un modèle de foi en raison de sa relation personnelle avec Dieu, décrite dans les Psaumes, et du repentir qui suit les péchés qu’il a commis. Donald Trump ne s’est jamais repenti 13 .

La multiplication des procédures judiciaires interminables a pour effet de placer le candidat Trump dans un rôle de victime et donne à ses partisans l’image d’une chasse à courre dont il sortirait renforcé. Les partisans de Trump y voient les tentacules d’un système malsain qui a tout fait pour entraver le chemin du sauveur. Même la prise d’assaut du Capitole ne semble pas l’avoir remis en question. Jusqu’où peut-il aller ? Y a-t-il une limite ? Pour l’instant, cela ne semble pas être le cas.

Le christianisme sortira-t-il de cette impasse ? Il semble que les chrétiens soient les premiers à avoir besoin de prière.


1. Pew Research Center 2022 cité dans RTS Religion
2. https://www.rts.ch/play/tv/rtsreligion/video/rtsreligion-video-les-usa-une-nation-vraiment-chretienne?urn=urn:rts:video:14750003
3. https://www.france24.com/fr/am%C3%A9riques/20231227-la-crise-migratoire-se-poursuit-%C3%A0-la-fronti%C3%A8re-entre-le-mexique-et-les-%C3%A9tats-unis
4. https://www.tagesschau.de/faktenfinder/trump-bilanz-uswahl-fakenews-101.html; aujourd’hui encore, il répand régulièrement des contre-vérités sans sourciller, par exemple sur le manque de soutien des États du Sud pour faire face à l’ouragan Hélène, ce qui incite même les représentants républicains des régions concernées à rectifier publiquement le tir.
5. https://www.fr.de/politik/donald-trump-abtreibung-verbot-roe-v-wade-oberster-gerichtshof-us-wahlen-us-politik-zr-92994479.html
6. https://en.wikipedia.org/wiki/Donald_Trump_sexual_misconduct_allegations
7. https://www.zdf.de/nachrichten/politik/ausland/trump-bibel-verkauf-100.html
8. Il qualifiait régulièrement Hillary Clinton de corrompue, Kamala Harris de « marxiste, communiste, fasciste, socialiste », c’est-à-dire en quelque sorte tout et son contraire, tant qu’elle était connotée comme étant le mal.
9. Jean-François Lyotard – Wikipedia
10. https://www.srf.ch/news/international/us-buergerrechtler-empoert-zehn-gebote-im-klassenzimmer-gesetz-in-louisiana-erntet-kritik
11. https://en.wikipedia.org/wiki/Mark_Galli
12. Témoignage de G. Araud, ancien ambassadeur de France aux USA, sur la chaîne LCI
13. Trump: ‘Why Do I Have to Repent or Ask for Forgiveness If I Am Not Making Mistakes?’ (Video) | Politics

Photo de NIPYATA! sur Unsplash

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Après la nomination de Kamala Harris lors de la récente convention du parti démocrate américain, la situation de départ pour les élections présidentielles de novembre prochain est claire. Pour le parti démocrate, la baptiste Kamala Harris sera en lice avec le luthérien Tim Walz comme vice-président désigné, tandis que Donald Trump, qualifié d’« ami des chrétiens », entrera en lice avec son vice-président potentiel catholique James David Vance. Une sélection équilibrée pour les chrétiens ? A première vue, tout au plus. Il y a de bonnes raisons de ne pas se fier aux pieux emballages et de s’interroger sur la culture politique et le programme politique fournis. Et vérifier par la même occasion si et dans quelle mesure la propre foi chrétienne influence l’agenda politique personnel.

Prenons comme point de départ l’attentat condamnable perpétré contre le candidat à la présidence Donald Trump lors de la convention du parti républicain américain en juillet dernier (correction : l’attentat a eu lieu juste avant la convention du parti républicain américain. La rédaction de ChristNet). Pour Trump, l’interprétation était claire après le premier choc : il n’avait survécu à l’attentat contre sa vie que « grâce à la grâce de Dieu tout-puissant » : « D’une certaine manière, je me sentais très en sécurité, car j’avais Dieu de mon côté1 » .

Prier pour Donald Trump ?

Lors de la même convention du parti, l’évangéliste Franklin Graham a déclaré à propos de l’attentat contre Trump que Dieu avait épargné sa vie et a prié pour le possible futur président. Robert Jeffress, responsable de la « First Baptist » Megachurch à Dallas, aurait remercié Dieu d’avoir « protégé la vie de ce courageux leader, guerrier pour la vérité et ami des chrétiens du monde entier2 » . Joe Biden a également déclaré publiquement qu’il souhaitait prier pour Donald Trump.

Cela est alors allé trop loin pour le théologien américain William Schweiker. Le maître de conférences en éthique chrétienne à l’université de Chicago a déclaré qu’il aurait préféré que Biden demande à tout le monde de s’engager pour la paix et l’unité « plutôt que d’invoquer une puissance supérieure ». A la question de savoir si la survie de Trump de justesse était l’œuvre de Dieu, il a répondu : « Peut-être. Je ne le sais pas ». Dans une interview accordée au journal « Die Zeit », Schweiker a critiqué Trump pour avoir abusé de la foi chrétienne, alors qu’il n’est pas connu pour sa piété ni pour être un fidèle de l’église qui respecte la Bible. « Si quelqu’un se dit chrétien, il doit y avoir, au niveau personnel, une certaine cohérence entre sa foi et ses actes. Mais je ne vois tout simplement aucune humilité3 chez Trump » .

Jusqu’où va la foi chrétienne ?

J’irais encore un peu plus loin. Les hommes et les femmes politiques qui se disent chrétiens ou qui se réclament de la foi chrétienne devraient faire preuve d’un peu de foi non seulement dans leur environnement personnel, mais aussi dans leur agenda politique et leur culture politique. Le vice-président désigné de Trump, J.D. Vance, s’est converti au catholicisme il y a cinq ans. On peut toutefois douter que ses opinions sur la politique et sur ce à quoi devrait ressembler un État optimal soient vraiment « assez proches de la doctrine sociale catholique »4 , comme il le prétend.

Les quelques républicains du « Lincoln Project » qui sont critiques envers Donald Trump ne mâchent pas leurs mots à ce sujet. Dans le cadre de la convention républicaine, ils ont diffusé en boucle des clips rappelant les scandales de Trump. L’assaut de ses partisans sur le Capitole. A sa condamnation pour fraude, après avoir dissimulé dans ses documents commerciaux l’argent versé à une star du porno comme frais d’avocat. « Ce n’est pas un chrétien, ce n’est pas un leader », ont-ils souligné, “ne vous faites pas avoir”. Et : « Allez voter pour mettre fin à ses mensonges »5 : une antirecommandation pour Trump.

Si c’est le cas, pourquoi tant de chrétiens, même sérieux, tombent-ils malgré tout dans le panneau de Trump ? Premièrement, Trump sait quels thèmes il doit aborder pour gagner les chrétiens proches de la Bible à sa cause : par exemple l’avortement et le patriotisme. Deuxièmement, certains chrétiens américains suivent une foi individuelle qu’ils célèbrent dans le culte dominical, sans remettre en question leur agenda politique ancestral à la lumière de l’Évangile. Souvent, cette attitude est combinée à une préférence pour les personnalités qui prêchent aux gens ce qu’il faut. Comme on le sait, on n’apprend pas forcément à remettre en question ou à vérifier les faits présentés au cours d’un culte, cela nécessiterait des discussions approfondies. Ces chrétiens croyants n’ont-ils pas remarqué que Trump représente une culture politique haineuse ? Ils lui tiennent visiblement rigueur de ce point noir. Après tout, nous sommes tous des pécheurs.

L’avortement comme acte symptomatique

Eh bien, aucun chrétien sérieux ne peut être un partisan du (non-)droit à l’avortement. La vie doit être protégée, même si elle ne se développe que dans le ventre de la mère. Mais il ne suffit pas d’être contre l’avortement. La société doit créer un environnement qui rend l’avortement inutile ou qui l’autorise tout au plus en tant que dilemme éthique6.

Il faudrait dire aux démocrates que le (non-)droit à l’avortement n’est qu’en apparence une préoccupation féministe. Il se peut certes qu’il y ait des femmes qui utilisent l’avortement comme moyen de planification familiale. Mais il s’agit là d’une inconscience crasse, car il existe pour cela des moyens plus efficaces. Si l’on y regarde de plus près, on s’aperçoit que ce n’est généralement pas la femme enceinte qui veut avorter, mais l’homme pour qui cette grossesse est inopportune ou l’homme qui a déjà pris la poudre d’escampette. Ou alors, c’est la pression qui pèse sur les femmes d’aujourd’hui pour qu’elles soient le plus possible à la disposition du monde du travail.

En d’autres termes, les avortements sont en général des actes purement symptomatiques. Derrière ces actes se cachent des questions et des problèmes qui devraient être abordés afin que l’avortement ne soit pas nécessaire. Mais pour cela, il faudrait des conditions sociales et sociétales appropriées, qui font généralement partie d’un agenda politique de gauche. C’est pourquoi j’ai plaidé dans un article précédent pour une collaboration entre les chrétiens évangéliques de droite et de gauche afin d’aborder de manière crédible le (non-)droit à l’avortement7 .

Les limites du patriotisme

Que Dieu bénisse l’Amérique, dit l’hymne non officiel des États-Unis8 . Cette chanson impressionnante célèbre les beaux paysages et la liberté qui règne dans ce pays. D’un point de vue chrétien, c’est tout à fait justifié, car les Etats-Unis ont été fortement marqués par le calvinisme et le piétisme. Les droits de l’homme et la démocratie sont l’expression logique d’une vision biblique et chrétienne de l’humanité. Les États-Unis sont considérés comme la plus grande démocratie moderne du monde. Il n’y a rien à redire à l’amour de ces valeurs.

Mais si l’on lit la Bible d’un peu plus près, on verra que Dieu ne veut pas seulement bénir les États-Unis, mais tous les peuples de la terre. Eux aussi doivent être bénis avec de beaux paysages qui ne sont pas exploités, avec la liberté, les droits de l’homme et la démocratie pour toutes les parties de la population. Après tout, tous les hommes ont été créés par Dieu. Avec Dieu, il n’y a pas d’Amérique d’abord. Même si chaque État doit et peut s’organiser lui-même, bien s’occuper de ses citoyens et encourager leur initiative personnelle, notre Créateur veut davantage : il veut encourager notre vision d’ensemble. De son point de vue, le monde est un village dans lequel tous devraient prendre soin les uns des autres.

Cette vision devrait également être intégrée dans notre politique migratoire, pour faire entrer en jeu un autre cheval de bataille de Donald Trump. Deux longues contributions ont été consacrées dans le forum à ce que pourrait être une politique migratoire globale9 . Les chrétiens au moins devraient mesurer les propositions des deux partis américains à l’aune de ces critères. Il ne suffit pas d’ériger des murs à la frontière.

Il est légitime que de nombreuses personnes s’inquiètent de la démocratie aux États-Unis. Le Project 2025 du think tank conservateur Heritage Foundation montre entre autres comment Trump pourrait étendre de manière significative les pouvoirs du président. Un ancien conseiller et un autre allié de Trump ont participé à l’élaboration de ce plan. Ils font partie des principaux auteurs de son nouveau programme électoral110 . L’annonce par Trump de son intention de gouverner en dictateur pendant une journée après sa réélection est-elle peut-être plus qu’une plaisanterie ? Va-t-on alors vers une « déportation massive et immédiate » des demandeurs d’asile, comme ses fans l’avaient demandé sur des pancartes en carton lors de la convention du parti ?

Pendant ce temps, dans la campagne électorale américaine, les deux camps se battent avec acharnement. Mais jusqu’à présent, la règle était la suivante : les candidats respectent la Constitution et même les adversaires politiques acharnés conservent un minimum de décence. Et lors de l’investiture devant le Capitole, on se serre la main. Lors de l’investiture de Donald Trump en janvier 2017, elle et son mari étaient venus malgré leur colère, car elle voulait honorer la démocratie et ses valeurs, écrivait Hillary Clinton avec le recul11 . Ce principe a été remis en question par Trump en 2020, après sa destitution. Kamala Harris se bat selon les règles démocratiques éprouvées, Donald Trump les ignore. Il ne devrait reconnaître l’issue de la prochaine élection que s’il gagne12 . Lors d’un meeting électoral en mars, Trump avait déclaré : « Si je ne suis pas élu, il y aura un bain de sang13 » .

Trump admire les hommes forts des régimes non démocratiques : ainsi Vladimir Poutine, Viktor Orban et le Nord-Coréen Kim Jong-un. Déjà pendant son mandat, il avait parlé d’un troisième et d’un quatrième mandat – en plaisantant. « Trump caresse-t-il l’idée d’une modification de la Constitution à la Poutine ou Hugo Chavez … pour prolonger son mandat14 ? Le commentateur du Bund Christoph Münger conclut : « L’enjeu de cette campagne électorale n’est pas un programme politique, mais d’empêcher un retour de Donald Trump à la Maison Blanche. Quelle que soit l’opinion que l’on a de Kamala Harris, que l’on approuve ou non ses projets en matière de politique étrangère, intérieure et économique, on ne peut que lui souhaiter bonne chance dans ce combat de boxe pour la démocratie ».

Les deux experts en politologie Adrian Vatter et Rahel Freiburghaus désignent dans une comparaison la « personnalité sombre » des politiciens populistes et utilisent pour cela les critères du narcissisme (amour de soi), de la psychopathie (troubles psychiques) et du machiavélisme (recherche absolue du pouvoir). En tête15 se trouvent Donald Trump, Aleksandar Vucic (Serbie) et Jean-Luc Mélanchon (France). Les problèmes n’existent donc pas seulement aux Etats-Unis, mais aussi tout près de chez nous.

Trump est une révélation

Encore une fois, comment les chrétiens peuvent-ils en arriver à voter pour Donald Trump ? Permettez-moi, pour conclure, d’avancer une thèse provocatrice.

Avec le spécialiste du Nouveau Testament Adolf Pohl, je suis d’avis que l’Antéchrist n’est pas (seulement) une personne particulière qui apparaîtra à la fin des temps et provoquera la fin du monde. Dans son interprétation de l’Apocalypse en deux volumes16, Pohl le décrit comme une figure de proue politique et/ou ecclésiastique qui présente des traits antichrétiens et qui est apparue ou apparaîtra à différentes époques. Lorsque l’« Apocalypse de Jean » a été lue dans les églises chrétiennes primitives, c’est l’empereur romain Néron qui s’est comporté comme l’antéchrist. Important : à l’époque, le dernier livre de la Bible n’était pas considéré comme une menace pour l’avenir, mais comme un livre de consolation qui promettait la victoire de la Bonne Nouvelle sur le mal et le méchant.

C’est ainsi que nous devrions nous aussi lire l’« Apocalypse ». Et s’attendre à ce que des leaders incarnant les traits de l’Antéchrist apparaissent régulièrement. Ils sont célébrés comme des figures messianiques, avec l’attente qu’ils puissent délivrer le peuple du mal. Mais en réalité, ils mentent et trompent, répandent des hérésies, séduisent leurs partisans et forment des coalitions pour accroître leur pouvoir. Si l’on analyse dans ce contexte le discours et les actes du candidat Donald Trump, on devrait être perplexe. Trump a fait du mensonge son outil politique dans la plus grande démocratie du monde.

Le christianisme intégré serait ici un bon facteur de protection. La théologie évangélique n’est pas la seule à pouvoir être séduite, la théologie libérale aussi. Tout comme une « théologie » charismatique qui repose avant tout sur des sentiments. Avec les chrétiens américains, nous avons besoin aujourd’hui aussi, comme facteur de protection, d’une théologie qui laisse la foi être marquée de manière conséquente par Jésus-Christ, le seul Seigneur du monde, et par la parole qu’il nous adresse, liée à une foi holistique qui, à partir de ce centre, englobe tous les domaines de la vie.

C’est peut-être pour cela que Donald Trump a été préservé par Dieu lors du récent attentat, afin que nous puissions apprendre cela à nouveau.


1. idea Magazin 30/31 2024
2. Medienmagazin PRO vom 15.7.24
3. Medienmagazin PRO vom 18.7.24
4. idea Magazin 30/31 2024
5. Der Bund, 18.7.24
6. Dans un dilemme éthique, deux positions éthiquement discutables s’opposent. Il s’agit alors de choisir la solution la moins discutable.
7. https://www.insist-consulting.ch/forum-integriertes-christsein/22-8-1-wie-weiter-mit-dem-un-recht-auf-abtreibung.html
8. https://www.youtube.com/watch?v=N-CCBaPxGaY
9. https://www.insist-consulting.ch/forum-integriertes-christsein/23-9-1-die-migration-neu-denken-lernen-teil-1.html / https://www.insist-consulting.ch/forum-integriertes-christsein/23-10-1-die-migration-neu-denken-lernen-teil-2.html
10. Der Bund, 11.7.24
11. Der Bund, 19.8.24
12. Der Bund, 3.8.24
13. Der Bund, 9.8.24
14. Der Bund, 3.8.24
15. Der Bund, 12.8.24
16. « Die Offenbarung des Johannes » de la Wuppertaler Studienbibel, 1977, Wuppertal, R. Brockhaus-Verlag


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Cet article est d’abord paru sur INSIST.

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80% des évangéliques blancs ont voté en faveur de Donald Trump aux élections américaines de novembre 2016. Comment l’expliquer ?

Un vote systématique

Aujourd’hui, la grande majorité des évangéliques, cette frange majoritaire du protestantisme américain, vote systématiquement pour le candidat républicain aux élections présidentielles. Il faut revenir à la présidence de Jimmy Carter (1977-1981) pour comprendre l’origine de ce phénomène : démocrate, baptiste du Sud (Southern Baptist Convention, conservatrice la plus grande dénomination protestante des USA) il mène sa campagne en 1976 avec beaucoup de citations de la Bible et l’affirmation qu’il est né de nouveau. Lui-même est enseignant à l’école du dimanche, activité qu’il n’a d’ailleurs jamais cessée. En novembre 1976, il est élu avec un fort soutien des protestants évangéliques, notamment du Sud. Le magazine Newsweek déclare l’année en cours celle des évangéliques, eux qui auparavant, étaient restés en retrait de la politique pendant des décennies. Pourtant, pour cette population, Jimmy Carter se révélera trop proche au mouvement des années 60.

La contre-culture des Sixties

Ces années-là sont aussi appelées les années de la contre-culture. Les percées dans les droit-civiques pour les Afro-Américains, la contestation de la guerre du Vietnam, les mouvements beatnik et la culture musicale associée (comme Woodstock, comprenant également l’usage de drogues), l’émancipation des femmes, la révolution sexuelle, tous ces éléments, malgré les aspects positifs reconnus par tous comme le combat des descendants d’esclaves pour leur intégration complète dans la société, vont amener des inquiétudes au sein de la frange de tendance conservatrice de la population dont font partie la majorité des évangéliques. Billy Graham, référence dans cette famille chrétienne même s’il n’est, lui-même, pas réellement conservateur et qu’il a soutenu Martin Luther King, verra un risque de déstabilisation de la société américaine derrière l’activisme du mouvement des droits-civiques. On peut aussi parler du contexte d’opposition au communisme dans la société en général du moment que ces mouvements de changement tendent vers la gauche

Concernant l’éthique sexuelle, le mouvement des années 60 déclenche une banalisation progressive de la sexualité hors mariage, de l’avortement, de l’adultère, du divorce, de la pornographie, de la prostitution, de l’homosexualité et du transsexualisme.

Pas les mêmes priorités

Jimmy Carter va se révéler passablement proche de ces mouvements dans le domaine de la famille en soutenant le féminisme, la redéfinition des rôles dans le couple, le laxisme moral dans le domaine sexuel, dont l’homosexualité et l’avortement contre lesquels il n’entreprend pas assez au goût des conservateurs.

D’un autre côté, il est totalement acquis aux droits-civiques et à la lutte pour la justice sociale. Ceci contrairement à la majorité des évangéliques blancs qui, dans ce domaine, suivent le mouvement plutôt par la force des choses que par une conviction profonde. Plus précisément, les élites baptistes blanches sont favorables au changement à la différence de leur base. Carter, quant à lui, cherche à introduire par la contrainte, la fin de la ségrégation dans les écoles privées blanches du Sud (souvent évangéliques) réticentes au changement.

La droite chrétienne

Dès 1979, le mouvement de la droite chrétienne se constitue dont un des objectifs est de porter désormais le soutien évangélique systématiquement aux candidats républicains, en premier lieu Ronald Reagan. Son objectif : contrer l’évolution de la société et des chrétiens qui ne font que la suivre. Ce mouvement apparaît parallèlement au mouvement conservateur dans l’Eglise catholique menée par Jean-Paul II qui est une réaction à la théologie de la libération et aux positions libérales de la hiérarchie romaine aux USA.

Le mouvement de sécularisation qui s’amorce aux Etats-Unis va dans l’autre sens dynamiser les églises évangéliques, qui vont rentrer dans un militantisme intensif pour sauvegarder l’identité traditionnelle affirmée de leur pays. Dans les années 1970–1980 le nombre de leurs membres va dépasser pour la première fois celui des Églises modérées. En effet, celles-ci ont en bonne partie accompagné le mouvement de relativisation de la foi chrétienne dans la société. Apparemment, l’humanisme, l’accent sur les valeurs et la réflexion de transformation de la société tendent à affaiblir la foi lorsqu’ils ne sont pas accompagnés d’une vie spirituelle active.

Le succès des Républicains

Sur le plan politique, le mouvement de la droite chrétienne conduira à une victoire éclatante des Républicains aux élections de 1980 (Ronald Reagan), confirmée lors des deux élections suivantes (Reagan et Bush père).

Par la suite, les deux victoires du démocrate Bill Clinton, considéré par beaucoup de conservateurs comme un homme des Sixties, va entraîner par retour de manivelle celle de George W. Bush porté au pouvoir en 2000. En 2004, 75% des évangéliques (blancs), et 56% des catholiques, votent en faveur de Bush fils. Ces valeurs sont sensiblement les mêmes que celles qui ont porté Donald Trump à la présidence.

Ce dernier réussit, entre autres, grâce à une campagne populiste attirant l’attention des gens,  les médias lui consacrant énormément de temps de couverture ce qui se traduit en termes d’audimat et de profits. L’élection de Donald Trump s’explique également par ce support massif des évangéliques blancs et de leurs motivations.

Bibliographie

  • D W. Hudson, Onward Christian Soldiers, Threshold Ed., 2008 (catholique)
  • S. Fath, Militants de la Bible aux Etats-Unis, Evangéliques et fondamentalistes du Sud, Autrement frontière, 2004 (évangélique)
  • T. Mitri, Au nom de la Bible, au nom de l’Amérique, Labor et Fides, 2004 (Conseil Œcuménique des Eglises)
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Ma femme et moi étions à Cuba pendant deux semaines l’année dernière. Nous étions avec l’ouragan Ivan, qui avait la même force que Katrine maintenant. Un ouragan s’annonce 10 jours à l’avance, est ensuite suivi par les satellites météorologiques et sa trajectoire peut désormais être calculée de plus en plus précisément par les ordinateurs météorologiques. Dix jours avant l’arrivée d' »Ivan », les premiers rapports ont été diffusés, une semaine avant que les premières mesures ne soient prescrites et quelques jours avant que l’évacuation de centaines de milliers de personnes ne soit préparée. Nous avons été témoins de tout ce qui y a été mis en œuvre pour éviter les pertes de vies humaines. Tout le monde a bénéficié d’un endroit sûr, y compris le transport.

Aux États-Unis, il semble que ce soit tout le contraire : il semble qu’on ait simplement dit aux gens « fuyez maintenant », mais personne ne s’est soucié de savoir si les pauvres avaient même un moyen de transport ou un endroit où aller. Des centaines de milliers de personnes restent donc dans leurs misérables Mobile Homes (que j’ai pu voir par moi-même dans le sud des États-Unis il y a quelques années) et dans des logements urbains en espérant qu’elles survivront….

Je suis étonné quand on parle de la « taille inattendue » d’une catastrophe, où rien n’aurait pu être fait. Il aurait été possible de sauver la plupart des vies. Cuba subit chaque année des ouragans de catégorie 4 à 5, qui font à chaque fois entre zéro et 20 morts, avec le même nombre d’habitants que les trois Etats touchés aux Etats-Unis réunis. Ce qui se passe aux États-Unis aujourd’hui est une expression de « chacun pour soi », qui peut évidemment être mortelle pour les personnes vulnérables…. Au lieu de se contenter de prier pour que les ouragans passent, certains cercles feraient mieux d’examiner l’enseignement de Jésus sur la solidarité. Je pense qu’il est un peu effronté de refuser d’être solidaire d’une part, et d’autre part d’exiger de Dieu qu’il regarde ailleurs. Je ne suis pas surpris qu’il ne prenne pas tout à la légère…. Une nouvelle réflexion sera-t-elle menée ?

Photo by NASA on Unsplash

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La bible parle souvent de « péchés ». Non pas pour nous causer des problèmes et des épreuves, mais pour nous signaler les pièges. Dieu veut nous empêcher de pécher pour que notre précieuse relation avec lui ne souffre pas et pour que nous ne nous nuisions pas à nous-mêmes ou à notre prochain. La guerre en Irak, à notre avis, a sa racine dans une combinaison de péchés.

L’avidité de l’argent

1 Timothée 6.10 dit : « ….une racine de tout mal est l’amour de l’argent, (…) ». L’emprise sur le pétrole est un moteur majeur de l’administration Bush : Bush lui-même est issu d’une famille de pétroliers, le Vice Cheney était à la tête de la plus grande entreprise d’équipement de forage pétrolier au monde (Halliburton), et Bush lui-même doit son élection, entre autres, à Exxon, qui a prêté des sommes énormes aux candidats républicains lors de la campagne électorale de 2000. En mai 2001, après la crise énergétique américaine, Cheney a déclaré que « l’amélioration de l’accès aux réserves de pétrole du golfe Persique » était une priorité nationale en matière de sécurité énergétique. L’ouverture des réserves énergétiques irakiennes pourrait signifier une réduction de moitié du prix du pétrole aujourd’hui, selon Jamani, l’ancien ministre saoudien de l’énergie. Une aubaine pour un pays qui consomme 2,5 fois plus de pétrole par habitant que les autres pays industrialisés, mais qui n’a pourtant aucune envie de faire quoi que ce soit contre cette surconsommation….

Les magnats des médias comme Rupert Murdoch ont également un intérêt énorme dans la guerre, qui fait monter en flèche les audiences et donc les profits. Le public américain est donc poussé à la guerre par les médias. Enfin, l’industrie de l’armement (les États-Unis représentent 40 % de tous les budgets d’armement dans le monde) a un intérêt dans la guerre.

L’autosatisfaction

Cependant, un autre péché important conduit à la guerre : l’autosatisfaction. « Mais que vois-tu de la paille qui est dans l’oeil de ton frère, sinon la poutre qui est dans ton propre oeil que tu ne perçois pas ? » (Luc 6.41) Plus nous nous sentons bons, plus nous nous éloignons de Dieu. Car alors, nous ne permettons plus que nos actions soient remises en question par Dieu et la sagesse du Saint-Esprit se tarit. Les Pharisiens subirent ce sort et furent jugés en conséquence par Jésus.

« Car celui qui s’élève sera abaissé, et celui qui s’abaisse sera élevé » (Luc 14.11). L’exaltation et l’autosatisfaction ont malheureusement pris un niveau dans certains cercles du christianisme évangélique qui a de plus en plus d’effets négatifs sur le monde entier. Il ne s’agit pas ici de faire de nous des chrétiens pires que les autres, mais il nous semble important de souligner le danger de l’autosatisfaction avant qu’il ne soit trop tard. Sans repentir dans ce domaine, nous risquons de devenir indignes de confiance aux yeux des non-chrétiens, voire de plonger le monde dans l’abîme. La guerre en Irak est un pas de plus vers l’abîme à cet égard.

Nationalisme

George Bush, chrétien né de nouveau, a proclamé la « lutte monumentale du bien contre le mal » et est soutenu en cela par une grande partie des églises évangéliques des États-Unis. On sait d’emblée qui sont les gentils (et cela est compris dans l’absolu) : l’Occident, et surtout les États-Unis, « le pays de Dieu », comme certains ont coutume de le dire. La « mission mania » du gouvernement américain a pris des proportions effrayantes à cet égard. Ici, le nationalisme a été mélangé à la religion de manière désastreuse, donnant lieu à un auto-agrandissement national. C’est pourquoi elle estime qu’elle n’a plus à prendre personne en considération. La subordination démocratique aux compromis multilatéraux dans le cadre international devient de plus en plus un mot étranger. Cela est apparu clairement au cours des dix dernières années, lorsque les États-Unis n’ont pratiquement signé aucun accord international affectant leurs intérêts. Dans le cas de l’Irak, l’ONU n’a été l’organe de négociation que jusqu’à ce qu’il devienne évident que l’ONU ne se plierait pas à la volonté des États-Unis. Les opposants à la guerre, tels que l’Allemagne et la France, ont alors ressenti l’agression des États-Unis par des menaces, des annulations de traités et des railleries. Ceux qui ne font pas ce que veulent les États-Unis sont punis. Est-ce la liberté dont ils parlent ?

Les forces motrices de la campagne d’Irak (Rumsfeld, Wolfowitz, Cheney, mais aussi le frère de George Bush, Jeb, et l’ancien Vice-Président Quayle) sont d’ailleurs tous cosignataires de la charte du think tank américain « The Project for a New American Century ». L’objectif de ce projet est que l’Amérique devienne le leader mondial et qu’elle exerce une responsabilité mondiale pour la paix et la sécurité par

  • Des forces militaires fortes (augmentation significative des dépenses militaires)
  • Renforcer les liens avec les alliés démocratiques et défier les régimes hostiles en fonction de nos intérêts et de nos valeurs.
  • promouvoir la liberté politique et économique à l’étranger
  • Acceptation de la responsabilité unique de l’Amérique dans le maintien et l’expansion d’un ordre international amical, en faveur de notre sécurité, de notre prospérité et de nos principes. Tous ces documents sont accessibles au public sur www.newamericancentury.org…

Dans la « croisade contre le mal », le schéma de la parabole de la « poutre dans son propre oeil » et de l’autosatisfaction est donc bien suivi. Déjà dans l’interprétation de l’attentat du 11 septembre, la question n’était guère posée de savoir avec quelle part l’Occident contribuait au terrorisme avec son comportement dans les pays arabes. (LIEN ?). Pourquoi exactement y a-t-il eu une telle poussée de fondamentalisme dans les pays arabes au cours des 20 dernières années ? La question de notre propre culpabilité n’a jamais été posée. Au contraire, nous restons les meilleurs. Dans la lutte monumentale contre le mal, le mal est situé « quelque part dehors » au lieu d’être à l’intérieur de nous-mêmes. La plupart des dictatures que les États-Unis combattent au Moyen-Orient ont été créées ou soutenues par les États-Unis eux-mêmes au début pour promouvoir leurs propres intérêts. Ainsi, l’autosatisfaction et l’incapacité à reconnaître sa propre culpabilité dans la montée de la terreur empêchent une véritable solution. En conséquence, la guerre en Irak continuera à alimenter la spirale de la violence : l’ignominie de la défaite (attendue) de la partie « arabe » et la piqûre de l’occupation américaine, ainsi que la haine des populations pour les dirigeants arabes qui ont suivi les États-Unis, donneront un coup de fouet massif à l’intégrisme islamique et provoqueront des renversements à moyen terme. Espérons que cela n’implique pas la puissance nucléaire pakistanaise. Avec la guerre en Irak, la terreur ne sera pas réduite, comme Bush voudrait nous le faire croire, mais elle augmentera. Cela justifiera alors l’offensive anti-terroriste de l’Occident….

La peur de la fin des temps

En hiver 2002-2003, selon un sondage américain, 72% des chrétiens nés de nouveau aux États-Unis croient que « nous assistons actuellement au début de la guerre qui mènera à l’Antéchrist et à l’Armageddon ». Peut-être que le comportement de l’Occident lui-même fera de ces déclarations une prophétie auto-réalisatrice…. Au cours des dix dernières années, l’Occident a connu un véritable boom dans l’interprétation des prophéties bibliques de fin-des-temps. Rappelons également les romans de fin d’année de Tim La Haye, dont 50 millions d’exemplaires ont déjà été vendus. Cette fièvre de la fin des temps a alimenté la peur chez les chrétiens et les pousse à réagir de façon excessive à une menace perçue, y compris la peur pour Israël. Une prophétie qui s’accomplit…. Par conséquent, dans sa manie missionnaire de l’Ancien Testament, Bush estime que les Etats-Unis doivent sauver Israël de l’Irak (géographiquement sur le site de l’ancienne Babylone). Il est possible que Bush souffle en fait pour la guerre par peur pour Israël. Ses conseillers, pour d’autres raisons, comme nous l’avons vu, ont réussi à lui mettre la puce de la peur à l’oreille…. Mais en lançant une attaque occidentale, c’est surtout la haine arabe d’Israël qui sera alimentée. Au lieu de protéger Israël, elle ne fera que le mettre encore plus en danger. La seule issue sera alors l’occupation américaine de l’ensemble du monde arabe. La spirale continue…

Dans les discours américains sur la guerre, on souligne toujours qu’il est du devoir de Dieu de diffuser les bonnes valeurs occidentales de liberté et de démocratie. Pourtant, ces mêmes cercles n’ont pas remarqué que certaines de ces valeurs ont depuis longtemps été corrompues par Mammon :

  • « Liberté » : Avec l’inégalité sociale croissante et l’exclusion toujours plus grande des indigents des conditions de vie de base telles que la santé et l’éducation, la liberté des classes inférieures devient de plus en plus une farce. Seuls les forts ont les moyens (argent et éducation) d’exploiter cette liberté. Et avec les libéralisations et les privatisations, ils obtiennent de plus en plus de libertés aux dépens des faibles. Parallèlement, l’idéologie du « qui veut, peut » est promue….
  • « Démocratie » : aux États-Unis aujourd’hui, seuls les riches ou ceux qui sont soutenus par l’économie ont le droit de vote, les autres n’ont aucune chance dans la coûteuse bataille publicitaire des élections. En l’an 2000, selon Cash, environ 500 millions de dollars ont été dépensés pour la campagne électorale, en l’an 2002 déjà un milliard de dollars, dont les deux tiers en dons électoraux de l’économie aux républicains… La formation de l’opinion est également massivement faussée par la dépendance des médias à l’égard des entreprises.

Que se passera-t-il ensuite dans ces circonstances ? Nous osons dire qu’après la rapide victoire américaine attendue, l’arrogance (dans les domaines géopolitique, mais aussi économique) va s’intensifier et l’arrogance du pouvoir continuer à se manifester. La guerre en Irak ne sera pas la dernière guerre d’agression, d’autant plus que, comme nous l’avons déjà dit, le terrorisme sera probablement fomenté par cette guerre. Le peuple américain continuera à suivre « l’homme fort ». Comment les autres pays vont-ils réagir ? Dans un premier temps, beaucoup, impressionnés par le pouvoir, vont s’allier aux États-Unis. Leur pouvoir augmentera alors encore plus. Mais beaucoup dépendra de qui contrôlera les médias. Plus l’arrogance du pouvoir se déploie, plus la résistance s’accroît. Espérons que ces résistances ne se termineront pas dans la violence, mais qu’elles seront réglées pacifiquement !

La mise en garde contre le péché n’est donc pas du moralisme, mais une préoccupation pour les conséquences du péché et pour l’amour qui est le premier à être blessé. Prions pour George W. Bush et son administration. Et que Dieu nous empêche de mener des croisades au nom de Dieu. Car nous sommes appelés à rendre l’amour de Dieu concrètement visible dans ce monde.


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