Quand Dieu inspire l’agriculture

,
~ 5 min

Témoignage de Roger Zürcher, ingénieur agronome actif dans la coopération internationale, texte tiré de son blog Titunaye.

Une histoire renversante

J’ai eu le privilège inattendu de participer à une formation à l’agriculture de conservation au Zimbabwe en novembre 2014, pays que je n’avais jamais visité et où je ne connaissais personne. Ce voyage a été renversant sur plusieurs points. J’ouvre ici une petite parenthèse: J’ai toujours aimé les renversements qui existent dans le Royaume de Dieu, « The Upside-Down Kingdom », comme on dit en anglais.

La formation était organisée par Foundations for Farming (appelé auparavant « Farming God’s Way »). Cette structure a été fondée par un paysan Zimbabwéen, Brian Oldreive, d’origine anglaise, qui a un parcours tout à fait atypique et « renversant ». Il était un grand producteur de tabac (sur plusieurs milliers d’hectares), qu’il cultivait de manière conventionnelle (c’est à dire en utilisant les techniques les plus courantes, avec labour et produits chimiques). Un jour, il a décidé de devenir disciple de Jésus-Christ. Lors d’une nuit d’insomnie, il a compris que son travail n’était plus en adéquation avec sa nouvelle vie. Il ne voulait plus produire du tabac, un produit qui asservit les gens. Il décida donc de cultiver du maïs.

Être fidèle à la terre

Malheureusement, il n’avait pas d’expérience dans cette culture, et les récoltes étaient mauvaises. A tel point qu’il a dû demander aux banques de lui prêter plus d’argent. Ces dernières étaient d’accord, à condition qu’il revienne à la production de tabac, la culture pour laquelle il était compétent, selon elles. Il a refusé et a finalement tout perdu: sa ferme et ses terres. Il a ensuite cherché du travail à Harare et finalement trouvé une ferme à louer, mais dont les terres étaient dans un état catastrophique, totalement érodées. Il a essayé tout de même de faire du maïs dans ces conditions, mais les rendements étaient faibles et il produisait à perte. La situation était critique à nouveau. Dans son désespoir il s’est alors tourné vers Dieu en lui demandant de lui enseigner comment cultiver. Etrange requête pour un paysan de génération en génération.

La forêt respecte le sol

Dieu lui a alors dit (ou lui a inspiré l’idée) d’aller en forêt. Priant dans la nature il a eu le sentiment que Dieu lui disait d’observer ce qu’il voyait. Il a réfléchi au fonctionnement de la forêt, un écosystème naturel ou « divin ». Deux principes lui sont alors apparus qu’il désignera comme les « principes de respect du sol » :

  1. Non-labour : les arbres poussent sans labour, la terre n’a pas besoin d’être retournée pour que les graines poussent.
  2. Couverture permanente du sol : la terre est couverte en permanence par des feuilles mortes et du matériel végétal en train de sécher ou se décomposer.

Brian a alors tenté d’appliquer ces principes dans ses champs. Le principe du non-labour existe depuis les années 1930 en agriculture sous le nom « d’agriculture de conservation » (approche aujourd’hui promue par la FAO1 ). Mais la méthode développée par Brian va plus loin que ce qui est généralement compris sous ce terme.

Des principes à partager

Il a commencé par un seul hectare et, encouragé par les résultats, s’est lancé ensuite dans deux hectares de maïs cultivés sans labour et avec du mulch (litière végétale). Les résultats étaient tellement bons qu’il réussissait à faire des bénéfices qui compensaient les pertes faites sur le reste de la ferme. Il a ensuite étendu sa méthode à l’ensemble du domaine et a même racheté des terres aux voisins pour finalement cultiver 3’500 hectares sans labour.

C’est là que Dieu lui a dit : « Je ne t’ai pas montré cela pour que tu t’enrichisses, mais pour que tu le partages avec tout le monde, et les pauvres en particulier ». Brian a donc commencé à organiser des cours pour les paysans et mis en place des champs de démonstration. Les résultats étaient excellents : les rendements dépassaient les 10 tonnes par hectare, alors que souvent les paysans récoltent dix fois moins, – mais ne duraient pas quand les équipiers de l’organisation quittaient la zone. Quel était le problème?

Apprendre à faire du bénéfice

L’équipe de Foundations for Farming s’est rendu compte que les paysans ne manquaient pas de connaissances techniques, mais du savoir permettant d’implanter ces connaissances pour en faire une activité rentable. Brian demanda alors à Dieu de lui révéler comment sortir de là, et la réponse était: « Apprendre à faire du bénéfice ». Pour cela, quantre principes sont à respecter:

  1. on time : faire les choses à temps, non pas en retard ; c’est particulièrement important pour le semis et le sarclage.
  2. at standard : respecter les normes de qualité ; par exemple, la plante doit pouvoir se développer correctement.
  3. without wastage : la pratique des feux de brousse, par exemple, est un gaspillage incroyable de ressources qui partent en fumée, sans parler de la destruction de la structure du sol.
  4. with joy : la joie permet de dégager l’enthousiasme ; elle vient aussi d’une attitude reconnaissante et permet de rester en communion avec le Créateur.

En apparence, ces principes sont assez simples, mais ils sont tout aussi révolutionnaires que les principes de respect du sol.

Imiter la nature, respecter la Création

J’ai été émerveillé de constater à quel point les participants des différents pays africains présents à la formation étaient enthousiasmés par la méthode « Farming God’s Way ». Plusieurs d’entre eux ont même témoigné qu’ils vont démissionner un jour de leur poste dans leur organisation pour se consacrer à l’agriculture! Cela ne va pas forcément faire plaisir à leur employeur actuel, mais quel renversement! Dans un contexte où les emplois à durée indéterminée sont rares, il est vraiment surprenant d’entendre ce discours! Moi-même d’ailleurs, j’ai ma petite idée derrière la tête concernant la culture d’un lopin de terre…

Je suis étonné par la sagesse ou la façon de faire de Dieu. Depuis toujours, l’imitation de la nature a été un moteur pour l’innovation. Dans cet exemple au Zimbabwe, c’est par cette méthode qu’un « simple » paysan, conduit par Dieu, a compris comment être fidèle à la terre et comment restaurer des sols qui avaient été maltraités.

Lectures

Pour plus de renseignements, voyez le site suivant: http://www.foundationsforfarming.org.

D’autres méthodes existent, qui imitent aussi la nature, comme la permaculture : http://www.permaculture.ch/la-permaculture/.


1. Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (« Food and Agriculture Organization of the United Nations »).

0 réponses

Laisser un commentaire

Rejoindre la discussion?
N’hésitez pas à contribuer !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.